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Constructeurs

Surfusions, mésalliances et retour sur les marques

Publié le 14 octobre 2005

Par Alexandre Guillet
4 min de lecture
La gourmandise, pour ne pas dire la voracité, de DaimlerChrysler et Volkswagen se traduit aujourd'hui par une digestion difficile. Toujours est-il que les deux groupes sont de taille mondiale ce qui est loin d'être le cas de nos constructeurs nationaux.  Les certitudes...
La gourmandise, pour ne pas dire la voracité, de DaimlerChrysler et Volkswagen se traduit aujourd'hui par une digestion difficile. Toujours est-il que les deux groupes sont de taille mondiale ce qui est loin d'être le cas de nos constructeurs nationaux.  Les certitudes...

...ont tendance, ces derniers temps, à s'effriter quelque peu. Pas toutes, bien entendu, mais c'est peut-être une question de temps. Les grands choix stratégiques de la dernière décennie étaient-ils généralement entachés d'un optimisme démesuré ? Qu'il s'agisse de fusions ou de rachat de marques plus ou moins à la dérive, il semble bien qu'on soit assez déçus des résultats pour s'inquiéter de l'avenir. Restent les accords de collaboration ponctuels (par exemple, entre PSA et Toyota, ou PSA et Fiat) et les alliances (Renault-Nissan), qui ont l'air de bien fonctionner. Les constructeurs français s'en tirent donc mieux que la plupart des autres (mais n'oublions pas les succès durables de Honda, Toyota et BMW, par exemple) ; cela est-il suffisant pour assurer l'avenir ? Quelques réflexions, forcément incomplètes, peuvent aider à le comprendre.

L'automobile allemande et sa crise de croissance passagère

Les journaux expliquent les difficultés, bien réelles, de deux constructeurs qui nous avaient habitués au succès, DaimlerChrysler et Volkswagen. Ayant péché de présomption et parfois d'outrecuidance, nos deux voisins d'outre-Rhin en paient aujourd'hui les frais. On aurait tort d'en déduire qu'ils ont devant eux un déclin inéluctable. Le premier, DaimlerChrysler est victime non pas d'une stratégie erronée mais du rachat hâtif, sans doute insuffisamment préparé, d'un constructeur en difficulté. On pourrait en discuter longtemps, et revoir dans le détail les failles de "l'accord entre égaux", la germanisation du management chez Chrysler, etc. Il n'en reste pas moins que la "Welt AG" (l'entreprise mondiale) était et demeure l'intuition stratégique de la décennie : être directement présents en Europe, aux Etats Unis et en Asie n'est pas un caprice, mais quelque chose qui se situe entre opportunité de croissance fondamentale et nécessité absolue. Quant à Volkwagen, on en a tout dit. Ayant racheté, à l'instar de Ford et GM, tout ce qui était disponible sur le marché des marques défaillantes ou balbutiantes, Volkwagen n'a pas pu concentrer ses efforts sur ses marques principales, tout en continuant à demander à Volkswagen un "premium" à des acheteurs européens désormais plus attentifs à leurs deniers. Un diagnostic a été établi par le constructeur ; la thérapie est en cours. Il y a tout lieu de penser que le "come back" de Volkwagen sera d'autant plus efficace que le groupe aura su se libérer de quelques acquisitions dont la rentabilité se perd dans la nuit des temps à venir. Ce qui est certain, c'est que l'industrie automobile allemande, n'étant pas au mieux de sa forme, laisse momentanément aux autres constructeurs européens une part de marché qu'elle se réappropriera.

Fragilités françaises ?

Les deux constructeurs français ont choisi des stratégies opposées. Dans les deux cas, cependant, l'internationalisation est à l'ordre du jour : les efforts accomplis en Chine le démontrent. Il est important, en revanche, de considérer qu'en termes de rentabilité, les excellents résultats obtenus en Europe sont en quelque sorte transitoires, pour trois raisons. La première est résumée dans le paragraphe précédent ; la seconde tient à la faiblesse actuelle des constructeurs américains ; la troisième au fait que la "chasse gardée" européenne, mature et par conséquent sans grandes perspectives de croissance, n'est pas encore investie par le nouveau grand concurrent asiatique, qui prendra des parts de marché aux constructeurs nationaux. L'internationalisation accomplie par les deux constructeurs français est-elle, compte tenu du risque d'érosion de leur présence en Europe, de nature à y porter remède ? On peut l'espérer sur le long terme, mais ce n'est pas le cas actuellement. PSA et Renault sont absents des Etats-Unis et quasiment absents du Japon. Et Nissan ? On sait que l'Alliance Renault-Nissan n'est pas une fusion. Cette spécificité de l'accord, qui laisse à chacun des contractants la possibilité de préserver son autonomie décisionnelle est même, comme l'explique Stéphane Lauer dans son excellent ouvrage "Renault. Une Révolution française", une des raisons du succès de la formule. Pour faire court : PSA, c'est bien Peugeot + Citroën, tandis que l'Alliance, c'est essentiellement Renault & Nissan, sans garantie de durée si chacun n'y trouve pas son avantage. La partie n'est gagnée pour aucun des deux groupes…


Ernest Ferrari
Consultant


 

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