Le coup de froid attendra pour Chéreau

"Le carnet de commandes est bien rempli." se réjouit Damien Destremau, directeur général de Chéreau. En 2021, le spécialiste du véhicule frigorifique s’est rapproché de son niveau d’avant-crise en franchissant de nouveau la barre des 200 millions d'euros de chiffres d’affaires (203), contre 190 millions en 2020. La courbe remonte grâce à un fait majeur qu'explique Damien Destremau : "nous sommes allés chercher beaucoup de ventes en Europe". En effet, quand 43 % des ventes de Chéreau se faisaient hors de France en 2019 et 2020, la poids dans le bilan s’est élevé à 49 % l’an dernier. Pour une part de marché stable à 15 % sur les ventes de semi-remorques (France, Espagne, Allemagne, Pays-Bas, Belgique et Portugal).

Près de 50 % de part de marché en France

La pénétration pour la seule France s’élève à 49 %. C’est plus qu’en 2019 (48 %) mais moins qu’en 2020 (51 %), quand Chéreau avait moins fermé ses usines que ses concurrents. 3 400 véhicules avaient alors été produits. Ce chiffre est remonté à 3 600 l’an dernier, ne retrouvant donc pas son niveau d’avant-crise (3 900).

Pour rappel, Chéreau est intégré à The Reefer Group depuis 2016, lequel compte aussi l’espagnol SOR. La société normande, avec ses 203 millions de chiffre d’affaires et près de 1 000 collaborateurs en 2021, reste la locomotive du groupe, qui compte au total environ 1 300 salariés et a réalisé un chiffre d’affaires de 271 millions d’euros l’an dernier. The Reefer Group, qui a changé d’actionnaire début 2021 avec l'entrée au capital de Truck & Trailer Invest. Selon Damien Destremau, le groupe ne s’interdit pas de s’intéresser à des activités en dehors du véhicule frigorifique, si des opportunités venaient à se présenter. "Ce ne sera pas dans les prochains mois compte tenu de la situation, mais nos ambitions de croissances sont claires et affichées", affirme le directeur général.

Le groupe n'exclut pas, à terme, d'investir en dehors du véhicule frigorifique.

Pour 2022, The Reefer Group prévoit de grandir d’une centaine de collaborateurs et d’atteindre les 6 000 véhicules produits (Chéreau et SOR confondus), et surtout de dépasser pour la première fois les 300 millions d’euros de chiffre d’affaires, atteignant même les 324 millions d’euros. "Ce chiffre élevé s'explique par la forte hausse des prix", justifie Damien Destremau.

Une hausse des coûts assumée

Sur ce sujet, le fabricant se veut totalement transparent. "Pour le même semi-remorque, il faut compter entre 8 000 et 9 000 euros de plus aujourd’hui par rapport à février 2021", note Damien Destremau. Chéreau a procédé à quatre hausses de tarifs depuis un an. La première est intervenue en mars 2021, justifiée par les hausses de coûts des matières premières et les débuts des difficultés d’approvisionnement. "Ensuite, tout s’est accéléré avec la hausse du coût de la résine, de 1,50 à 3 euros le kilo à la fin du printemps 2021", se souvient le directeur général.

Les autres matériaux ont également subi le contexte, et l’entreprise normande a dû de nouveau augmenter ses tarifs en août, octobre puis décembre. "Nous ne pouvons pas lutter contre ces hausses, poursuit Damien Destremau. La matière première représente 65 % de notre coût de revient." Et, si la solidité du groupe devrait lui permettre de s’en sortir, il s’attend à une décélération des prises de commandes, voir l’annulation de certaines, dans les mois à venir. En dépit de ces difficultés, le spécialiste du véhicule frigorifique a augmenté les salaires de ses ouvriers de 6 à 8 % en septembre dernier, et ceux de ses cadres d’environ 2 %. Et continue d'investir dans ses outils de production.

Des solutions plus respectueuses de l’environnement

"Malgré le contexte, il faut acter la transition énergétique", martèle Damien Destremau. Chéreau va ainsi poursuivre son développement produits axé sur quatre thématiques : "Mieux préserver, mieux consommer, mieux protéger et mieux exploiter." En parallèle du développement de l’électrique, le fabricant propose des solutions pour rendre les poids lourds moins énergivores, avec notamment son isolation VIP maison, brevetée en 2019. Une quinzaine de véhicules devraient être produits en 2022 avec cette isolation VIP. L’objectif est d’atteindre les 1 000 unités d’ici 2027, soit près du quart de la production de Chéreau. "Les client sont plus sensibles aujourd’hui, estime Damien Destremau. L’option est à 6 000 euros pour un retour sur investissement estimé à trois ans pour le client. Des estimations faites quand le prix du diesel était à 1,20 euros le litre. On espère baisser le coût à 4 500 euros avec la production en série."

Le parc démo de Chéreau permet de tester les solutions nouvelles énergies.

Côté nouvelles énergies, Chéreau ne table pas sur une solution unique mais sur une adaptation aux différents types d’usage. L’entreprise normande mise sur les batteries rechargeables sur secteur, les essieux à récupération d’énergie, les panneaux solaires et les piles à combustible hydrogène. Des essais sont en cours avant l'obtention des homologations.

"Ces sujets énergétiques, j’y crois vraiment. Ce n’est pas une contrainte mais un plaisir de se pencher dessus. Avoir une vraie approche RSE est aussi bon pour le business", conclut Damien Destremau, qui espère aussi que les pouvoirs publics accompagneront plus le poids lourd, qu’ils ont "oublié" dans cette transition énergétique. Chéreau dévoilera son deuxième rapport RSE le 11 juin prochain.