Entretien avec Andre Bodis, Directeur de REA et P-dg de RFA
...du pôle parisien, encore déficitaire.
Le Journal de l'Automobile : Renault Europe Automobiles a été créée en juin 2001. Cette business unit réunit l'ensemble des filiales de distribution de Renault en Europe, dont la filiale française RFA. Chacune d'elle reste dépendante juridiquement de la filiale d'importation de Renault dans le pays où elle se trouve, mais doit vous rendre des comptes en matière de résultat. Pouvez-nous nous rappeler la mission de REA ?
André Bodis : Dans le cadre de sa stratégie de distribution, Renault a confié à REA la maîtrise de ses marques dans les grandes métropoles européennes. Il s'agit de garantir la performance commerciale et financière là où la concurrence est la plus forte et où le coût de l'immobilier et des salaires requiert des reins solides, une capacité à passer les vagues sur le long terme, ce qu'un concessionnaire ne peut pas toujours faire. En revanche nous sommes traités par Renault comme un concessionnaire, avec les mêmes conditions commerciales, les mêmes marges.
J.A. : Et pourtant, une rentabilité qui, selon la direction commerciale de Renault, serait correcte, à 1,2 % du chiffre d'affaires. C'est aussi votre cas ?
A.B. : Comme les concessionnaires, notre objectif est d'être rentables. Mais nos conditions de marché sont plus difficiles, nous supportons de lourds investissements pour réorganiser notre présence en France et nous développer dans les autres pays. Notre objectif de rentabilité est de 1 % du chiffre d'affaires, associé à 20 % des ventes du réseau Renault en Europe, à la fin du plan triennal en 2007. Mais, en réalité, je vise plutôt les 1,5 % du chiffre d'affaires à cette date.
J.A. : Pour l'heure, qu'en est-il ?
A.B. : Malgré la difficulté du marché en 2003, nous avons contribué au résultat de Renault pour 13 millions d'euros, soit 0,17 % de notre chiffre d'affaires. Nous sommes en conformité avec le plan, mais c'est insuffisant pour financer nos investissements.
J.A. :Des investissements de quel ordre ?
A.B. : Ils sont essentiellement consacrés à notre développement territorial, en particulier dans les Peco. Nous avons dépensé 60 millions d'euros en 2003, dans le cadre d'un programme d'investissement de 77 millions d'euros à financer avec les résultats que nous devons dégager jusqu'en 2006. Après la Hongrie, où nous disposons aujourd'hui de 4 sites à Budapest, nous avons débuté notre implantation en Pologne : Renault a repris en direct son importation et REA a racheté les 4 sites de distribution que l'importateur privé détenait en propre. Nous construisons un deuxième site à Varsovie et recherchons une troisième implantation dans la capitale. En Tchéquie, nous venons de poser la première pierre d'un site à Prague. Nous sommes en phase de réflexion sur la Slovénie et la Slovaquie. En revanche, nous n'avons pas de projet en Roumanie.
J.A. : Quels sont les critères qui définissent ces implantations ?
A.B. : REA n'a pas la volonté de contrôler la distribution de Renault, mais doit être présent là où l'activité est forte et les conditions de marché difficiles. Dans les pays où nous sommes déjà bien implantés, la logique est de rationaliser les plaques territoriales pour accroître les synergies et les économies d'échelle, et réduire la concurrence intramarque. Par exemple, nous venons de reprendre le site du concessionnaire d'Aubagne, qui était enclavé sur la plaque de Marseille. A l'inverse, la business unit de Grande-Bretagne, Renault Retail Group, a cédé 2 sites en Ecosse, car ils correspondaient à la logique de plaques d'un concessionnaire.
J.A. : En 2001, vous aviez des problèmes de rentabilité en Grande-Bretagne, en Allemagne et en Autriche. Hormis les Peco, quels sont aujourd'hui les pays qui grèvent votre résultat ?
A.B. : C'est l'une de nos satisfactions pour l'année 2003 : nos 12 pays d'implantation (hors Peco) dégagent un bénéfice. RFA, notamment, a bien résisté à la baisse du marché et contribue ainsi à 40 % du résultat de REA pour 59 % de son chiffre d'affaires. Pour mémoire, avant sa restructuration, RFA perdait 90 millions d'euros par an. C'est ce que doit gagner REA en 2007.
J.A. : Quelle est la place de Nissan dans votre stratégie ?
A.B. : Cela dépend en partie du statut de la filiale de distribution Nissan. Lorsqu'elle est intégrée juridiquement à la filiale Renault (c'est le cas en Allemagne, aux Pays-Bas, en Autriche et en Suisse), le développement de ses points de vente par REA est assez avancé. En Suisse, par exemple, REA a 2 points de vente Renault et 4 Nissan. Dans les pays où les deux filiales ont gardé leur indépendance, le développement se fait en fonction des résultats commerciaux des concessionnaires en place et de l'intérêt économique d'une reprise. En Espagne, par exemple, les performances des distributeurs Nissan sont telles que REA n'y détient aucun point de vente. En France, 10 sites Nissan sont intégrés à des plaques RFA, dont dernièrement Rouen, Le Havre et Toulouse.
J.A. : Entamée en 1997, la restructuration de RFA a été douloureuse, avec le changement de statut des salariés et la restructuration des sites. Paris, en particulier, a dû nécessiter un travail de réorganisation énorme. Aujourd'hui, êtes-vous arrivé à vos fins ?
A.B. : La plaque parisienne reste déficitaire. Notre objectif est de diviser par deux les pertes en 2004 et d'être rentables d'ici quatre ans. Pour cela, nous devons sortir d'une situation immobilière impossible, avec des sites très anciens et mal situés. Nous avons engagé une réorganisation immobilière sur Argenteuil et Clichy, où nous avons racheté le site Audi Bessières pour être mieux placés. Nous avons encore beaucoup de travail, mais néanmoins l'efficacité commerciale a nettement progressé sur Paris. Depuis janvier 2003, notre force commerciale dédiée aux flottes est concentrée sur un pôle spécialisé, RFA Paris Entreprises, tandis que les pôles Sud et Nord se chargent de la clientèle particuliers et artisans. Le démarrage a été difficile, mais nous avons bien fini l'année avec 21 000 ventes sociétés, soit 60 % de nos ventes parisiennes.
J.A. : La carrosserie a-t-elle été centralisée sur un site unique ?
A.B. : Non. L'idée était bonne a priori, mais nous nous sommes aperçus que nous étions déjà en surcapacité en carrosserie sur de nombreux sites. Nous avons donc utilisé les sites existants, en périphérie de Paris, comme à Saint-Denis, pour concentrer cette activité sans avoir à réinvestir dans de l'immobilier ou une logistique importante pour le transport des véhicules. En revanche, nous avons lancé un plan d'investissement de plusieurs millions d'euros pour être à la pointe de l'équipement et nous faisons régulièrement visiter nos installations à nos prescripteurs, les assureurs, pour leur démontrer notre savoir-faire.
J.A. : Pour finir, comment se présente l'année 2004 pour REA ?
A.B. : A fin mars, c'est très encourageant : nous sommes en phase avec notre objectif de résultat de 25 millions d'euros sur l'année. Le pôle parisien est également en ligne avec ses objectifs de réduction des pertes.
Propos recueillis par Xavier Champagne
Curriculum vitaeNom Bodis André Bodis prend la direction financière de Renault Argentine en 1985. Directeur de la Sodicam à partir de 1990, il prend ensuite la responsabilité de la direction commerciale après-vente en 1995. Il devient directeur du projet Nouvelle Distribution en 1997 puis est nommé en juillet 2000 directeur général de RFA. Avec la création de REA au 1er mai 2001, il devient directeur de cette business unit. |
En chiffresREA en 2003 |
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