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Constructeurs

Histoire d’acronymes sauveurs de vie

Publié le 17 septembre 2004

Par Christophe Jaussaud
6 min de lecture
L'ABS vient de souffler ses 25 bougies et un taux d'équipement de 100 % en Europe. L'ESP, lui, n'a que 10 ans et encore de larges perspectives de développement. Mais fera-t-il aussi bien ? L'information du grand public et la formation des professionnels semblent être la clé de la réussite. L'ABS...
L'ABS vient de souffler ses 25 bougies et un taux d'équipement de 100 % en Europe. L'ESP, lui, n'a que 10 ans et encore de larges perspectives de développement. Mais fera-t-il aussi bien ? L'information du grand public et la formation des professionnels semblent être la clé de la réussite. L'ABS...

...a fêté ses 25 ans en 2003. Un quart de siècle qui aura suffi pour faire de cet équipement de sécurité un incontournable. En effet, depuis 1978, l'équipementier Bosch en a écoulé plus de 100 millions. Cette première génération d'ABS, baptisée "ABS 2" par l'équipementier allemand, pesait alors 6,3 kg et coûtait environ 1 500 euros. Depuis, le nouveau-né a grandi et a atteint la maturité pour en être à la 4e génération (ABS 8), ne peser plus que 1,6 kg et se vendre au prix d'un équipement standard. Selon Anton de Coster, formateur liaisons au sol chez Continental Teves, "le prix d'un ABS aujourd'hui représente 10 à 20 % de celui de la première génération". Un phénomène explicable par la quantité produite (Continental Teves fabrique 45 000 systèmes ABS/ESP et 163 000 capteurs par jour), mais aussi par la technique. En effet, la première génération d'ABS comptait, en plus des particularités du système comme les capteurs, un maître-cylindre et un servofrein spécifiques alors qu'aujourd'hui, l'ensemble de l'ABS utilise un système de freinage classique. Une voie supplémentaire vers la démocratisation. Les limousines n'ont plus depuis longtemps l'exclusivité de cet équipement de sécurité. Des 0,02 % du marché en 1978, l'ABS sera en 2004 sur 100 % des véhicules vendus en Europe de l'Ouest. En effet, les constructeurs membres de l'Acea se sont engagés à en équiper tous leurs véhicules commercialisés à partir du 1er juillet dernier.

100 % des voitures en Europe de l'Ouest équipées de l'ABS

Après avoir végété pendant presque dix ans, avec un taux de pénétration du marché qui ne dépassait pas 0,6 % en 1988, les courbes de ventes se sont envolées après cette date. Un effet prix notamment lié à la concurrence entre les équipementiers explique en partie cette situation. Si Bosch demeure le leader en Europe, voire dans le monde, il se bat sans cesse avec Continental Teves et Lucas TRW, les deux autres acteurs majeurs de ce marché à l'échelle mondiale, et seul l'équipementier asiatique Advics joue les trouble-fête dans sa région d'origine. En Europe, le rapport de forces est différent, notamment sur l'ESP dont les deux équipementiers allemands, Bosch et Continental Teves, se partagent à part égale le marché, à 49 % chacun. Mais l'ABS n'a été que la première étape d'une évolution vers plus de sécurité. Dès 1986, à l'antiblocage des roues est venu s'ajouter l'antipatinage (ASR) puis, en 1995, l'ESP est apparu chez Mercedes, regroupant les fonctions des précédents systèmes plus une surveillance de la trajectoire. "L'ESP est une évolution logique de l'ABS, souligne Anton de Coster. En plus du soft, il faut compter 4 valves supplémentaires dans le boîtier hydraulique et 4 capteurs de plus." Si cela apparaît relativement simple sur le papier, dans les faits, cela ne s'est pas fait en un jour. Hans-Joachim Schëpf, aujourd'hui Executive Vice-President of Mercedes Car Group Engineering, faisait partie de la pléiade d'ingénieurs travaillant sur le sujet et l'ESP reste encore aujourd'hui l'innovation dont il est le plus fier. "Au départ, Mercedes et Bosch travaillaient chacun de leur côté sur des pistes techniques légèrement différentes", se souvient le responsable de DaimlerChrysler, rencontré durant la présentation du facelift de la Classe C, "puis nous avons finalement mis notre travail en commun et finalisé ce projet. Nous avions pris le pari avec la direction de Mercedes-Benz de l'époque de le commercialiser sur la Classe S en 1995 !"

L'ESP arrivera-t-il à 100 % ?

Si, comme pour l'ABS, les grosses berlines étaient le passage obligé d'une telle technologie, un événement va accélérer les choses. Le 21 octobre 1997, durant les essais internationaux de la nouvelle Mercedes Classe A, un test de l'élan a bien failli être fatal à la baby-benz et à nombre de ses fournisseurs. Le constructeur a choisi de corriger le tir en intégrant de série sur toute la gamme l'ESP qu'il avait développé conjointement avec Bosch. Depuis, la croissance ne faiblit pas : aujourd'hui, l'ESP est monté en série sur 40 % des véhicules disponibles en 2003 sur le marché français. Toutefois, va-t-il connaître le même développement que l'ABS ? Sur les dix dernières années, l'ESP a connu une forte croissance, puisqu'il a atteint la part que l'ABS avait obtenue après vingt ans d'existence ; c'est donc un signe encourageant. Mais, si comme l'ABS, il atteint des niveaux de prix attractifs (en moyenne 500 euros en option pour le client final), les constructeurs l'utilisent dans de nombreux cas avec une approche marketing. On entend souvent dire lors des présentations : "L'ESP sera disponible sur ce nouveau modèle, mais il ne sera pas vraiment utile car la voiture a été développée avec une telle rigueur qu'elle n'en aura pas besoin." Certains disent vrai… De plus, après une première génération de véhicules équipés de l'ESP, les constructeurs n'envisagent plus cet élément de sécurité de la même manière. Bien souvent, ce système électronique était indéconnectable et très présent dans la conduite, parfois même trop, alors qu'aujourd'hui il devient déconnectable pour plus de liberté et de plaisir, notamment sur les voitures sportives. A l'opposé, les petites voitures peu puissantes sont aujourd'hui "privées" d'ESP. Les constructeurs font des choix et, chez nombre d'entre eux, l'ESP n'a droit de cité qu'au-delà de 100 ch. Ce n'est toutefois pas un cas isolé puisqu'il en va de même pour le filtre à particules avec la variable du poids en plus. Mais pour Harald Frank, directeur marketing ESP Bosch France, "notre mission est de faire accroître le taux d'équipement de l'ESP car, au-delà de considérations financières et marketing, il sauve des vies ! L'ESP est en quelques sortes un ange gardien". Selon une étude réalisée par Mercedes, qui équipe tous ses véhicules de l'ESP depuis 1999, cet élément de sécurité a fait baisser de 30 % le nombre d'accidents parmi les possesseurs de voitures étoilées.

L'ESPérience

L'autre axe de travail mis en place par le directeur marketing ESP de Bosch France est d'informer tant le grand public que les professionnels de l'existence de tel produit et de son efficacité. "Selon une étude réalisée par Ipsos pour Bosch, indique Harald Frank, à la question "Pourriez-vous nous citer des systèmes de sécurité active présents sur le marché ?", 53 % des personnes ont cité l'ABS et seulement 12 % connaissent l'ESP ! Le déficit d'image est donc important", conclut-il. L'équipementier allemand a donc entrepris un vaste plan de communication qui passe notamment par les concessionnaires avec "l'ESPérience" : "Nous allons proposer aux marques et à leur réseau de l'information sur ces produits, mais aussi de la formation pour faire découvrir combien ces systèmes sont efficaces." Toutefois, malgré toujours plus de performance et un taux d'équipement grandissant, il ne faut pas pour autant déresponsabiliser le conducteur. Tous ces systèmes s'inclinent devant les lois de physique et, pour l'heure, un ESP ne choisit pas la bonne trajectoire tout seul et l'ABS n'apprend pas à freiner.

Christophe Jaussaud

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