Une valeur sûre
Par rapport à la moyenne des groupes automobiles, Volkswagen a toujours plus ou moins été bien noté chez Fitch. Le groupe bénéficiait ainsi d'un A+ en 2003, au moment où les premiers nuages s'amoncelaient sur Wolfburg. Une première vague de dégradation a donc suivi : A, puis A - à la fin de l'année 2004. En 2005, la situation est restée stable, même si les analystes conservaient une attitude plutôt négative. "Cependant, les plans de restructuration ouvraient des perspectives et c'est pour cette raison que nous n'avions pas choisi de dégrader encore plus le groupe", se souvient Emmanuel Bulle. Avec raison puisque les plans de rigueur ont effectivement fait preuve d'efficacité à quasiment tous les niveaux : coûts, ventes, revenus, etc. "L'effort majeur effectué sur les coûts a notamment porté ses fruits, ce qui a permis de soutenir les marges", souligne l'expert. Ainsi, la marge opérationnelle qui avait fondu comme neige au soleil pour s'établir à moins de 1 % en 2004, s'est ensuite redressée avant de connaître un boom à partir de 2006. Elle s'affichait à un niveau supérieur à 5 % en 2007. La plupart des compteurs étant revenus au vert, Volkswagen semble mieux armé que certains de ses concurrents pour affronter la crise : "Volkswagen présente en effet le profil pour faire partie des gagnants lors de la sortie de crise. D'une part, sa diversification géographique et "marchés" est précieuse et d'autre part, son large portefeuille de marques lui permet de couvrir toutes les gammes et de mieux répondre de façon réellement ajustée à une baisse de la demande. Enfin, l'effet de taille et les synergies existantes ou potentielles constituent un atout de poids". Par ailleurs, la diversification dans le PL compte aussi parmi les points positifs, même si c'est plus à long terme qu'à court terme, vu la conjoncture de ce marché.
Les interrogations soulevées par le rapprochement Porsche-Volkswagen
Dès lors, on peut se demander pourquoi Fitch Ratings a légèrement dégradé le groupe en début d'année ? C'est précisément là qu'intervient le dossier Porsche… Fait automobile du précédent exercice, Porsche a pris plus de 50 % du capital de Volkswagen, annonçant son intention de porter cette participation à 75 % à terme et évoquant un possible accord de type "Profit ans Loss", ce qui n'a pas réjoui tous les analystes. "Nous n'avons pas dégradé Volkswagen pour des raisons opérationnelles, mais bel et bien par rapport au dossier Porsche et au scénario évoqué qui verrait Porsche consolider Volkswagen. Dès lors, nous prenons naturellement le profil financier de Porsche en compte. Or Porsche est inférieur à BBB+. Donc si nous consolidons les deux groupes, Volkswagen en pâtit car Porsche présente un profil plus fragile", explique Emmanuel Bulle tout en précisant que cette vision n'est pas forcément celle des analystes qui se focalisent uniquement sur les actions. Pour mieux comprendre, un décryptage s'impose : certes, Porsche dégage les marges les plus élevées du secteur, mais le groupe présente aussi un niveau d'endettement excessivement élevé, surtout depuis le rachat des parts de Volkswagen… Le ratio dette nette sur Ebita pose problème et les marges ne suffisent plus forcément à rassurer tout à fait. Et Emmanuel Bulle de préciser : "Par ailleurs, Volkswagen gagne de l'argent en construisant et en vendant des véhicules, c'est-à-dire dans une logique de long terme, alors que Porsche, dernièrement, a principalement dégagé ses résultats par le biais d'opérations financières, via des actions et des options par exemple. Cela a pu représenter environ 90 % de son résultat. C'est donc plus difficile à maîtriser. En outre, d'un point de vue opérationnel, Volkswagen fait valoir une taille critique et une diversification bien plus intéressantes que Porsche, surtout à une période où le haut de gamme n'est pas une assurance tous risques".
Le problème Seat…
En somme, Volkswagen pourrait être mieux placé, mieux noté en l'occurrence, sans l'affaire Porsche. Le groupe n'en demeure pas moins très fiable et confortablement installé parmi les ténors du secteur automobile. Devant, on ne trouve guère que Toyota, tirant profit d'une stratégie financière conservatrice très sûre même pendant des périodes plus délicates, et Honda. Toutefois, deux éléments posent aussi question. Le premier n'est pas propre au groupe, mais concerne tout le secteur automobile. "Pour relever le défi des énergies alternatives, il faut consentir à des investissements colossaux, alors même que la période est très dure commercialement. C'est comme un goulet d'étranglement, négatif pour tous les acteurs. De par sa taille, le groupe Volkswagen est cependant un peu moins mal loti que d'autres", explique Emmanuel Bulle. Enfin, le cas Seat n'a de cesse de soulever des interrogations… "Le dossier Seat n'est pas suffisant pour tirer la note de Volkswagen vers le bas, mais cela la plafonne clairement. Pour le groupe, c'est un boulet à traîner, surtout actuellement, avec l'effondrement du marché espagnol. D'autant que la marque a un rayonnement géographique très limité. De toutes façons, je pense qu'il y a aujourd'hui trop de marques en Europe, et Seat pourrait bien en faire partie", conclut Emmanuel Bulle.
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