Marchionne peut-il encore sauver Fiat ?
Constat : des apparences trompeuses
Fiat est redevenue rentable grâce à Marchionne. C'est un résultat à la fois inespéré, fortuit et insuffisant. Inespéré parce que le Constructeur courait vers la faillite depuis le début des années 2000. Mais Marchionne a su négocier des dossiers difficiles (GM), signer des accords avec d'autres Constructeurs et remettre l'entreprise à flot. Cependant, ce retour à une meilleure santé est en même temps fortuit, parce que les résultats obtenus sont pour une large part dus à la conjoncture, plus précisément à la forte expansion momentanée du marché brésilien, qui assure l'essentiel des bénéfices du Constructeur, et dont le retournement est affaire de semaines. Enfin, le "miracle" a été insuffisant. Non seulement parce que l'endettement de l'entreprise est impressionnant, mais aussi parce que la stratégie mise en œuvre n'a pas eu d'effet sur les faiblesses traditionnelles du Constructeur. Ainsi, alors que PSA, Renault, VW sont des entreprises fortement implantées en Europe, avec une présence significative ailleurs, Fiat Automobile n'est fortement implantée qu'en Italie et au Brésil, plus quelques cas particuliers comme la Pologne. En outre, contrairement à ses principaux concurrents européens, Fiat Automobiles est presque totalement absente des segments de marché de gamme moyenne ou haute. Enfin, Fiat ne sait toujours pas faire grandir ses deux marques marginales, Lancia et Alfa Romeo. En clair : pour s'en sortir définitivement, c'est d'abord en Europe que Fiat devait progresser, bien plus fortement qu'elle ne l'a fait, grâce à ses nouveaux modèles, bas de gamme bien sûr, mais aussi de gamme moyenne, et cela n'a pas marché.
Perspectives : une stratégie au hasard ?
Marchionne, en excellent manager qu'il est, savait à quoi s'en tenir. Il annonçait en effet, fin 2006 les objectifs suivants pour 2010 : 35% de parts de marché en Italie et 11% en Europe. Soit, au bout du compte, environ 450 000 ventes de plus en Europe en 2010, effet crise non pris en compte évidemment. Or, 450 000 voitures de plus en Europe auraient signifié des encaissements tels que toute crise de trésorerie aurait pu être évitée. En prime, une rentabilité enfin libérée de l'hypothèque brésilienne aurait consenti au Constructeur une planification plus efficace et porteuse de progrès ultérieurs. L'objectif était donc le bon, mais dès 2007 il était évident qu'il était hors de portée. Malgré un effort considérable de renouvellement de la gamme, Fiat Automobiles ne progressait que très marginalement en Europe, Italie incluse, avec une brillante exception en France. Il fallait donc changer de stratégie au plus tôt, et la crise fournit au Constructeur l'occasion de le faire. Et il le fit : Marchionne annonça, fin 2008, qu'il n'y aurait plus que 6 grands groupes dans le monde deux ans après, et que Fiat devait trouver un partenaire, éventuellement majoritaire, qui lui permette de produire 6 000 000 de véhicules par an, seuil selon lui indispensable pour survivre. D'où l'affaire Chrysler, et d'autres développements attendus. Que dire ? La disparition d'un Constructeur européen est effectivement une hypothèse vraisemblable, mais pourquoi diable un Concurrent irait-il s'allier avec le plus vulnérable d'entre eux, si ce n'est pour l'étouffer ?
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