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Distribution

Le grand tricot

Publié le 2 mai 2011

Par David Paques
14 min de lecture
Afin de remplir leurs objectifs commerciaux, ou de simplement soigner leur représentation, de nombreuses marques troquent de plus en plus le récurrent “turnover naturel” contre une vraie stratégie de développement. Une quête de points de vente et/ou d’investisseurs qui confirme la tendance observée l’an dernier : le maillage hexagonal est en voie de densification.
Dans trois ans, Nissan affichera un réseau d’environ 310 points de représentation.

Année de conquête ou de renouveau pour certains, de transition ou de tous les dangers pour d’autres, 2011 signe surtout le retour d’un rythme plus naturel pour le marché français. Les dispositifs de soutien se font de moins en moins artificiels, et si beaucoup de marques n’en ont pas tout à fait terminé avec la grande braderie dont elles sont les premières à regretter l’effet néfaste sur la notion de prix, les affaires en reprennent néanmoins un visage plus ordinaire. A l’issue de trois exercices agités, les tendances de fonds de la distribution automobile n’ont d’ailleurs pas changé. Bien au contraire. Plus de marques, plus de sites, mais moins d’investisseurs. Et les prochaines années ne devraient pas déroger à la règle. Parce que, comme l’évoquait récemment Claude Fréret, président de PGA Motors, “les standards immobiliers et les exigences financières font que nous avons et aurons besoin de plus en plus de moyens”. En témoigne l’évolution qualitative, mais également quantitative, actuellement en cours dans les réseaux. Nous comptons ainsi 490 zones à couvrir, contre 354 l’année dernière, à la même époque, pourtant déjà une année importante à ce niveau.
En termes de recrutement, notre traditionnel dossier Open points a souvent mis en relief les stratégies de développement massif des marques exotiques, le lifting “mid-terme” des spécialistes, le turnover ou la restructuration des réseaux en voie de maturation, ou encore les quelques retouches des grands généralistes. Cette année, ce schéma est bien différent. Notamment parce que, à l’instar de Nissan, Volkswagen, Seat ou Skoda, des réseaux que l’on pensait mûrs sont entrés dans une phase de croissance. Tous ou presque plaçant la densification de leur capillarité comme un préalable à leur envol commercial. Toutes faisant d’ailleurs de leurs propres partenaires investisseurs la base de ce développement.

Des Français non concernés

Chez Renault, l’année 2010 a mis un terme, ou presque, à la constitution du réseau Dacia. La marque au losange n’entrevoyant pas de faire grandir son réseau au-delà des 753 points de vente actuels, et hors des opérateurs liés au réseau Renault, c’en est fini des développements récents. Les mouvements d’opérateurs concerneront une nouvelle fois les transactions liées aux mouvements naturels du réseau. Des transactions qui, après plusieurs mois de calme relatif, se sont accélérées ces quatre derniers mois. Pour sa part, la marque poursuit le déploiement des normes Air sur les différents sites et continue son travail de professionnalisation de tous les métiers. Côté projets, Renault pose actuellement les bases du futur réseau de distribution de ses véhicules électriques.

Chez Peugeot et Citroën, l’heure est naturellement au renouvellement plutôt qu’à l’expansion. Une situation on ne peut plus banale pour des réseaux qui ont affiché respectivement 429 et 457 points de vente à fin 2010. Outre la vie des réseaux qui verra une nouvelle fois certaines transactions faire bouger quelques lignes au niveau de la représentation, les deux marques sont, comme Renault, affairées à la montée en qualité de leurs points de vente. La marque au lion touche au but, en ce qui concerne le déploiement de ses normes visuelles. Ce qui n’est pas encore le cas pour le constructeur aux chevrons.

Portes ouvertes dans les réseaux du groupe Volkswagen

Volkswagen, Seat, Skoda. A elles seules, les trois marques du groupe VW sont actuellement en quête de près de 200 points de vente.

Comme nous l’évoquions en décembre dernier, la marque de Wolfsburg a de nouvelles ambitions pour le marché français. A savoir représenter 8 % du marché, à moyen terme, contre 6,6 % en 2010. Pour y parvenir, outre la stratégie produits, Volkswagen souhaite densifier son maillage pour renforcer sa représentation. Ce sont ainsi 100 points de vente de plus dont le constructeur entend disposer, pour atteindre un réseau de 470 points de vente d’ici 2015. Les zones libres identifiées, sont principalement rurales. Des villes moyennes, ou des zones de 7 000 à 9 000 habitants, grâce auxquelles la marque souhaite gagner un point de pénétration. “Ces zones seront soit travaillées par nos distributeurs, par le biais d’une annexe, soit par de nouveaux partenaires, sous la forme d’une agence commerciale dépendante du site primaire à proximité”, expliquait alors Jacques Rivoal, directeur de Volkswagen France. La marque évoque, à ce sujet, un volume moyen de 70 VN et 70 VO par an, dans une surface d’exposition de 90 m2, avec 1 vendeur et 2 compagnons à l’atelier et dont l’investissement devrait osciller entre 200 000 euros, pour un simple agrandissement, et 500 000 euros, pour une construction ex nihilo, outillage et mobilier compris. Les opérateurs du réseau ont déjà été consultés. Forte de ces informations, la marque s’évertue donc désormais à combler les points sans candidats. Jacques Rivoal confiait d’ailleurs récemment : “Nous accueillons toutes les candidatures !”.

Skoda, qui disposait d’un réseau de 135 points de vente au 1er janvier, affiche elle aussi certaines ambitions. Commerciales, d’abord. Puisque la marque tchèque a, en effet, annoncé sa volonté d’atteindre 1,5 % du marché français à moyen terme, contre 0,8 % l’an dernier. Pour cela, le constructeur a identifié 40 zones libres à couvrir afin d’atteindre un maillage de 175 sites en France d’ici 2013. “Notre priorité est de compléter notre représentation sur les grandes agglomérations et de la doubler sur les villes importantes. A priori, nous réaliserons ce type d’opérations avec les partenaires en place sur lesdites zones”, confiait l’an dernier Pascal Noisette, alors chef du département développement réseau Skoda, depuis remplacé par Benoît Peronnet. “Nous recherchons des partenaires prêts à suivre la stratégie de développement de la marque”, détaille aujourd’hui simplement Skoda, actuellement en train de développer de nouveaux standards architecturaux.

Stratégie similaire chez Seat, ou presque. “Nous allons déployer une stratégie novatrice en distinguant des zones métro et non métro. Le cœur de tout cela restant la proximité de la clientèle. Cela se traduira par un double développement, sur le terrain avec nos concessionnaires et un développement de contacts au travers du digital. La France sera l’un des premiers pays à déployer cela”, expliquait récemment Paul Sevin, directeur commercial Seat SA. En France, la marque espagnole entend couvrir une “dizaine de points” supplémentaires par an d’ici 2015, pour compter 30 à 40 sites de plus à cette échéance. “Nous avons pour volonté de compter des points de représentation sur des villes de plus de 30 000 habitants, dont le marché toutes marques oscille entre 5 000 et 10 000 VN par an”, précise la marque. Une nouvelle fois, c’est le réseau en place qui devrait être sollicité par le constructeur pour investir ces zones vierges.

Nissan construit, Fiat dans l’expectative

D’ici 2013, Nissan vise une part de marché de 4 % et un volume annuel de 95 000 VN sur le marché français et entend devenir la 1re marque asiatique importée en France devant Toyota. La marque nippone s’est d’ailleurs fixée comme objectif d’atteindre les 3 % de pénétration dès la fin de cette année. Comme souvent, la recette est simple et s’appuie sur le plan produits, le développement des canaux de vente VU et flottes, mais aussi et surtout sur une amélioration de la capillarité du réseau. C’est ce que le constructeur nous expliquait en novembre dernier.

“Il nous manque 100 points pour aller chercher ces 4 %”, estimait alors Richard Tougeron, directeur du développement réseau Nissan. “Nous ne sommes pas à la recherche d’investisseurs”, nous précise-t-on aujourd’hui, pour témoigner du concours que le réseau actuel doit apporter à cette stratégie de développement. Moins de six mois après cette annonce, les choses avancent très vite. Nissan France nous annonce vouloir ouvrir encore 47 points de vente d’ici 2014, dont 18 cette année, afin d’atteindre son objectif de 230 points de vente et 82 points services d’ici 2014.

Fiat se montre aujourd’hui discret quant à la stratégie de développement réseau de ses marques. Dans le réseau Fiat, qui a terminé 2010 avec 234 points de vente pour 114 investisseurs, on s’attache, surtout, à bien négocier le virage Lancia-Chrysler, dont les grandes manœuvres devraient démarrer dans les jours qui viennent. “Notre but est d’être prêt au 1er juin”, annonçait récemment Stéphane Labous, directeur des marques Chrysler, Jeep, Dodge. “Nous sommes dans la phase finale de restructuration”, poursuivait-il alors. Sur les 90 sites ambitionnés par le groupe, une vingtaine sera tenue par des partenaires sortant du réseau Chrysler Jeep Dodge, environ 35 viendront de l’actuel réseau Chrysler Jeep Dodge, enfin les 25 points de ventes restants seront mis en place par des partenaires du groupe Fiat.

Hyundai accélère, Kia peaufine

A la fin de l’année en cours, Hyundai pourrait être, en matière d’implantations, le 8e plus important maillage de France, juste derrière Toyota, avec 260 points de vente. Ce sont ainsi 40 open points qui sont à combler avant décembre prochain pour le constructeur. C’est du moins le cap que s’est fixé le groupe Frey pour l’importation de la marque coréenne qui, rappelons-le, occupait le 18e rang au niveau commercial sur l’exercice 2010, avec 18 785 VN immatriculés. Cette ambition est légitimée par l’ambition de la marque -Hyundai souhaite écouler 24 000 VN cette année- et la densification de l’offre produits. Cette année, la marque va notamment lancer le Veloster, mais également l’i40. “Notre objectif est de nous appuyer principalement sur le développement de nos investisseurs actuels”, annonce-t-on du côté de l’importateur. Précisons qu’en début d’année, Patrick Gourvennec, directeur général d’Automobiles Hyundai France, nous confiait vouloir réduire le nombre d’investisseurs dans le réseau à 140 d’ici 2012, contre 152 actuellement. Ce qui n’empêche pas la marque de faire signer de nouveaux investisseurs. Très prochainement, Philippe Dugardin, opérateur Ford, Mazda, Volvo, Jaguar et Land Rover, devrait ainsi prendre le panneau Hyundai à Faches-Thumesnil, en proche banlieue de Lille (59).

Chez le cousin Kia, les ambitions, à ce niveau, sont un peu plus modestes. Le constructeur conserve sa volonté d’atteindre un maillage de 200 points de vente en France d’ici 2012. Et celui-ci touche au but. Après les ouvertures des sites de Champagnole et de Morbier (39) par Jacques-Olivier Prost en janvier dernier, la marque compte 182 sites en France. Il lui reste encore à nommer 8 à 13 points pour être dans les temps de passages avec un total de 190 à 195 points de vente actifs à la fin de l’année. Un chiffre bien loin du rythme de recrutement observé chez le constructeur coréen ces dernières années. Kia, dont la représentation en France est assurée par 120 partenaires, entend elle aussi s’appuyer sur ses opérateurs actuels pour peaufiner son maillage. “Nous choisissons nos investisseurs au sein du réseau ou des distributeurs localement bien implantés qui pourront donc rapidement développer notre activité sur la zone à couvrir. Il n’y a pas de volonté de travailler à tout prix avec de gros groupes de distribution même si certains des plus importants en France ont choisi de représenter Kia”, confie, en effet, la marque à ce sujet.

Ainsi, le grand chantier actuel dans le réseau Kia ne concerne pas le recrutement, mais la qualité des affaires. “Trop de concessionnaires n’ont pas suivi notre montée en puissance. Ils sont à l’image de l’ancien Kia. Ils manquent d’espaces d’exposition, ils n’ont pas les bonnes attitudes, ni les méthodes de travail. Pour passer un cap, il nous faudra des concessionnaires disposés à nous accompagner, sinon il faudra s’en séparer”, nous expliquait récemment Benny Oeyen, directeur marketing et planning produits de Kia Motors Europe. “Nous avons actuellement 13 dossiers de distributeurs agréés dont les points de vente sont en travaux et devraient ouvrir d’ici la fin de l’année ou début 2012”, annonce d’ailleurs la filiale française à ce sujet. D’autres devraient suivre.

Les “Premium” respirent

Hormis Audi, dont la filiale française en termine actuellement avec la réduction de son maillage, les autres marques Premium affichent un rythme de croisière pour le moins naturel. Toutes, ou presque, affichent déjà un réseau mature. Chez Mercedes, par exemple, après les quelques mouvements de 2009 et les légères retouches de 2010, l’heure est clairement au business. “Notre couverture réseau est optimale, et nous n’avons pas de zone à couvrir, sinon par des partenaires déjà existants. Nous ne cherchons donc pas de nouveaux investisseurs en particulier. Concernant l’après-vente, il existe quelques zones non couvertes. Afin de satisfaire la clientèle SAV et d’offrir de la proximité, nous étudions chacune de ces zones au travers d’une approche personnalisée avec nos investisseurs actuels”, indique-t-on, en effet, chez Mercedes. Même son de cloche chez BMW. Après une restructuration qui a pris plus de temps qu’initialement prévu, le réseau semble devoir retrouver, lui aussi, une évolution plus classique. “Nous sommes désormais au milieu du contrat et sommes entrés dans une nouvelle période de stabilité. Nous n’avons pas pour ambition de créer un trafic qui pourrait s’avérer contre-productif vis-à-vis du commerce”, confie Valéry Hénaux, chef du service franchising, planification et architecture réseau BMW. “Désormais, le réseau est en place, structuré et organisé. Les changements de mains se géreront de manière plus ponctuelle. Nous en aurons sans doute entre 5 et 7 en 2011, ce qui est un rythme naturel”, nous précisait récemment Patrice Ratton, directeur du développement réseau BMW France.

Dans ce contexte, Volvo fait presque preuve d’activité débordante, avec 8 zones libres à couvrir d’ici 2013, dont trois cette année. Une ambition finalement pas si révélatrice d’une quelconque envie de croissance commerciale, puisqu’il s’agit pour la marque suédoise d’atteindre un maillage de 121 points de vente dans les deux ans. C’est-à-dire exactement le nombre de sites sur lequel la marque s’appuyait avant 2006.

Evoquons également le cas Saab. Les incertitudes et les difficultés financières actuelles du constructeur n’ont, semble-t-il, pas gelé les envies de développement du réseau français. La marque scandinave s’est fixée pour objectif de compter 25 nouveaux points de vente d’ici septembre 2012, dont 15 avant la fin 2011. La marque recherche ainsi “des investisseurs déjà performants sur des segments de niches et présents physiquement dans leurs affaires”, nous dit-on. Reste à savoir si la situation de la marque va, ou non, freiner d’éventuels partenaires.

Les spécialistes à leur rythme

Côté spécialistes, nippons en l’occurence, Daihatsu a naturellement disparu de notre enquête annuelle. Comme nous l’évoquions dans notre dernier numéro, la marque qui nous confiait l’an dernier avoir encore 27 open points, ne sera plus commercialisée en Europe à partir du 1er février 2013.
Après la campagne de fermetures opérées dans son réseau entre 2008 et 2009, Mazda est, depuis peu, repartie en quête de nouveaux investisseurs. Outre un turnover classique, il manque désormais 15 points à la marque pour atteindre une couverture optimale du marché. Le constructeur cherche d’ailleurs à combler cinq de ces quinze zones libres avant la fin de l’année. “Nous privilégions les petits groupes familiaux régionaux dans lesquels notre marque n’est pas confiée à un directeur de site mais est gérée en direct par les investisseurs”, nous précise le constructeur. “Mazda veut s’inscrire dans une dynamique d’accompagnement de ses partenaires. Nous voulons et nous nous devons de leur proposer un plan de business attractif. Il s’agit d’être parmi les marques sur lesquelles les concessionnaires multi panneaux ont envie de se concentrer”, confiait Jeffrey H. Guyton, président de Mazda Motor Europe, sur le dernier salon de Genève.

Mitsubishi est, quant à elle, en quête de 10 “concessionnaires de marque spécialiste, impliqués dans le management opérationnel”. Un appel à l’implication et l’enthousiasme que Kiyoshi Teshima, président de Mitsubishi Motors France, lançait récemment dans nos colonnes : “Sans l’envie, nous n’y arriverons pas”, insistait-il en effet. La vision de la marque est d’atteindre les 103 points de vente dans l’Hexagone d’ici 2013.

De son côté, Honda affiche actuellement 8 open points, dont trois à combler dès cette année, afin de remplir son objectif de stabilité à 11 000 immatriculations VN en 2011. Le profil recherché ? “Des investisseurs régionaux, avec une bonne implantation permettant d’envisager une couverture multi-sites, en phase avec les standards minimums européens. Nous souhaitons également une exclusivité de site et de société d’exploitation. Le contrat est sélectif et exclusif”, précise la marque.

Rayon spécialistes, non japonais, Lada continue pour sa part d’avancer ses pions. La marque, qui compte actuellement 99 points de vente, souhaite en compter 120 avant la fin de l’année 2011. “Une première étape”, confie Lucien Lacroix, responsable du développement réseau du constructeur russe. L’objectif à moyen terme, est d’atteindre 150 points de vente en France.

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