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Constructeurs

Mon couplet chinois

Publié le 30 septembre 2005

Par Alexandre Guillet
4 min de lecture
C'est inéluctable, les Chinois, tout comme l'ont fait les Japonais puis les Coréens, vont prendre leur place sur le marché européen. Pour contre-attaquer, peut-être faudrait-il commencer par laisser mourir les marques européennes qui ne servent à rien sauf à faire perdre de l'argent à ceux...
C'est inéluctable, les Chinois, tout comme l'ont fait les Japonais puis les Coréens, vont prendre leur place sur le marché européen. Pour contre-attaquer, peut-être faudrait-il commencer par laisser mourir les marques européennes qui ne servent à rien sauf à faire perdre de l'argent à ceux...

...qui les possèdent…


Peut-on parler encore de la Chine, alors que tout a été dit ? Sûrement, parce qu'il reste à bien réfléchir sur ce qu'il convient de faire, en Europe. On nous permettra d'intervenir sur un sujet aussi actuel. Nous ferons l'effort d'originalité qui s'impose, c'est promis, pour parler de ces nouveaux concurrents, qui ne sont pas pour autant des dragons invincibles ou des tigres invulnérables. Ils débarquent : on les a vus à Francfort. Même si les modèles qu'ils y ont exposés n'ont pas vraiment enthousiasmé les professionnels du secteur, on sent bien que cette nouvelle étape de l'approche des constructeurs chinois au marché européen entretient des inquiétudes à peine masquées par des commentaires suffisants. On a l'impression de revivre les réflexes craintifs et les velléités protectionnistes qui ont précédé l'arrivée en force des japonais. Or, il y a mieux à faire que de cultiver des craintes certes légitimes, mais stériles tout en se faisant des illusions sur les grandes murailles qui arrêteront l'envahisseur.

Supply side

On n'arrêtera personne en multipliant et en accélérant encore la sortie de nouveaux modèles toujours recommencés, dont une partie non négligeable sont des clones des modèles concurrents. On sait que le résultat de cette brillante politique est la dissémination d'un nombre constant de consommateurs sur une quantité de modèles toujours plus vaste. Les Chinois (tout comme l'ont fait les Japonais puis les Coréens) vont prendre leur place sur le marché européen : on oserait en déduire que les autres constructeurs vont devoir perdre des volumes sauf s'ils réussissent à faire croître la demande. Après cette brillante démonstration, il reste à comprendre comment on peut y parvenir, puisqu'on a tout essayé. On dit aussi, sans doute avec raison, que les Chinois savent tout faire : des véhicules les plus économiques aux plus riches, à tous les niveaux de qualité et de prix. Les constructeurs européens, s'ils ne veulent pas prendre des coups, doivent donc commencer par revoir leur copie du côté de l'offre, afin de rester leaders dans ce domaine, chez eux. Et pour faire croître la demande. La leur, pas forcément celle des constructeurs chinois. Par exemple en s'attaquant au marché latent des véhicules économiques, type Logan, sujet dont nous avons déjà parlé dans le désert. Mais aussi en faisant l'effort d'analyser le marché potentiel des non acheteurs actuels, par exemple les moins de trente ans qui ne sont pas tous des ennemis de l'automobile, mais qui en ont assez des banalités technoélectroniques. Du côté de l'offre comme dans les autres domaines, l'arrivée des constructeurs du futur plus grand marché du monde rend nécessaire un réexamen des vieilles certitudes.

Moins de marques, moins de concessions subventionnées

Pour affronter les phalanges macédoniennes, il faut être aussi efficace et mobile qu'elles ; ceci suppose qu'on abandonne les poids morts, dans tous les domaines et quoi qu'il puisse en coûter. Ainsi, il y a des marques européennes qui ne servent à rien sauf à faire perdre de l'argent à ceux qui les possèdent. Les constructeurs européens ont d'ailleurs commencé à s'en apercevoir, et certains d'entre eux essaient de s'en débarrasser. Pour une réussite, d'ailleurs tardive (Citroën pour PSA), combien d'échecs ? Avec l'arrivée des grands nouveaux concurrents, la dispersion des ressources et des efforts sur des marques sous perfusion permanente est exactement l'inverse de ce dont les constructeurs ont besoin. Mieux vaut concentrer les investissements sur ce qui marche, à une exception près : les marques "convalescentes" pourraient être utiles si on les spécialisait pour l'un des segments d'offre nouvelle évoqués ci-dessus : le meilleur exemple serait Dacia pour les véhicules économiques. Les autres, surtout les boulets achetés à prix d'or sur le marché des illusions, devraient être abandonnées au plus offrant… fut-il Chinois. Dans l'ordre d'idées des cures amaigrissantes bénéfiques, le chapitre suivant concerne les réseaux. Pour l'instant, on gaspille et on surinvestit. Il y a trop de concessions subventionnées et seule une acceptation de la concurrence permettra une sélection salutaire : les meilleurs sont ceux qui vendent plus et mieux que les autres, pas ceux qui obéissent sans broncher. Les constructeurs chinois auront besoin de réseaux. Ils savent être pragmatiques. Et nous ?


Ernest Ferrari, Consultant

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