Edito : Sécheresse et profusion
Gilles Deleuze avait senti qu’après l’inégalable majesté classique de la Renaissance, l’architecture baroque n’était pas qu’une réaction, mais qu’elle visait aussi à replacer l’homme au cœur des projets.
De retour du Salon de Genève, on peut se demander si le design automobile n’est pas en train d’entrer dans une phase baroque, au sens noble du terme. Certes, il reste encore quelques “masses molles”, pour reprendre une expression savoureuse de Deleuze, mais dans l’ensemble, le travail des designers est remarquable. Pourtant, les contraintes n’ont jamais été aussi fortes, avec l’étau de la mutualisation des pièces et composants, la pression des différentes réglementations et le diktat des réductions de coûts. Autant d’obstacles que les designers parviennent à surmonter, le feu d’artifice de lancements des petites citadines en étant la meilleure illustration, surtout que les marges de manœuvre sont ténues sur ce segment. Laissons à chacun le droit à sa préférence, mais force est de reconnaître que les C1, 108 et Aygo sont des modèles aboutis et parfaitement différenciés. L’enthousiasme est aussi de mise devant la nouvelle Twingo, en attendant de voir ce que sera la smart. A chaque fois, le client est au centre du projet, ce qui rime aujourd’hui, au-delà de l’usage de la mobilité, avec une prise en compte de l’enjeu environnemental, un traitement digne de ce nom de la connectivité et une compréhension des nouveaux arbitrages budgétaires. L’exercice n’est plus vécu comme un mal nécessaire, un appauvrissement et les designers se l’approprient avec un état d’esprit de séduction et d’invention parfois non dénué de malice. Après quelques générations grises, on ne peut que s’en réjouir et se rappeler la phrase de l’architecte Marc Barani : “le baroque, c’est la courbe, la fantaisie”.
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