Thierry Lespiaucq, directeur Volkswagen France
Journal de l'Automobile. Volkswagen a affiché une progression de 1,3 % en 2008, êtes-vous satisfait ?
Thierry Lespiaucq. Sur un marché qui régresse, nous sommes satisfaits de notre performance. D'autant que durant l'année 2008, le marché n'était pas forcément favorable au mix habituel de Volkswagen, davantage centré sur le haut de gamme. Nous avons réussi à suivre cette évolution vers les petits véhicules. La Polo et la Golf sont les deux modèles qui nous ont permis de progresser. La Polo, avec près de 42 000 unités, enregistre un volume que l'on avait plus atteint depuis des années. Elle devient même la voiture importée la plus vendue en France, devant la Golf. Concernant le reste de la gamme, les résultats sont en demi-teinte si l'on s'arrête au volume, mais de nombreux modèles, comme la Passat associée à la CC, le Tiguan ou l'Eos, demeurent les premiers importés de leur segment. L'autre source de satisfaction c'est la progression de 11 % sur les ventes à particuliers alors que celle du marché se limite à 4 %. Au final, Volkswagen affiche une pénétration de plus de 7 %.
JA. Depuis la mise en place de la prime à la casse, début décembre, avez-vous ressenti un impact sur votre niveau de commande comme l'ont déclaré Renault et Citroën ?
tl. Nous n'avons pas communiqué sur ce sujet en décembre, mais nous nous attendons effectivement à un tel effet. Néanmoins, je pense qu'il y aura tout de même un essoufflement sur ces petits véhicules qui ont tiré le marché en 2008. En effet, les bonus pouvaient concerner tous les acheteurs, la prime à la casse va couvrir que 10 à 15 % des ventes. Tout cela devrait nous conduire vers un marché proche de 1,9 million d'unités. En effet, avant la mise en place des aides gouvernementales, qui devrait générer environ 100 000 VN supplémentaires principalement au détriment des VO récents d'ailleurs, nous avions estimé un marché 2 009 compris entre 1,75 et 1,8 million.
JA. En 2009, vous souhaitez améliorer votre pénétration. Quels seront vos vecteurs de croissance ?
tl. La nouvelle Polo sera l'un de nos principaux vecteurs de croissance.
JA. Mais allez-vous en avoir suffisamment du fait de son remplacement en cours d'année ?
tl. Nous avons prévu d'importer sur les 7 premiers mois de l'année autant de Polo que nous pouvions le faire sur une année complète et normale. Je préfère prendre le risque d'avoir trop de voiture plutôt que de revivre la situation de 2008 où nous avons dû attendre le second semestre pour livrer des voitures vendues au premier semestre. Une situation lisible dans notre taux de pénétration qui a parfois dépassé 8 % sur la fin de l'année. Sur 2008, nous sommes à 7,05 %, sur une tendance très positive.
JA. Si cette année vous avez réussi à digérer la baisse du haut de gamme, générateur de marge, n'y a-t-il pas un risque pour votre rentabilité si cette orientation perdure ou s'accentue ?
tl. La baisse des hauts de gamme a tellement été forte que l'on peut raisonnablement penser que nous sommes arrivés à un seuil de stabilisation. Donc nous devrions retrouver un mix relativement proche de celui de l'année 2008. Ce n'est pas le plus gros danger pour cette année 2009. Le plus gros danger va venir de l'écoulement des VO récents. Et notamment ceux des segments inférieurs dont le différentiel de prix avec un VN équivalent sera très faible du fait des aides. L'écoulement des VO récents peut vite devenir un instrument d'engorgement du commerce VN.
JA. Quelles sont les solutions possibles ?
Déjà, il faut que les prix de ces VO soient correctement positionnés. Ensuite, nous avons fait le choix d'offres de crédit spécifiques aux VO récents avec par exemple un taux de 2,9 % sur 48 mois. De plus, nous allons cibler les clients qui ne peuvent bénéficier de la prime à la casse. Quant aux buy-backs, si certains vont avoir tendance à brader, nous avons décidé de les vendre, peut-être plus lentement, mais à des tarifs normaux et compréhensibles compte tenu de la conjoncture. Un vrai challenge pour 2009.
JA. Comment votre réseau a-t-il vécu l'année 2008 ? Qu'en est-il de sa rentabilité ?
tl. Cette année, nous allons davantage comparer les cash-flows que les résultats d'exploitation. Il s'agit de notre mot d'ordre compte tenu de la situation VO. Ainsi nous disons au réseau, utilisez vos résultats 2008, qui devraient par ailleurs se situer à peu près au niveau de ceux de 2007 à environ 0,9 %, pour passer des provisions afin de vous protéger pour 2009. Du fait de ces provisions, le résultat avant impôts sera forcément plus bas que l'année passée, mais je le répète, le cash-flow sera le principal indicateur. Nous allons surveiller de très près le réseau. D'ailleurs, nous venons de créer un département développement réseau qui compte notamment une cellule spécifique, avec une spécialiste de la gestion, en charge d'aider les distributeurs, qui en feraient la demande, à mettre en place des plans de redressement, des plans de corrections, etc. Il faut voir cela comme un accompagnement pour une bonne gestion. Nous voulons tous sortir de la tempête sans casse.
JA. Qu'en est-il du déploiement de vos nouvelles normes ?
tl. Nous sommes d'accord pour différer les investissements si ceux-ci ne sont pas supportables où risque de mettre en difficulté l'entreprise. Cependant, sachant que beaucoup de nos partenaires ont des structures financières solides avec peu d'endettement à long terme et des ratios de fonds propres très corrects, nous leur avons rappelé que ces moments de crises pouvaient également être synonymes d'opportunités. D'ailleurs, bon nombre de nos distributeurs ont décidé de réaliser ces investissements.
JA. Il semble y avoir un consensus autour de 1,9 million immatriculations en 2009. Mais n'existe-t-il pas un risque de faire moins ?
tl. A situation équivalante à aujourd'hui, il ne devrait pas y avoir de surprise dramatique. Mais il faut rester extrêmement prudent. Deux facteurs sont à prendre en compte dans une éventuelle baisse. Premièrement, un marché difficile fait disparaître les immatriculations "bidons" qui peut engendrer une chute de 5 à 6 %, soit environ 100 000 unités. Ensuite, il y a l'impact de la demande des consommateurs. Sur ce point, la situation française est différente de celle de l'Espagne aujourd'hui ou du Japon hier. Cependant, il peut y avoir une crise de confiance brutale entraînant le marché à 1,6 million. Tout reste possible.
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