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Constructeurs

Perspectives d'avenir

Publié le 15 juillet 2011

Par Alexandre Guillet
8 min de lecture
Table ronde - partie n°3
Vanessa Chocteau

- Le VE, une formidable opportunité
- Accélération programmée du marché avec l'arrivée de la 4G
- Qui veut payer ? Personne...
- Pierre Mammet prône l'établissement de standards pour agréger des expériences disparates et passer un cap
- Stéphane Evanno conclut la journée en évoquant l'expérience-pilote lancée par son groupe à Singapour

En filigrane du discours de Vanessa Chocteau, directeur général de Greenovia (Groupe La Poste), affleure un changement de paradigme : “Nous avons lancé Greenovia, une solution éco-responsable de services et de conseil qui peut paraître aux antipodes du business traditionnel de La Poste, mais nous voulons accompagner les utilisateurs aux usages de demain. L’usage est au cœur de nos préoccupations et par définition, les usages sont multiples dans le domaine des transports. La technologie est au service des usages, mais les solutions technologiques peuvent aussi dérouter les utilisateurs, d’où la nécessité de l’accompagnement. L’éco-mobilité nous conduit à repenser complètement la mobilité ! Le défi est complexe car c’est un peu un choc des mondes entre automobile, télécoms et infrastructures… Il faut donc éviter l’écueil de l’inertie et ne pas attendre qu’un business-modèle miracle apparaisse d’un seul coup, sinon l’offre et la demande ne se rencontreront jamais”.

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Le VE, une formidable opportunité

“En toute humilité, il est nécessaire d’avoir des pionniers et d’oser travailler ensemble. Le véhicule électrique et son écosystème spécifique sont une formidable opportunité d’aller dans ce sens, même si ce n’est pas la solution unique de l’avenir des transports. J’insiste encore sur deux éléments essentiels. D’une part, si la simplicité est capitale pour un particulier, pour un professionnel, c’est l’interopérabilité. D’autre part, je trouve rassurant d’entendre parler d’open data, car c’est à ce prix que nous progresserons significativement, étant entendu que la problématique ne se limite pas à la voiture connectée, mais que c’est bel et bien le monde qui est connecté”.

André Méchaly, directeur marketing, stratégie et solutions clients d’Alcatel Lucent, dessine les contours d’un avenir très connecté : “Notre groupe a commencé à travailler sur cette vaste question au travers du projet Toyota Prius, puis nous avons étendu nos collaborations à d’autres constructeurs, dont Volkswagen et Audi. Le véhicule connecté couvre en fait un vaste champ des possibles. Il y a la navigation, les loisirs, mais aussi l’interaction entre le véhicule et d’autres environnements, comme le domicile par exemple, le géo-messaging, le paiement sans contact pour l’essence, le parking etc., via une puce NFC… De nombreux services iront dans le cloud et chacun aura accès à ses contenus partout, la voiture ne faisant pas exception. Les futures générations d’écrans tactiles rendront les choses très simples et d’autres pistes, échanges vocaux, exploitation des gestes, sont très prometteuses. Cela se fera en toute sécurité et concernant les loisirs, n’oublions pas que tout ne s’adresse pas au seul conducteur, mais qu’il faut aussi penser aux passagers. Reste la problématique du débit et de la disponibilité du réseau”.

Accélération programmée du marché avec l’arrivée de la 4G

“Les choses s’accélèrent depuis 2007 et les précisions données sur la 4G. Avec un objectif : comment éviter les déboires de la 3G où nous avions les terminaux, mais pas forcément les applications ? Nous sommes donc allés à la rencontre de l’industrie automobile pour envisager le potentiel de véhicules à très haut débit et nous avons fondé NG Connect qui est en fait un écosystème regroupant plusieurs secteurs souvent verticaux, télécoms, automobile, médical… Il s’agit donc d’un écosystème complet. Nous pensons que ce marché va connaître une phase d’accélération avec la 4G et selon une récente étude, le marché de la voiture connectée est estimé à 77 millions d’unités dès 2016 !”.

Jacques Garcin, directeur automobile & télématique d’Orange jette un pavé dans la mare en stigmatisant l’absence de business-modèle : “Même si nous allons bien au-delà, nous sommes très actifs dans l’infotainment car le consommateur veut avoir accès à l’ensemble de son environnement personnel au moment où il le désire. La voiture n’échappe plus à la règle et nous avons vu que la technologie est disponible pour faire entrer l’information au sens large dans les véhicules. Avec les smartphones, voire d’autres solutions, le problème du terminal idoine est résolu. Et les choses vont aussi s’accélérer, au sens propre comme au sens figuré, avec la 4G”.

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Qui veut payer ? Personne…

“Services, réseaux, terminaux : tout est prêt pour répondre aux derniers nés des besoins et à ceux qui sont à naître ! Le seul problème, c’est que personne ne sait qui va payer !!! L’expérience de l’e-call fut à cet égard instructive. Tout le monde est pour. Mais les assureurs, pourtant très intéressés, ne veulent pas payer. Les constructeurs ne semblent pas non plus prêts à payer. La Commission européenne propose aux opérateurs d’installer une carte SIM dans les voitures. Mais on va ensuite nous reprocher vertement de répercuter ce coût… Donc de quoi sera fait demain ? Je n’en sais rien… Le vrai effort prospectif à fournir est de définir le business-modèle d’avenir. Et par provocation, j’ajoute ceci : et si le téléphone mobile est interdit demain pour des raisons de santé, que ferons-nous ?”.

Pierre Mammet, partner automotive industry chez IBM, prône l’établissement de standards pour agréger des expériences disparates et passer un cap : “S’il est difficile d’avoir des certitudes, on voit tout de même des tendances lourdes se profiler et dans le secteur automobile, la culture relativement conservatrice s’est ouverte au cours des cinq dernières années. Il est vrai que les modèles économiques sont encore mal maîtrisés. Nous sommes face à une somme d’expériences disparates menées partout dans le monde. Pour passer la vitesse supérieure, il faut s’atteler à trouver des standards. Une ligne directrice permettant de fédérer les acteurs. Ce n’est pas une notion-valise : en effet, où en serait le paiement interbancaire sans SWIFT ? Il y a aussi des freins à lever : beaucoup de choses peuvent transiter par le cloud, mais les constructeurs peuvent-ils vraiment déployer des nouveaux services très rapidement ? Si on s’inscrit dans une prospective à plus long terme, on constate que même pour l’automobile, on remonte à l’échelle de la ville. La ville intelligente sera un moteur naturel pour la voiture intelligente. L’exemple-pilote de Stockholm en est une excellente illustration. Avec la mise en place de modèles prédictifs et des outils d’optimisation des flux, 40 % des embouteillages ont été supprimés, avec un gain direct pour la qualité de vie et de l’environnement. Les prévisions se révèlent justes à 98 %. Donc, on sait faire et la technologie est effectivement disponible. Toutefois, le coût d’entrée dans ces nouvelles technologies est très élevé”.

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Pour François Richard, directeur de la division européenne Automotive de Microsoft, le véhicule électrique impose de penser l’automobile différemment et va faire office d’accélérateur de processus : “Le VE va apporter la connectivité au sens large dans le véhicule. Avec le VE, on passe d’un modèle d’achat unique à un modèle d’achat de services intégrés, au-delà du fait que la conception même des voitures change radicalement. Nous ne sommes pas des donneurs de leçons, mais force est de constater que le projet Sync de Ford connaît des développements très féconds. Les plates-formes Windows permettent d’héberger et de construire plusieurs services de mobilité et plusieurs constructeurs, comme Toyota, Fiat, Hyundai ou Kia par exemple, les exploitent. Il y a beaucoup de possibilités au niveau de la liaison de véhicule à véhicule, de l’interface homme-machine (reconnaissance vocale, reconnaissance gestuelle de type Kinect etc.) et le cloud permet aussi de penser à des services supplémentaires. L’important est de ne pas continuer à penser la voiture connectée en silos, diagnostic, e-call, connexion médias etc., sinon, nous n’avancerons pas rapidement… Et il faut travailler à mettre le rythme de développement au diapason des cycles industriels des constructeurs. Mais une chose est sûre : le futur nous réserve de belles surprises ! Qui aurait prédit que chacun d’entre nous allait dépenser plusieurs dizaines d’euros par mois pour un téléphone portable et ses connexions ?”.

Stéphane Evanno, responsable de l’activité VE et électro-mobilité France de Bosch, conclut la journée en évoquant l’expérience-pilote lancée par son groupe à Singapour autour du véhicule-électrique, avec des prolongements attendus en smartgrid : “Le véhicule, objet de mobilité, s’intègre dans une ville connectée, en l’occurrence un grand centre urbain. Toutes les composantes de l’écosystème sont reliées entre elles par des services d’électro-mobilité. En essayant de voir loin car quand on parle de VE, on est en train de regarder par le trou d’une serrure derrière laquelle se cache une cathédrale ! On entend beaucoup parler d’itinérance, de standards, de nouveaux services, mais ce monde reste à construire dans sa plus large part. A Singapour, la première phase concerne les bornes de recharge et la seconde, un écosystème de plusieurs milliers de véhicules électriques. Nous discutons avec des acteurs très variés pour proposer ensuite des offres et des services novateurs, au-delà de la seule automobile. Il s’agit aussi de voir comment on peut monétiser une telle plate-forme, notamment par le biais d’applications. Nous sommes convaincus que la possibilité de mutualiser les données va générer de la créativité servicielle. Rendez-vous dans un an pour voir ce qui s’est matérialisé, sachant que nous aurons aussi une plate-forme similaire transfrontalière entre France et Allemagne”.

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