Véhicule électrique : la France décroche quand l'Europe accélère
Contrairement à ses voisins européens, les immatriculations de véhicules à batterie en France s’essoufflent au premier semestre 2025. Au regard des chiffres de l’ACEA, au sein de l’Europe élargie – qui comprend l’Union européenne, la Grande-Bretagne, l’Islande, la Norvège et la Suisse – les véhicules électriques reprennent des couleurs avec une croissance de leurs immatriculations de 24,9 % et près de 1,2 million d’unités mises à la route de janvier à juin 2025. Les voitures électriques ont ainsi représenté 17,5 % des ventes de véhicules neufs en Europe.
Presque la totalité des pays du Vieux Continent voient ainsi leurs immatriculations de véhicules à batterie afficher des croissances à deux chiffres, à l'exception de la France, où les livraisons reculent de 6,4 %. Ainsi, 148 332 véhicules électriques ont été immatriculés au premier semestre 2025, contre 158 402 unités à la même période en 2024.
Mais il faut relativiser ce ralentissement puisque l’Hexagone reste le troisième pays à immatriculer le plus de véhicules électriques. La France représente donc 16,6 % des ventes de VE en Europe au premier semestre 2025, derrière l’Allemagne et le Royaume-Uni. Ces deux derniers pays ont respectivement une part de 26,1 % et 18,9 % sur le total de véhicules neufs électriques vendus. De plus, la part des VE dans le marché français s’élève à 17,6 % à fin juin 2025, contre 16,9 % sur la même période en 2024.
Rappelons que le leasing social a permis de booster les immatriculations françaises de VE, permettant à l'Hexagone d'afficher une croissance de 14,8 % de janvier à juin 2024. Ainsi, la deuxième édition du leasing social qui doit débuter à partir du 30 septembre 2025 devrait permettre d’impulser une nouvelle dynamique au second semestre 2025.
Un réveil des ventes de véhicules électriques dans certains pays
En Europe, certains pays connaissent un "réveil" de leurs ventes de véhicules à batterie au cours du premier semestre 2025, avec des immatriculations qui bondissent de manière spectaculaire, à l’image de l’Espagne, dont les livraisons de VE croissent de 83,9 %. Il s’agit là de l’évolution la plus remarquable, passant de 25 146 modèles à batterie vendus de janvier à juin 2024 à 46 235 unités sur la même période en 2025. Un dynamisme dû à la prolongation jusqu’à la fin du mois de juillet 2025 du plan d’aide baptisé Move III, permettant aux Espagnols de bénéficier de subventions pour l’achat d’un véhicule "zéro émission".
À la traîne en matière d’électrification, l’Italie perçoit aussi une évolution positive des ventes de VE. En effet, au sein de la Grande Botte, les immatriculations de véhicules à batterie se sont hissées de 28 % pour atteindre les 44 726 unités écoulées. Pour observer d’autres croissances impressionnantes, il faut regarder à l’est de l’Europe, des pays où l’électrification peine aussi à s’imposer. Ainsi, en Pologne, en République tchèque, en Slovaquie et Slovénie, les livraisons de véhicules électriques ont bondi respectivement de 60,9 %, 66,7 %, 62,9 % et 63,7 %.
En revanche, sur la trentaine de pays analysés par l’ACEA, six d'entre eux - Allemagne, Royaume-Uni, France, Norvège, Pays-Bas, Belgique – représentent 70 % des véhicules électriques vendus en Europe au premier semestre. En réunissant les chiffres des pays qui ont connu un boom des ventes de VE entre janvier et juin 2025 – Espagne, Italie, Pologne, République tchèque, Slovaquie, Slovénie – ces derniers ne pèsent que 9,8 % des immatriculations de voitures électriques.
"Nous avons observé que des pays habitués à immatriculer peu de véhicules à batterie jusqu’à maintenant, ont connu des taux de croissance spectaculaires au cours de cette période, même si les volumes enregistrés restent peu importants, constate le cabinet Inovev dans son étude publiée le 4 août 2025. Cela peut signifier que certains pays pauvres en BEV pourraient rattraper une partie de leur retard au cours des prochaines années, mais sans que l’on soit sûr qu’ils seront au même niveau ou proches du niveau des pays les plus demandeurs en BEV."
Immatriculations de véhicules électriques neufs | ||||
Janvier-Juin 2025 | Janvier-Juin 2024 | Évolution 24-25 | Part des ventes VE | |
Autriche | 31 534 | 22 178 | 42,2 % | 22 % |
Belgique | 76 980 | 64 404 | 19,5 % | 32,8 % |
Bulgarie | 1 135 | 863 | 31,5 % | 4,7 % |
Croatie | 396 | 792 | – 50 % | 0,9 % |
Chypre | 735 | 496 | 48,2 % | 8,9 % |
République Tchèque | 6 910 | 4 146 | 66,7 % | 5,6 % |
Danemark | 57 178 | 38 917 | 46,9 % | 63,8 % |
Estonie | 444 | 649 | – 31,6 % | 7,2 % |
Finlande | 12 726 | 10 569 | 20,4 % | 34,2 % |
France | 148 332 | 158 402 | – 6,4 % | 17,6 % |
Allemagne | 248 726 | 184 125 | 35,1 % | 17,7 % |
Grèce | 4 265 | 3 341 | 27,7 % | 5,5 % |
Hongrie | 5 219 | 4 653 | 12,2 % | 7,9 % |
Irlande | 13 629 | 10 737 | 26,9 % | 16,7 % |
Italie | 44 726 | 34 939 | 28 % | 5,2 % |
Lettonie | 743 | 586 | 26,8 % | 6,6 % |
Lituanie | 1 205 | 851 | 41,6 % | 5,8 % |
Luxembourg | 6 559 | 6 435 | 1,9 % | 26 % |
Malte | 805 | 1 239 | – 35 % | 25,7 % |
Pays-Bas | 6 394 | 6 028 | 6,1 % | 35 % |
Pologne | 14 256 | 8 861 | 60,9 % | 5 % |
Portugal | 25 017 | 19 214 | 30,2 % | 20,2 % |
Roumanie | 3 201 | 5 743 | – 44,3 % | 4,9 % |
Slovaquie | 2 008 | 1 233 | 62,9 % | 4,4 % |
Slovénie | 2 700 | 1 649 | 63,7 % | 9,1 % |
Espagne | 46 235 | 25 146 | 83,9 % | 7,6 % |
Suède | 49 667 | 42 003 | 18,2 % | 35,2 % |
Islande | 2 283 | 957 | 138,6 % | 29 % |
Norvège | 70 748 | 51 418 | 37,6 % | 94 % |
Suisse | 23 203 | 21 387 | 8,5 % | 20,5 % |
Royaume-Uni | 224 841 | 167 096 | 34,6 % | 21,6 % |
Total | 1 190 346 | 953 309 | 24,9 % | 17,5 % |
Source : ACEA
L’importance de l’écart fiscal entre thermique et électrique
Dans une note d’analyse, Pascal Canfin observe que la part moyenne des immatriculations de VE de 15,2 %, "masque de très fortes disparités en Europe". "Certains pays, comme le Danemark, les Pays-Bas, la Suède ou la Belgique, ont déjà largement dépassé les objectifs réglementaires, avec des parts de marché allant jusqu'à 66 % au Danemark, analyse-t-il. À l’inverse, d’autres, comme l’Espagne, l’Italie ou encore la Pologne et la Roumanie, sont très loin des objectifs à atteindre, avec moins de 6 % de parts de marché."
Selon le parlementaire européen, l’un des facteurs déterminants à l’adoption de VE réside dans l’écart fiscal entre la possession d’un véhicule thermique et électrique. Par exemple, acheter et posséder un SUV électrique au Danemark coûte 45 000 euros moins cher qu’un SUV thermique. Le pays a connu une progression de 46,9 % de ses immatriculations de VE, soit 57 178 unités écoulées au premier semestre 2025, représentant une part de marché de 63,8 %. En France, en Finlande ou en Pologne, la différence s’élève autour de 6 000 euros, tandis qu’en Italie et en Espagne, la différence est respectivement de 3 000 euros et 4 000 euros.
En ce qui concerne les subventions à l’achat, Pascal Canfin estime qu’elles ne sont pas suffisantes si "elles ne sont pas combinées avec d’autres mesures fiscales". En effet, l’Espagne, la Pologne et la Roumanie ont des subventions, ce qui ne les empêche pas de se retrouver parmi les pays les plus en retard dans l’électrification. Selon l’analyste, il ne faut pas se focaliser uniquement sur l’aspect technologique du véhicule électrique, mais aussi sur les politiques d’accompagnement, pas suffisamment au centre du débat. Un aspect que l'eurodéputé souhaite prendre en compte "dans l’évaluation que la Commission européenne fera en 2025, avant la proposition législative portant sur l'éventuelle révision des standards de CO2", assure-t-il.
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