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Constructeurs

La liberté d’établissement, le vieux et le neuf

Publié le 11 février 2005

Par Alexandre Guillet
4 min de lecture
On ne bouleverse pas d'un seul coup des dizaines d'années d'habitudes de consommation. La bonne vieille concession monomarque qui assure l'après-vente des véhicules qu'elle vend va se maintenir un temps, parallèlement au développement de ses concurrents multimarques. Les batailles d'arrière-garde,...
On ne bouleverse pas d'un seul coup des dizaines d'années d'habitudes de consommation. La bonne vieille concession monomarque qui assure l'après-vente des véhicules qu'elle vend va se maintenir un temps, parallèlement au développement de ses concurrents multimarques. Les batailles d'arrière-garde,...

...comme celle concernant l'abolition de la clause de localisation, entretiennent les faux espoirs et les mauvaises habitudes. Les uns et les autres survivront bien au-delà du 1er octobre prochain. Il faut donc s'attendre à ce qu'une majorité de concessionnaires continuent à exercer leur activité comme si de rien n'était, à l'enseigne de la tradition, en toute quiétude. D'autres, moins nombreux, hésiteront longtemps avant d'oser exercer les droits qui sont désormais les leurs, par crainte de représailles. Enfin, une minorité se prépare à agir dans le sens de l'histoire, quand elle ne l'a pas devancée. Le vieux et le neuf vont donc vivre ensemble, sans doute pendant des années. L'une des conséquences de cette situation, qui n'a en soi rien de bien original, est qu'il est difficile pour la plupart des opérateurs de bien comprendre où se situe leur intérêt. C'est vrai pour la plupart des concessionnaires… et sans doute aussi pour les constructeurs. Mais cet "immobilisme de la majorité" est aussi une aubaine pour les autres.

Faire du neuf avec du vieux ?

Le neuf, c'est la "concession 2005", qui est caractérisée par le multimarquisme et la capacité de réagir rapidement aux attentes du marché, voire de les anticiper : c'est ce que j'ai appelé, faute de mieux, l' "agilité". Le vieux, c'est surtout le commerce monomarque, notamment dans sa version surdimensionnée (la "Très Grande Concession Monomarque"). Entre ces deux pôles, toutes les nuances sont possibles et toutes les transitions imaginables. Ceci étant, que devrait faire un distributeur monomarque en attendant le premier octobre ? Sa première réflexion devrait concerner la viabilité de son entreprise dans un environnement hyper compétitif, où une concurrence intra marque revivifiée après des années d'engourdissement viendra s'ajouter à une concurrence inter marques toujours plus aiguë. Au cas où cette viabilité ne serait pas mise en danger par une immobilisation excessive des capitaux (surinvestissement), deux lignes de développement seraient possibles et nécessaires : d'une part, un développement "territorial", à travers l'ouverture d'une ou plusieurs succursales (monomarque en un premier temps) ; d'autre part, un passage aussi rapide que possible au multimarquisme, c'est-à-dire un développement de l'activité de vente à travers un élargissement de l'offre, y compris dans l'établissement principal de l'entreprise. La réalité de chaque entreprise étant spécifique, il est impossible ici d'aller plus loin, sauf pour déconseiller tout immobilisme "en attendant de voir…". Quant aux entreprises qui ont surinvesti, la première urgence est de trouver ou libérer des capitaux, éventuellement en désinvestissant ou en aliénant une partie de leur propriété : l'argent est le nerf du commerce autant qu'il l'est de la guerre.

Défendre la tradition "usque ad mortem" ?

Deux illusions persisteront longtemps. L'une d'entre elles concerne la capacité de l'entreprise monomarque d'offrir de meilleurs services que la "concession 2005". L'autre part de la "brand policy" pour affirmer que seule la concession traditionnelle peut satisfaire les attentes du consommateur. Dans les deux cas, l'erreur est flagrante. En deux mots, car ce sujet a déjà été traité : un distributeur multimarque est en mesure d'offrir des services au moins équivalents à ceux des autres. Avec en prime le meilleur de tous les services : un choix de modèles plus vaste et un conseil plus impartial. Quant aux avantages du bon vieux "brand", ils pèsent peu par rapport aux meilleures conditions d'achat qu'un négoce multimarque peut offrir. On objectera, avec quelque raison, qu'il faut tenir compte des habitudes du consommateur. Il est exact, en effet, que la clientèle la plus traditionnelle aura du mal à s'adapter à une réalité nouvelle. C'est même pour cette raison que le vieux et le neuf coexisteront pendant quelque temps. Il peut donc être intéressant de faire un peu de commerce à l'ancienne, tout en préparant assidûment l'avenir. Comme l'ont fait ces charrons qui, tout en continuant dans leur activité traditionnelle, ont transformé leurs entreprises en carrosseries. Ils sont encore là aujourd'hui ; leurs collègues ont disparu avec les voitures à chevaux. C'est en cela que la stratégie se distingue de la fidélité aux causes perdues.

Ernest Ferrari, Consultant

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