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Constructeurs

MG Rover : entre incertitudes et interrogations

Publié le 17 décembre 2004

Par Tanguy Merrien
5 min de lecture
Le dernier constructeur britannique indépendant devrait, selon toute probabilité, signer un accord de joint-venture avec le premier constructeur chinois, la SAIC. Certains observateurs voient dans ce rapprochement le début de la fin de MG Rover, alors que d'autres se montrent plus optimistes. Alors...
Le dernier constructeur britannique indépendant devrait, selon toute probabilité, signer un accord de joint-venture avec le premier constructeur chinois, la SAIC. Certains observateurs voient dans ce rapprochement le début de la fin de MG Rover, alors que d'autres se montrent plus optimistes. Alors...

...que MG Rover devrait signer un accord d'ici quelques semaines avec Shanghai Automotive Industry Corporation (SAIC), les rumeurs vont bon train au Royaume-Uni quant à l'avenir même du dernier constructeur indépendant 100 % britannique. Selon les termes du préaccord, la SAIC injecterait un milliard de livres, soit 1,42 milliard d'euros, dans un joint-venture qui serait détenu à 70 % par le groupe chinois et à 30 % par MG Rover. D'après ce préaccord, MG Rover assemblera une partie de sa gamme en Chine dans les usines de la SAIC. Les véhicules seront vendus en Chine, mais également destinés à l'exportation. Kevin Howe, le P-dg de MG Rover, a expliqué qu'en contrepartie, son entreprise va fournir des droits d'exploitation sur les licences de MG Rover. En d'autres termes, il s'agit bien de transferts de technologies. Rob Oldaker, directeur du développement produit, a tenu à rassurer en soulignant que MG Rover poursuivra une partie de la production en Grande-Bretagne. Pour le président du constructeur, John Towers, l'avenir de MG Rover se joue en Chine. Mais nombreux sont ceux qui se montrent prudents, voir très prudents ou bien franchement pessimistes. Nick Matthews, chercheur au Warwick Manufacturing Group qui conseille les constructeurs automobiles en Grande-Bretagne, pense que "ce rapprochement est une fiction". "Longbridge est en train de fermer petit à petit depuis quatre ans, explique-t-il. La fermeture va s'accélérer et je ne pense pas que le groupe soit encore debout après le premier semestre 2005."

Préservation des emplois en Grande-Bretagne

La faiblesse fondamentale de MG Rover réside dans le niveau de ses ventes. Celles-ci sont régulièrement en baisse et ce depuis une vingtaine d'années. Sa part de marché n'est plus que de 2 % en Grande-Bretagne alors qu'elle était de 3 % sur l'ensemble du marché européen dans les années 80. "Aucun constructeur n'est parvenu à se sortir d'une situation comparable, à l'exception peut-être de Skoda, parce que Volkswagen y a mis les moyens. La SAIC est loin de disposer des moyens et du savoir-faire de Volkswagen", poursuit Nick Matthews. Cette sombre analyse n'est pas partagée par un autre expert britannique, Peter Cook, de la Nottingham Trent University. "Ce qui se passe avec les constructeurs chinois n'est pas sans rappeler ce que les Américains ont fait dans le passé en se développant en Europe, suggère-t-il. On peut très bien imaginer que MG Rover continue d'assembler des voitures de prestige et des grosses berlines en Europe, tandis que les voitures d'entrée de gamme à petits prix seraient construites en Chine." Selon un scénario catastrophe des syndicats, seules les activités de recherche et développement resteraient à Longbridge. Pour sa part, John Towers, le président du constructeur, s'est voulu rassurant quant à la préservation des emplois en Grande-Bretagne : "Personne ne promet jamais rien dans cette industrie, mais le fait que des voitures seront toujours assemblées dans notre usine de Longbridge, sans doute en plus grande quantité, est la meilleure garantie que l'on puisse donner."


Cyril André





ZOOM

Polémique autour des fonds de pension

Fait assez inhabituel pour être relevé dans le monde finalement assez feutré de l'industrie automobile, un dirigeant d'un grand constructeur a porté une attaque en règle contre d'autres dirigeants. Jim O'Donnell, directeur général de BMW Grande-Bretagne, a estimé que les dirigeants de MG Rover ont montré "le visage inacceptable du capitalisme" en constituant à leur profit un fonds de pension mirifique alors que leur firme est actuellement en difficulté. Les nouveaux dirigeants de MG Rover, après que le constructeur britannique eut été cédé au printemps 2000 par BMW à un consortium britannique pour 10 livres sterling symboliques, avaient déjà été critiqués pour avoir mis en place un fonds de retraite abondé à hauteur de 18,6 millions d'euros et exclusivement destiné aux seuls cinq principaux directeurs. Dans le même temps, le fonds de retraite des quelque 6 000 salariés du groupe demeure sous-alimenté. Leur attitude est "dégoûtante", n'a pas hésité à dénoncer Jim O'Donnell. Lors de la revente, BMW avait alimenté la trésorerie de MG Rover à hauteur de 715 millions d'euros, ce qui amène le directeur général de BMW Grande-Bretagne à expliquer que, "d'un point de vue allemand, nous voulions nous assurer que nous avions donné une chance à l'entreprise ; je ne pense pas qu'ils aient saisi cette chance". La direction du constructeur britannique n'a pas apporté de commentaires à ces déclarations.






FOCUS

Un géant potentiel

Shanghai Automotive Industry Corporation (SAIC) est devenu, au fil des rachats de marques chinoises et de joint-ventures avec des étrangers, le premier constructeur automobile chinois. Le groupe, qui peut être considéré comme un vaste conglomérat de 55 entreprises, assemble des voitures, en particulier avec Volkswagen, mais aussi des camions, des autocars, des machines agricoles et des motos. Toutes catégories confondues, la SAIC a fabriqué l'an dernier 782 000 véhicules dont 597 000 VP pour un chiffre d'affaires consolidé de 9,2 milliards d'euros. La SAIC vient de racheter 48,9 % de Ssangyong, le quatrième constructeur sud-coréen, pour environ 500 millions de dollars. Cette opération s'inscrit dans une stratégie d'acquisition à l'étranger voulue par Pékin pour les grandes entreprises chinoises. Le projet mené avec MG Rover, qui est vu de Chine comme une volonté de rachat partiel, procède de la même philosophie.

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