Les hommes avant tout
...les pays du G7, le Canada peut se vanter d'avoir la main d'œuvre la plus "éduquée". En tout cas, une main d'œuvre en phase avec l'économie. Encore un atout de l'Ontario dont plus de 40 % des ouvriers ont fait des études postsecondaires contre 27 % aux Etats-Unis. Et cet atout, la province le cultive en mettant les moyens et les structures pour que ses 20 universités soient à la pointe et bénéficient de larges passerelles avec le secteur privé. Des entreprises d'ailleurs largement incitées par le gouvernement à lancer de larges programmes de recherche avec les universités. En effet, le gouvernement de Toronto a fait de l'investissement en R&D son cheval de bataille afin que l'Ontario demeure aux avant-postes. "Nous supportons ainsi cette puissante et productive industrie automobile ontarienne en investissant sur l'innovation et les compétences", avait lancé Dalton Mc Guinty, le Premier ministre de la province lors de l'annonce de ce plan quinquennal. "Notre but est d'avoir la meilleure, la plus compétente et la plus productive main d'œuvre d'Amérique du Nord". Le message de la province est clair, rester leader, et la somme allouée pour y parvenir est conséquente : 500 millions de dollars canadiens. Les nouvelles technologies, l'innovation et la recherche, l'amélioration des infrastructures, les technologies visant à préserver l'énergie et l'environnement, autant de domaines que ce plan veut soutenir. Investir en Ontario devient donc de plus en plus intéressant, car en plus des coûts de production plus faibles (en moyenne 9 % de moins qu'aux Etats-Unis), le coût réel pour 100 dollars canadiens investis en R&D n'est que de 42 dollars grâce aux aides de l'Etat ontarien. Une manne pour les entreprises mais surtout pour les universités qui travaillent de concert avec ces dernières qui ont ainsi les moyens de financer de nombreux programmes. Afin de mieux comprendre ce travail reposant sur le triptyque Etat-entreprises-universités, le Professeur Mamdouh Shoukri, vice-président du département R&D de l'Université de McMaster, revient, avec des chiffres clés, sur le fonctionnement de la recherche au Canada et en Ontario.
Les universités font du business
Une fois encore, si l'on compare le Canada aux autres puissances du G7 (Etats-Unis, Angleterre, Italie, Japon, Allemagne et France), les universités canadiennes représentent 33 % des fonds investis en R&D contre 22 % en moyenne dans les autres pays les plus riches de la planète. De plus, la part des fonds privés de la recherche canadienne est, encore une fois, la plus importante (9,3 % contre 4,9 % aux Etats-Unis et 2,6 % au Japon). La recherche publique demeure malgré tout très importante et tant l'Etat Fédéral que la province ont développé des structures pour soutenir et aiguillonner la recherche. Ottawa va ainsi verser plus de 1,8 milliard de dollars CAD via divers conseils et le CFI (Canada Foundation for Innovation) lui, a distribué plus de 3 milliards CAD. De plus, l'Etat Fédéral a également mis sur pieds un réseau de centres d'excellence, comme Auto21 (voir encadré), qu'il finance à hauteur de 77 millions de dollars CAD par an. Cela peut paraître peu pour faire vivre et travailler 20 centres, mais ces derniers, relais entre les universités et le monde économique, bouclent leur budget avec les industriels. Au niveau provincial, on retrouve une organisation quasi semblable. A la différence qu'à ce niveau, le fond de recherche de l'Ontario (ORF) finance seulement un tiers du projet qui doit compter un volet financé par le secteur privé pour un autre tiers et enfin, le dernier tiers, est à la charge de l'université. Car les universités ont leurs propres moyens, elles font du business. En effet, les forts liens avec le secteur privé et le nombre de projets menés à bien font naître de nombreuses lignes de crédits. Un exemple de ressources avec la gestion financière de la propriété intellectuelle qui peut faire entrer de l'argent suite à la vente de licence ou au paiement par l'entreprise de la totalité des frais de recherche afin de détenir la propriété intellectuelle du produit créé. Dans les deux cas, l'université est gagnante.
Devenir numéro un sur l'hydrogène et la pile à combustible
Waterloo. Il ne s'agit pas d'une débâcle mais d'une réussite de l'autre côté de l'Atlantique. En effet, l'Université de Waterloo que nous avons pu visiter peut se targuer d'être parmi les leaders dans de nombreux domaines de recherche. Elle s'est même engagée dans une lutte de laboratoire et de prestige, contre les universités de Windsor et de Montréal, pour devenir l'université Numéro 1 sur l'hydrogène. D'ailleurs la pile à combustible ne semble plus avoir de secrets pour les étudiants qui participent au ChallengeX avec un Chevrolet Equinox motorisé par une pile à combustible de la société Hydrogénics (voir encadré). Cependant, l'avenir de l'automobile n'est pas seulement concentré autour de cette technologie et le champ d'action de l'Université est énorme. Ainsi, elle dispose d'un centre de recherche automobile (Wat CAR, Waterloo Centre for Automotive research) qui s'accapare plus de 15 % du budget de recherche de la faculté. Dans cette unité, le WatCAMM (Waterloo Centre for Automotive Materials and Manufacturing) planche, grâce à un budget de 15 millions de dollars et 50 chercheurs, sur les moyens de rendre les véhicules plus légers sans toutefois nuire aux prestations de sécurité notamment. Energies alternatives, design, sécurité, autant de secteurs de recherches où l'on retrouve des partenaires de premier plan tels DaimlerChrysler, GM ou Ford. Des entreprises qui, en plus de pouvoir utiliser l'un des 50 à 75 projets menés à bien dans les cinq prochaines années, pourront également embaucher de jeunes ingénieurs très compétents dont l'intégration ne posera aucun problème. D'ailleurs depuis 1987, date d'ouverture de la faculté, pas moins de 10 000 étudiants de Waterloo sont passés dans le privé.
C.J.
ZOOML'excellence au cœur d'Auto21 Auto21 est un réseau de centre d'excellence qui regroupe pas moins de 230 chercheurs de 37 universités différentes et plus de 110 partenaires tant privés que gouvernementaux. Basé à l'Université de Windsor, Auto21 dispose d'un budget quinquennal de 34 millions de dollars, dont 33 proviennent d'Ottawa et 11 de partenaires industriels. Ce centre d'excellence travaille sur 6 axes : la protection des occupants, la diminution des émissions, le perfectionnement de nouveaux matériaux et des process de fabrication, le design et enfin les systèmes et capteurs intelligents. Chacun de ces secteurs est placé sous la responsabilité d'un chef de projet. Pour les étudiants, jeunes chercheurs, c'est également l'occasion de travailler et côtoyer les meilleurs chercheurs de chaque domaine. Pour les entreprises, Auto21 constitue un vivier d'ingénieur mais aussi de projets commercialisables. |
Sur le même sujet
Laisser un commentaire
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.