Ford passe à la vitesse supérieure sur le VU

Avec Ford Blue (division spécialisée dans les moteurs thermiques) et Ford Model e (électriques), Ford Pro (véhicules utilitaires) est l’un des piliers de la stratégie du constructeur américain dans le monde. En 2023, cette entité a dégagé un bénéfice de trois milliards de dollars, "d’excellents résultats qui permettent de financer en partie notre développement sur l’électrique", commente Louis‑Carl Vignon, président de Ford France.

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De belles performances que l’on retrouve notamment en Europe. Sur l’utilitaire, la marque à l’ovale bleu est, en effet, leader avec une part de marché de 15 % sur ce segment très concurrentiel. "Cette pénétration a doublé depuis 2012, période pendant laquelle le constructeur avait renouvelé l’intégralité de sa gamme", explique Louis‑Carl Vignon.

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Ce succès s’appuie sur une offre plurielle, aussi bien thermique qu’électrique. Sur ce dernier point, Hans Schep, directeur général de Ford Pro Europe, reconnaît que la demande affiche "un léger fléchissement mais que la transition est engagée".

Avec l’E‑Transit, la marque détient 55 % de part de marché en Europe sur le segment des grands fourgons électriques. "Nous connaissons le point d’arrivée, mais nous ne savons pas à quelle vitesse nous allons y parvenir, poursuit‑il, en faisant allusion à la fin de la commercialisation des moteurs thermiques en 2035. C’est pourquoi nos outils de production sont très flexibles."

Des ventes aussi en croissance en France

"En France, depuis cette période, notre croissance sur l’utilitaire est constante, analyse Louis‑Carl Vignon. En 2023, nous avons réalisé notre meilleure performance avec une part de marché de 9,1 % avec de beaux résultats notamment sur le Transit 2T et le Ranger, qui est le leader incontesté sur le marché du pick‑up depuis une dizaine d’années. De son côté, le nouveau Transit Custom, qui a été élu Van de l’année, connaît actuellement un excellent démarrage."

Ford E-Transit Custom. ©Ford

Pour cette année, Ford compte donc sur le Transit Custom dont la version PHEV, unique sur le marché, arrivera courant 2024, ainsi que sur le Transit Courier qui "va nous permettre de nous développer sur le segment des petits utilitaires, marché sur lequel les acteurs français sont très présents", indique‑t‑il, sans oublier les déclinaisons VP, appelées Tourneo. Concernant le Courier, qui a gagné en volume, en qualité et qui affiche un design plus proche de celui d’un SUV, la marque compte bien s’en servir comme un outil de conquête.

Le VU va représenter 45 % à 50 % des ventes en France

"Le renouvellement de notre portfolio va nous permettre d’accroître nos volumes", souligne Louis‑Carl Vignon. En 2023, Ford a écoulé 39000 utilitaires, soit environ 40 % des transactions globales de la marque. "En 2024 et 2025, nous prévoyons que le VU représentera entre 45 et 50 % de nos ventes, poursuit‑il.

Il rappelle que "la France est le marché d’Europe le plus concurrentiel, car il dispose de trois marques nationales (Renault, Peugeot, Citroën, NDLR). Néanmoins, nous sommes la première marque importée depuis deux ans, un résultat que nous comptons bien conserver".

Le renouvellement de la gamme n’est pas le seul levier qui va permettre à Ford de progresser. "Ford a lancé depuis quelques années son entité Ford Pro, qui en plus du produit, s’appuie sur quatre autres piliers, une approche holistique qui nous a permis de toucher de nouveaux clients et de gagner des parts de marché", présente Louis‑Carl Vignon.

Des services connectés

Pour la partie service, entretien et connectivité, la marque a déployé FordLiive, un nouveau système connecté d’optimisation du temps de fonctionnement des véhicules dans les flottes. "Chaque concessionnaire a un agent Ford comme interlocuteur unique qui a pour mission de suivre et de réduire le temps d’immobilisation des véhicules de ses clients", explique le dirigeant. "En Europe, nous estimons avoir anticipé 70 000 immobilisations", ajoute de son côté Hans Schep.

Les autres piliers s’appuient les données pour optimiser la gestion de la flotte, les produits et services pour l’installation des bornes de recharge dans les parcs et les offres de financement. "Ford Pro est disponible dans les 222 concessions Ford de France, mais les 81 Transit Centers sont le cœur de notre développement dans l’utilitaire, intégrant des équipes et des services dédiés aux spécificités de ce marché", précise Louis‑Carl Vignon. Hans Schep rappelle d’ailleurs qu’au niveau européen, "50 % des utilitaires sont carrossés et/ou aménagés", un volume similaire en France.

Contribuer à la rentabilité

Cette accélération sur le véhicule utilitaire est‑elle une stratégie pour pallier la contraction de la gamme VP ? Depuis l’arrêt de la Ka, de la Fiesta et prochainement de la Focus, sans oublier la disparition de l’E85, une offre unique qui permettait à Ford de se démarquer sur le marché, les concessionnaires sont inquiets.

"On veut maintenir nos forces en VP. La disparition d’une partie de la gamme sera compensée avec l’arrivée de notre offre électrique (Explorer et e‑Puma), insiste Louis‑Carl Vignon. En parallèle, le véhicule utilitaire est un élément important pour la rentabilité de notre réseau."

Il reconnaît néanmoins qu’elle s’équilibre différemment si on la compare à celle du VP : "Sur la durée de vie du produit, l’après‑vente est une source importante de rentabilité." Plus que jamais, Ford voit en l’utilitaire une opportunité pour dégager de la profitabilité en Europe.

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L'usine de Kocaeli à la pointe de la technologie

L'usine de Kocaeli en Turquie est l'une des plus grandes usines d'utilitaires d'Europe. ©Ford

Pour mener à bien son expansion sur le marché européen, Ford dispose d’un outil industriel très important, fruit d’une collaboration avec le groupe turc Koç Holding, la plus ancienne et la plus grande compagnie de Turquie. Présent dans l’énergie, les biens de consommation, les finances et donc l’automobile, le groupe représente 7 % des exportations globales du pays.

Son origine remonte à 1928 avec la création de la première concession Ford à Ankara. Très vite, il produit des voitures, puis des camions pour le compte de Ford et en 1960, l’usine Otosan sort de terre à Istanbul. En 1997, les deux parties signent un pacte d’actionnaires dans lequel chaque entité dispose de 41 % des parts.

En 2001, le site d’Istanbul devient trop petit et la coentreprise construit l’usine de Kocaeli, située dans la région éponyme, à plus d’une heure de route au sud d’Istanbul. Y sont assemblées aujourd’hui toutes les déclinaisons de la famille Transit/Tourneo Custom et Transit 2T, ainsi que dans un futur proche, la nouvelle génération du Volkwagen Transporter.

Grâce à un port intégré, l’usine exporte la quasi‑totalité de sa production dans 91 pays du monde, en Europe, dans les pays du pourtour méditerranéen et en Océanie. De leur côté, les "petits" utilitaires, Transit/Tourneo Courier et Connect (tout comme le Puma), sont produits en Roumanie, à Craiova, une usine rachetée par Ford Otosan à Ford Motor Company en 2022.

Le site turc, que nous avons pu visiter, regroupe en fait deux usines, séparées par un fleuve. Très fortement automatisée, présentée comme "l’usine du futur" par son directeur Güven Özyurt, Kocaeli produit 320 000 véhicules et compte augmenter sa cadence d’environ 150 000 unités dans les années à venir.

L'usine produit la gamme Transit/Tourneo et des Transit 2T. ©Ford

"Au total, les sites de Kocaeli et de Craiova vont voir leur capacité de production grimper à 900 000 unités en 2025", présente Güven Özyurt. Outre les nombreuses carrosseries, sur une même ligne d’assemblage, sont montés les véhicules thermiques, hybrides rechargeables ou électriques, "un dispositif très complexe à mettre en œuvre", rappelle le directeur de l’usine.

"Tout a été conçu pour que nous soyons les plus souples possible afin que nous puissions nous adapter très rapidement à la demande concernant les énergies (thermique, hybride, électrique)", indique Hans Schep, directeur général de Ford Pro Europe. L’usine se veut également très respectueuse de l’environnement. Grâce aux panneaux solaires, elle produit 15 % de l’énergie qu’elle consomme.