Gérard Leseul, député : "Tenir compte de l’échec des quotas de verdissement"
Le Journal des Flottes : Vous avez présenté ce 18 décembre 2024 une série de propositions visant à accélérer le verdissement des flottes automobiles. Quelle est maintenant la suite du processus ? Quand comptez-vous transposer ces éléments dans une proposition de loi ?
Gérard Leseul : La première étape est d’écrire la proposition de loi avant de la déposer au bureau de l’Assemblée nationale. Je tiens à souligner que lors de la présentation de notre rapport en commission du développement durable, nous avons senti un intérêt collectif et constructif de la quasi-totalité des groupes politiques de l’Assemblée. Avec mon collègue Jean-Marie Fiévet, nous avons pris l’initiative de proposer la rédaction d’une proposition de loi que nous pourrions finaliser courant du mois de janvier, pour avoir un dépôt fin janvier. J’espère que nous pourrons y parvenir, nous allons nous y atteler dès à présent. Nous avons d’ailleurs déjà averti nos collègues que nous serions demandeurs de leurs propres propositions sur la rédaction du texte. Il est donc possible que nous soyons rejoints par d’autres parlementaires, nous nous inscrivons dans une logique transpartisane. L’objectif est d’avancer vite. L’idée est que notre proposition de loi soit discutée au Parlement au mois de mars. Encore une fois, la présentation que nous avons faite ce 18 décembre était de bon augure en vue d’un travail législatif constructif et rapide.
JDF : Prévoyez-vous d’entamer un nouveau cycle de discussions avec les acteurs du secteur ?
G. L. : Nous avons fait un bon tour de piste dans le cadre de la mission d’information. Nous avons eu une discussion franche et totalement ouverte avec l’ensemble des acteurs de la filière automobile et des usagers. Maintenant, dans le cadre de la proposition de loi, bien sûr nous reprendrons langue. Lorsque le texte sera inscrit à l’ordre du jour, nous mènerons un nouveau cycle de rencontres et nous continuerons aussi à avoir des contacts et des auditions d’ici la fin janvier. Ce sera notamment le cas avec des représentants du Parlement européen puisque nous avons appris dans le cadre des échanges avec la Commission européenne qu’il y aurait une initiative communautaire, en vue d’un projet de directive. Et puis nous allons rencontrer de nouveau des acteurs avec lesquels il est possible de poursuivre le dialogue pour affiner un peu notre analyse. Le but est d’avoir la meilleure rédaction possible du projet de loi.
Sortir les véhicules hybrides rechargeables et se concentrer sur les véhicules à très faibles émissions
JDF : Vous avez entendu les arguments des loueurs courte durée, en revanche vous ne semblez pas enclins à accorder les mêmes faveurs aux loueurs longue durée…
G. L. : Il y a encore un dialogue sur l’ensemble de ces sujets. Dans la rédaction de l’amendement du gouvernement Barnier déposé au Sénat fin novembre, l’ensemble des loueurs étaient exclus des quotas LOM. Il n’est pas impossible que dans notre dispositif de sanctions, nous puissions exclure aussi les loueurs longue durée. Dans les recommandations que nous faisons, nous ne proposons pas de sanctions. Nous proposons de les laisser inclus dans la trajectoire pour maintenir une certaine incitation sans pour autant les sanctionner. Ce qui me semble fondamental, c’est la responsabilité du donneur d’ordres initial, à savoir les entreprises de plus de 100 véhicules, et ce, quel que soit le mode de financement. Mais cela ne veut pas dire que les acteurs du financement, qui sont des intermédiaires, soient exonérés par exemple d’un déclaratif. Cela permet d’avoir une traçabilité et un effet incitatif. Je suis tout à fait conscient que les loueurs courte et longue durée répondent aux demandes de leurs clients, particuliers et entreprises. Par ailleurs, ce ne sont pas nécessairement les loueurs longue durée qui sont les plus impactés par la trajectoire de verdissement parce que, finalement, ils mutualisent leurs clients individuels et entreprises, ce qui leur permet d’être à peu près aujourd’hui dans la trajectoire prévue par la LOM.
JDF : Vous proposez d’inclure les entreprises qui ont plus de 50 voitures en parc dans le dispositif en 2028. Combien seraient-elles, de fait, concernées ?
G. L. : Nous attendons le chiffrage précis du ministère. Et effectivement, nous proposons que cela se fasse en 2028. Nous donnons ainsi du temps à ces entreprises de se conformer à la trajectoire LOM.
JDF : L’amendement gouvernemental prévoyait que les voitures électriques écoscorées et que les utilitaires légers soient bonifiés dans le calcul des quotas. Est-ce une piste que vous suivez également ?
G. L. : Nous sommes tout à fait conscients qu’il faut faire extrêmement attention à ne pas ouvrir bêtement l’ensemble des portes aux industries totalement étrangères. Vous avez raison de rappeler que l’amendement proposé par le gouvernement Barnier est de favoriser certains modèles, notamment ceux bénéficiant de l’écoscore, mais cela a déjà été discuté par d’autres avant. Il y a effectivement lieu de bonifier le verdissement si le véhicule dispose d’un écoscore favorable, de l’ordre de 0,5. En somme, les véhicules électriques fabriqués en France ou en Europe compteront pour 1,5. Cela réduit de fait mécaniquement le nombre de véhicules à électrifier si les entreprises optent pour les modèles les plus vertueux, avec un bon écoscore. Dans cette logique, nous proposons de sortir les véhicules hybrides rechargeables et de nous concentrer sur les véhicules à très faibles émissions.
JDF : Avez-vous envisagé de modifier la trajectoire de verdissement prévue ? Cela ne fait en tout cas pas partie de vos propositions…
G. L. : Très honnêtement, les quotas me semblent un peu en-deçà de ce qu’il faudrait faire. Mais finalement, nous avons voulu avoir une mission d’information qui tienne compte de l’échec de la mise en œuvre de la loi d’orientation des mobilités et des quotas de verdissement qu’elle impose. La première chose à faire avant d’accélérer la trajectoire est de faire appliquer celle qui devrait déjà l’être. On voit bien d’ailleurs que dans la proposition faite précédemment par le député Damien Adam il y a eu des réticences extrêmement fortes sur la trajectoire proposée, à tel point que le texte a été retiré. Ce n’est pas la peine de repartir dans des batailles perdues d’avance. Nous avons une loi existante, la LOM, qui a été votée et qui devrait être appliquée. Elle ne l’est pas, faisons en sorte qu’elle le soit. Et puis le fait d’élargir en 2028 aux entreprises à plus de 50 véhicules en parc est une manière paramétrique d’accélérer le verdissement des flottes. Il est en outre important de noter que les réticences passées, parfois psychologiques ou liées à un manque d’offres, sont progressivement levées, notamment avec des produits qui sont de plus en plus performants et des coûts qui sont orientés à la baisse. Nous devrions, j’en suis sûr, parvenir rapidement à une bonne application de la loi.
Nous souhaitons accompagner la mise en place du crédit mobilité
JDF : Vous proposez enfin de donner un cadre au crédit mobilité en calquant notamment les avantages en nature sur ceux des véhicules électriques de fonction…
G. L. : Effectivement, nous souhaitons accompagner la mise en place du crédit mobilité. L’idée est d’appliquer le même traitement fiscal que pour les voitures électriques de fonction, à condition que les sommes allouées soient fléchées vers des mobilités durables. Nous verrons comment nous pourrons traduire cette ambition avec une nomenclature permettant de l’inscrire réellement dans le décompte des quotas de verdissement de la LOM.
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