Une autre stratégie, s’il vous plaît...
...dernière à la même époque (l'Espagne ou la Grande-Bretagne, par exemple) tandis que d'autres déclinent plus ou moins brutalement (l'Allemagne, la France). Mais depuis des années, l'ensemble stagne. Nul ne doute des efforts accomplis par l'ensemble de l'industrie pour sortir de nouveaux modèles à un rythme désormais frénétique et pour réduire les coûts industriels à la hache... tout en poussant les feux sur la promotion commerciale. Mais le résultat de ce cocktail flamboyant est sous nos yeux : l'effet nouveauté d'un modèle ne dure plus que quelques mois, l'étranglement progressif des équipementiers a brisé la courbe d'amélioration de la qualité des produits, et chaque "cent" de promotion supplémentaire rend moins que le précédent. Il ne serait peut-être pas maladroit, à ce stade, que des responsables se posassent quelques questions sur la nécessité de réitérer à l'infini une seule et même stratégie pernicieuse. En tout cas, puisqu'un renouveau du commerce automobile est possible, pourquoi ne pas commencer par là pour sortir de l'impasse ? Si l'on veut que le commerce contribue vraiment à soutenir la demande, il sera bien venu de le libérer de ses entraves physiques et (plus encore) idéologiques et traditionnelles. Aujourd'hui, un réseau est une machine lourde, qui consomme des ressources financières en ne faisant jouer que très imparfaitement la concurrence, notamment la concurrence entre plusieurs types d'entreprises de distribution/réparation. C'est donc là qu'il faut porter le fer.
Un concessionnaire doit gagner de l'argent sans être subventionné par "son" ou "ses" constructeur(s) ; son entreprise doit pouvoir en absorber d'autres ou disparaître, par effet d'une saine concurrence. Pour cela, il est d'abord nécessaire que chaque concessionnaire puisse organiser son entreprise comme il l'entend, sans être écrasé par un fatras d'exigences (traduites aujourd'hui en "critères qualitatifs") élaborées par les constructeurs ou demandées par les réseaux pour des raisons diverses, mais rarement ou jamais dans une optique de rentabilité maximale. Ainsi, un salon de 400 mètres carrés peut être une très bonne chose pour un entrepreneur, et une très mauvaise pour un autre, chacun ayant sa façon de faire du commerce. Il y a aussi des interdits à lever, comme celui qui consiste à empêcher l'ouverture de nouveaux points de vente. Il faut aussi que le concessionnaire (ou distributeur, ou réparateur agréé) puisse réellement vendre et/ou réparer librement plusieurs marques dans les mêmes locaux si tel est son choix, et ceci moyennant des investissements complémentaires négligeables. Les entrepreneurs gagnants seront alors, comme il se doit, les plus concurrentiels, et les plus efficaces. Si l'on fait un jour ces quelques petites choses, plus quelques autres auxquelles il faudra bien penser, on s'apercevra certainement qu'on est en train de serrer la fameuse main invisible du célèbre manchot Smith. Les choses iront mieux, y compris pour la demande.
Un ou deux constructeurs suffiraient à changer la donne
Il ne faut évidemment pas s'attendre à ce que l'ensemble des constructeurs abandonne les vieilles habitudes demain matin. Mais cela n'est pas nécessaire non plus. Si l'un ou l'autre des grands constructeurs, après avoir mis en quarantaine les chantres du "brand" et ceux de l'immobilisme, décidait de suivre une stratégie commerciale énergique et sans oripeaux idéologiques, nous assisterions à deux choses. En un premier temps, le précurseur acquerrait un avantage concurrentiel certain par rapport à ses concurrents encore embourbés dans leurs inhibitions. Ensuite, et sans que l'avantage du premier disparaisse, les autres devraient suivre le mouvement. La demande, puisque tel a été notre point de départ, s'en trouverait-elle mieux ? Répétons simplement qu'il n'y a qu'une façon efficace de soutenir durablement la demande automobile : c'est celle qui consiste à faire baisser les prix à la clientèle. Dans le domaine de la distribution/réparation, ceci passe par la concentration des réseaux, non pas forcée par les constructeurs, mais résultant de la concurrence. Et celle-ci doit s'exercer (aussi) entre des entreprises de distribution/réparation disposant de la plus grande liberté d'action possible. "Que cent fleurs..." comme disait l'autre.
Ernest Ferrari
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