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Constructeurs

MG Rover : La fin d’une lignée

Publié le 6 mai 2005

Par Frédéric Marty
8 min de lecture
La disparition de MG Rover signe la fin de deux marques qui ont donné naissance à plusieurs modèles charnières dans l'histoire de l'automobile. Au-delà de la mort de ces deux firmes, cet événement précipite la chute du dernier morceau de l'empire industriel automobile britannique. L'entreprise...
La disparition de MG Rover signe la fin de deux marques qui ont donné naissance à plusieurs modèles charnières dans l'histoire de l'automobile. Au-delà de la mort de ces deux firmes, cet événement précipite la chute du dernier morceau de l'empire industriel automobile britannique. L'entreprise...

...Rover est fondée en 1877 par John Kemp Starley et William Sutton, à Coventry. Starley, fils d'un jardinier de l'Essex, peut être considéré comme le père de la bicyclette moderne avec la sortie en 1885 de la Safety Bicycle, premier deux-roues équipé d'une transmission arrière. Vendu dans le monde entier et copié par toutes les manufactures contemporaines, ce vélo fera connaître la marque Rover sur plusieurs continents, à tel point que le mot bicyclette se dit Rover dans des pays comme la Pologne ou la Slovaquie. Après la mort de Starley en 1901, Harry Smyth, son successeur, décide de se tourner vers l'automobile et met au point la première automobile Rover en 1904. En 1907, un nouveau modèle remporte le Tourist Trophy sur l'île de Man. Les années 1910 voient l'arrivée de modèles comme la 2,3 litres 12 chevaux qui remporte un bon succès commercial et la construction d'une nouvelle usine à Birmingham. Les années vingt sont synonymes de montée en gamme pour le constructeur britannique avec l'apparition de ses premiers modèles 6 cylindres. En 1930, la Light Six bat le train bleu d'une poignée de minutes entre Saint-Raphaël et Calais, sur des routes qui n'ont rien en commun avec les rubans d'asphalte modernes. Cette même année voit l'arrivée à la tête de la firme de Spencer Wilks et son frère Maurice qui réorganisent la gamme pour atteindre une production de 11 000 voitures par an en 1939 après avoir ouvert deux nouvelles usines, toujours près de Birmingham.

Le nouveau départ de l'après-guerre

Après avoir produit des ailes, des moteurs d'avions et des chars pendant la guerre, la firme recentre sa production à Solihull, près de Birmingham, car son usine de Coventry a particulièrement souffert des bombardements allemands. Il faut attendre trois ans pour voir sortir les premiers modèles d'après-guerre et notamment la P3. Cette même année voit la création par Rover d'une nouvelle marque destinée à produire l'un des premiers véhicules tout-terrain de l'histoire de l'automobile : le Land Rover. En 1949 naît la P4, l'un des modèles les plus populaires de la firme anglaise, vendu à 30 000 exemplaires et présent dans toutes les rues des cités britanniques. Les années cinquante voient la sortie de la célèbre Rover P5, berline haut de gamme bénéficiant d'une carrosserie monocoque et d'un moteur 3 litres. Produite entre 1958 et 1973 à 70 000 exemplaires, elle adopte un V8 3,5 litres en 1967 pour rivaliser avec les Jaguar et les Daimler, à tel point que la reine choisit une P5 pour ses déplacements personnels. Sur les Salons automobiles, Rover brille également par ses prototypes mus par une turbine, dont une version basée sur un châssis BRM finira à la dixième place des 24 Heures du Mans en 1965 et première des voitures britanniques engagées, pilotée par un équipage de rêve associant Graham Hill au tout jeune Jackie Stewart. Au même moment, la P6 rencontre le succès commercial et devient la Rover la plus vendue avec 325 000 exemplaires fabriqués jusqu'en 1977. Les réussites de ces années soixante convainquent le groupe Leyland d'acquérir la firme pour élargir son panel de marques.

La fin de l'empire automobile britannique

Rover devient donc propriété de Leyland Motors Corporation en mars 1967, un an avant que le groupe ne fusionne avec le groupe BMC (British Motors Corporation), déjà détenteur d'Austin, Morris, MG et Jaguar. Ainsi naît en 1968 la British Leyland Motor Corporation, propriétaire de l'immense majorité des marques britanniques. Rover se positionne alors en haut de gamme avec Triumph et Jaguar jusqu'à la nationalisation du groupe en 1975, suite à de graves problèmes financiers. Ce changement n'empêche pas la sortie de la SD1 en 1976, couronnée voiture de l'année et unanimement appréciée pour ses performances et son confort. En 1977, Michael Edwardes arrive à la tête de Rover et la firme présente l'Austin Metro en 1980 avant d'inaugurer un accord de partenariat avec Honda pour construire les modèles du constructeur japonais sous licence. La Rover 200 marque la première étape de ce rapprochement, bientôt suivie par les séries 400, 600 et 800 de la décennie 80. En 1986, Sir Graham Day devient P-dg de British Leyland qu'il rebaptise Rover Group. Il organise ensuite la privatisation des marques du groupe et Rover se retrouve sous l'aile de British Aerospace. Les modèles du constructeur rencontrent un certain succès, mais deviennent vite dépassés. En 1994, l'avionneur anglais cède Rover Group à BMW qui ambitionne alors de devenir un constructeur généraliste. Après six ans d'investissements divers sans amélioration de productivité pour Rover, la firme de Munich décide de céder les droits d'exploitation de MG Rover au consortium britannique Phoenix pour dix livres sterling symboliques. BMW garde dans son escarcelle la Mini et vend Land Rover à Ford. Le repreneur anglais tente de prolonger les anciens modèles Rover sous une forme actualisée en mettant en avant l'identité plus visible de MG, mais les ventes chutent et la société accumule les dettes. En juin 2004, l'annonce prématurée d'un partenariat avec le conglomérat chinois SAIC refroidit la détermination des Asiatiques et entraîne leur retrait malgré l'intervention du gouvernement de Tony Blair. L'échec de cette ultime solution sonne ainsi le glas du dernier représentant indépendant de l'industrie automobile britannique et de deux marques qui ont laissé chacune leur propre trace dans la mémoire collective.

MG : l'art du cabriolet au pays de la pluie

La naissance de MG prend ses racines aux origines de l'automobile britannique. Dans les années 10, William Morris, fondateur de la marque éponyme, possède son propre garage dans la banlieue d'Oxford où il crée sa première voiture trois ans plus tard. Face au développement de son activité de constructeur, celui-ci décide de confier la gestion des Morris Garages à Cecil Kimber en 1923. L'homme possède déjà une bonne expérience de l'automobile et a une nette préférence pour les voitures sportives. Son idée est simple : construire une carrosserie spéciale sur un châssis Morris et vendre le tout au prix de l'exclusivité. Les premières MG sortent donc des Morris Garages dès 1924. Parallèlement aux Special Sport et Super Sport à deux ou quatre places naît Old Number One, voiture personnelle de Cecil Kimber, vraie première MG sportive adoptant un moteur à soupapes en tête, spécificité rare pour l'époque et caractéristique des modèles MG pour les dix années à venir.

Des roadsters sportifs aux berlines culbutées

Dès la fin des années 20, MG s'oriente vers les roadsters à arbre à cames en tête qui feront sa réputation et son palmarès à travers de nombreuses victoires en courses. En 1935, changement de cap et de stratégie commerciale avec le retrait officiel des compétitions et la sortie de berlines munies d'un plus classique moteur six cylindres culbuté. Devenu membre du groupe Nuffield regroupant Morris, Riley et Wolseley, MG doit se plier à ce que l'on appelle aujourd'hui une politique de plates-formes en reprenant des éléments communs aux autres marques. De nouveaux roadsters sortent dans la deuxième moitié des années 30, mais sans les motorisations à soupapes en tête qui ont fait la renommée de la firme. Pour reconquérir la clientèle sportive et maintenir la réputation de la marque dans ce domaine, MG se tourne vers les records de vitesse et franchit successivement les 200 puis 325 km/h sur le Lac salé aux Etats-Unis, pays qui va devenir le principal marché de la firme anglaise dès l'immédiate après-guerre.

L'Amérique adopte MG

Dès 1945 naît la TC qui rencontre un vif succès aux Etats-Unis. Viendra ensuite la TD qui connaîtra la même réussite à partir de 1950. Pour profiter de cet immense marché, MG décide d'élaborer un nouveau modèle spécifiquement pensé pour ce pays. La MGA débarque donc dans les rues américaines en 1955 et va trouver 100 000 acheteurs en sept ans, devenant ainsi la MG la plus vendue de l'histoire de la marque à cette époque. L'arrivée de cette MGA a lieu dans un contexte différent pour le constructeur puisque le groupe Nuffield auquel il appartient a fusionné trois ans auparavant avec Austin pour former la BMC (British Motor Corporation) qui rachètera Rover quelques années plus tard. Les deux rivaux de l'époque, MG et Austin-Healey, se retrouvent donc sous la même bannière et sur les mêmes lignes de montage en 1961 avec la MG Midget et l'Austin Sprite, petits cabriolets jumeaux. En 1962, la firme présente la célèbre MGB, remplaçante de la MGA, commercialisée pendant dix-huit ans à un demi-million d'exemplaires. En 1973, MG et Rover se rapprochent un peu plus au sein du groupe British Leyland Motor pour la création d'une version équipée du V8 Rover de la MGB. En 1980, la fin de la MGB signe aussi la mise en sommeil de la marque MG jusqu'à l'introduction de la MG RV8 en 1992 pour les 30 ans du modèle phare de la firme. Après la reprise de MG Rover par BMW, la MGF voit le jour et figure au catalogue jusqu'à la reprise par Phoenix Venture Holdings qui ajoutera à la gamme des versions sportives des berlines Rover. Ces différentes voitures ne suffiront pas à relever les finances du dernier constructeur anglais indépendant, dernier fragment d'une industrie nationale déchue.

Frédéric Marty

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