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Constructeurs

La Chine met aussi le cap sur l'électrique

Publié le 13 septembre 2017

Par Romain Baly
4 min de lecture
C'est en tout en cas l'un des grands projets de Pékin qui envisage d'interdire, à l'horizon 2040, la production et la vente de voitures à essence. De quoi accélérer le développement mondial de l'électrique.

 

(AFP)

 

L'annonce s'avère bien plus importante qu'il n'y paraît. Si les projets tels qu'évoqués par les autorités chinoises restent flous, sans objectifs chiffrés ou date butoir, les conséquences d'une telle décision seraient considérables. Aussi ambitieux qu'ils soient, les objectifs de la France et du Royaume-Uni d'interdire les ventes de voitures thermiques à horizon 2040 ne peuvent pousser à eux seuls l'industrie à effectuer son aggiornamento, puisque chacun de ces marchés absorbe chaque année quelque deux millions de voitures neuves, une goutte d'eau à l'échelle mondiale.

 

En revanche, le marché automobile chinois, parti du néant il y a vingt ans, représente aujourd'hui 24,38 millions d'unités vendues par an, soit plus d'une automobile neuve sur quatre sur la planète. Et d'ici 2024, le cabinet AlixPartners estime que le marché chinois sera passé à 42 millions d'unités annuelles, soit 36% du total.

 

"Si la Chine dit que les moteurs à combustion interne, c'est fini, le reste du monde suivra parce que le reste du monde ne peut pas perdre le marché chinois", explique à l'AFP Bill Russo, expert automobile pour le cabinet de conseil Gao Feng, basé à Shanghai. L'annonce chinoise devrait donc être très discutée cette semaine à Francfort (Allemagne), où s'ouvre mardi à la presse le grand salon de l'automobile européen de l'année.

 

Un marché en très forte croissance

 

Les constructeurs européens, américains et japonais, contrairement à leurs homologues chinois pour l'heure, sont mondialisés. Fortement implantés dans l'ex-empire du Milieu où la réglementation locale leur impose de travailler en coentreprise, il leur faudra impérativement développer leurs gammes électriques. "Les constructeurs européens vont devoir nettement accentuer leurs efforts dans l'électrique pour ne pas être chassés du marché, car actuellement leur offre est insuffisante", avertit Stefan Bratzel, directeur du Center of Automotive Management (CAM), un institut de recherche allemand.

 

Le marché automobile électrique chinois est encore très faible, de l'ordre de 1,7% des ventes totales, mais il croît vigoureusement chaque année, soutenu par les incitations gouvernementales. Et les constructeurs chinois ont déjà pris de l'avance, détenant 96% de ce marché électrique, contre seulement 43,2% du marché tous modes de propulsion compris.

 

En outre, sur les moteurs et les batteries électriques, "la quasi-totalité de la capacité (mondiale) est en Chine, et ça s'accentue d'année en année", selon Laurent Petizon, spécialiste du secteur automobile chez AlixPartners. Selon lui, "cela pose un vrai problème à l'industrie européenne", les groupes moto-propulseurs sur lesquels ces constructeurs ont aujourd'hui la mainmise représentant 35% de la valeur ajoutée d'un véhicule. L'ère des moteurs thermiques "prendra vraiment fin lorsque la Chine sera certaine que ses constructeurs sont capables de commercialiser ce que (les autorités) veulent voir rouler", prédit Bill Russo.

 

Pas forcément une bonne nouvelle pour l'environnement

 

De façon assez paradoxale, cette annonce ne constitue pas forcément une bonne nouvelle pour l'environnement. Certes, les piétons et cyclistes évoluant dans les métropoles chinoises gagneraient à ne plus respirer les gaz d'échappement des véhicules thermiques. Mais en matière d'émissions de gaz carbonique, le bilan carbone d'une voiture électrique dépend de la "propreté" de l'approvisionnement. Or, dans le cas de la Chine, seule 11% de la production de courant provient d'énergies à faibles émissions (nucléaire compris), le solde étant issu de centrales thermiques, notamment à charbon.

 

L'objectif officiel de Pékin est de passer à 20% d'énergies à faibles émissions d'ici à 2030. En France, où l'on a misé sur le nucléaire (75% de l'approvisionnement), faire passer tout le parc automobile à l'électrique – un défi pour l'infrastructure – se traduirait théoriquement par une baisse des émissions de gaz carbonique. Se pose aussi la question de l'empreinte écologique des batteries, tant du point de vue de l'extraction du lithium actuellement nécessaire à leur composition que du recyclage de leurs éléments complexes et toxiques.

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