Monica Sipsz : Passion caractérisée !

...par la compétition automobile.

"La compétition, c'est mon amore !" Voilà dévoilée, dans un mélange de français et d'italien teinté d'un délicieux accent, la phrase qui définit peut-être le mieux la relation qu'entretient Monica Sipsz avec l'automobile. Depuis ses débuts de copilote, dans le baquet de droite d'une Alfa 33, jusqu'à la direction de l'écurie AutoDelta Squadra Corse, elle est restée fidèle à elle-même et à sa passion, réussissant ainsi à s'imposer, mais surtout à gagner. En effet, comme d'autres voitures rouges dirigées par un certain Jean Todt, dont elle avoue admirer le travail, celles de Monica triomphent depuis quatre années (2000-2003) sur les circuits de l'Europe entière. Le team manager Monica est donc aux anges, mais ces résultats sont le fruit d'un travail insensé et titanesque mené depuis plus de dix ans. En effet, dès l'année 1991, Monica fonde avec son mari, Mauro, le Team Nordauto qui a été intégré, ainsi que l'équipe des ex-Abarth de Turin et d'Alfa Corse de Milan, à Ntechnology depuis le 1er juillet 2001. Aujourd'hui, cette nouvelle structure, Ntechnology, prépare l'ensemble des voitures de compétition des marques du groupe Fiat. Avant d'en arriver là, Monica a commencé par faire ses premiers pas de directeur sportif au côté d'un équipage féminin, composé notamment de Tamara Vidali, qui a porté haut les couleurs, forcément rouges, de l'Alfa 33 QV dans les rallyes italiens. Un apprentissage rapide et efficace qui propulsera Monica et son équipe Nordauto dans le supertourisme italien en 1994.

Monica Sipsz, chef respecté et craint de l'armada rouge, mais aussi "mamma" de cette grande famille

Une entrée remarquée dans ce monde macho qui la conduisit, dès l'année suivante, en 1995, à la tête de l'écurie officielle Alfa dont les pilotes d'alors étaient Michele Alboreto et Giancarlo Fisichella. Rien n'effraie donc notre directeur sportif qui reconnaît toutefois avoir connu des moments difficiles. "Voir une femme diriger une équipe si importante faisait beaucoup parler, certains pensaient que le couple femme/ compétition était voué à l'échec. Je devais sans cesse démontrer mon professionnalisme et faire mes preuves", se souvient Monica Sipsz. Les choses ont bien changé aujourd'hui dans le paddock ou sur le muret des stands : Monica est désormais respectée de tous et son travail ne souffre d'aucune suspicion. Mais cette réussite trouve aussi un de ses fondements dans la personnalité même de cette Italienne : Monica Sipsz, c'est une main de fer dans un gant de velours.
"Avant d'arriver chez AutoDelta, je connaissais déjà la réputation de femme de caractère de Monica", lance Augusto Farfus, pilote brésilien qui a rejoint l'écurie cette année. "Après l'avoir rencontré mon jugement est resté le même. Pour travailler dans un monde composé presque exclusivement d'hommes, il faut une grande poigne et un caractère d'acier. Monica possède ces qualités qui, avec son grand dynamisme, en font un team manager parfait et en mesure de gérer au mieux les pilotes et toute l'équipe." Un caractère bien trempé que Monica ne renie pas, bien au contraire, car même plus jeune, elle le revendiquait déjà. Un caractère qui a également occasionné quelques joutes verbales avec des commissaires ou des directeurs de course. Mais cette fermeté indispensable dans la gestion d'une écurie n'est pas le seul atout de cette séduisante Italienne. Selon Davide Mastinu, le chef d'atelier du département course d'Autodelta, qui travaille avec Monica depuis 1987, "nous vivons dans une équipe où l'aspect humain est très important. Grâce à elle, les rapports entre les membres de l'équipe sont ceux d'une grande famille, où "mamma" Monica sait doser avec talent la sévérité lorsqu'elle est nécessaire et alléger la tension dans les moments difficiles." Un point de vue que partage également Fabrizio Giovanardi, qui a remporté pas moins de 6 titres sous la houlette de Monica depuis 1998. "Après tant d'années, deux types de rapports, amicaux et professionnels, se sont instaurés avec Monica. Elle est très forte dans la manière d'aborder ces deux aspects, montrant un caractère doux dans les moments de la vie normale et de la fermeté au bord de la piste. Gérer autant de personnes pour former une équipe n'est jamais facile, poursuit Fabrizio Giovanardi, et ce que j'admire chez Monica est sa capacité à prendre sans hésitation les décisions importantes, dans les bons et les mauvais moments, rassurant ainsi tout le monde. Et dans la course, c'est fondamental !"

Elle est le ciment de cette équipe, alchimiste en quête permanente du meilleur accord

Cette amoureuse de la compétition fait tout pour gagner et son enthousiasme, son dynamisme sont communicatifs. "La meilleure qualité de Monica est sans aucun doute le dynamisme dont elle sait toujours faire preuve, souligne Marco Calovolo, responsable d'exploitation piste, tant pendant les courses que lors des moments cruciaux passés à l'atelier pour la préparation de celles-ci. Dans ces moments apparaît alors toute sa méticulosité et son sens du détail." Monica Sipsz n'est donc pas qu'un caractère, c'est aussi une formidable gestionnaire capable de motiver, de valoriser et de partager. En effet, la discussion avec les pilotes et les techniciens est impérative pour fédérer les énergies. "Monica possède de grandes capacités à communiquer et c'est ce caractère bien trempé qui lui permet de diriger l'équipe nombreuse qu'est AutoDelta", affirme Gabriele Tarquini, le champion 2003 en ETCC au volant de la 156 Super 2000. "Et la communication est indispensable pour maintenir l'unité de toute une équipe et marier des caractères souvent bien différents." L'alchimie fonctionne depuis de nombreuses années, mais la remise en cause est permanente. "Certes, nous avons gagné de nombreux titres européens, tant Constructeur que Pilote, ces quatre dernières années, confie Monica, mais la conquête de chacun d'eux a été quelque chose de difficile, et cette année 2004 l'est encore plus." Le directeur sportif Sipsz a du pain sur la planche et va une nouvelle fois devoir déployer tous ses atouts et toute son énergie pour faire flotter haut les couleurs d'Alfa Romeo. Mais à côté de Monica Sipsz le team manager, qu'en est-il de Monica Sipsz, la femme ?  

Un emploi du temps ultra chargé dont elle ne veut rien changer

"Je manque cruellement de temps, explique Monica. De mars à octobre, durant le championnat, je passe la majeure partie de mon temps sur les circuits et, durant l'hiver, nous effectuons de nombreux tests en vue de la saison suivante." Avec un tel emploi du temps, Monica Sipsz avoue que les relations avec sa famille ou ses amis sont parfois difficiles, d'autant que la cuisine n'est pas son fort ! "Je ne fais jamais la cuisine. Si ! Peut-être un œuf à la coque…", plaisante-t-elle. Au-delà de l'anecdote, quand bien même elle aimerait cuisiner, elle n'en aurait pas le loisir. Près de dix mois par an, en effet, elle sillonne l'Europe, de l'Espagne à l'Angleterre, de la France à la République tchèque, et même un peu plus loin encore pour la dernière manche du championnat ETCC à Dubaï dans les Emirats arabes unis ! Heureusement, les manches italiennes de Monza et d'Imola lui évitent le mal du pays ! Quoi qu'il en soit et malgré les contraintes, Monica Sipsz ne regrette rien et souhaite rester le plus longtemps possible dans la compétition automobile. "Je ne lâcherai pas l'automobile, assène-t-elle, j'évoluerai peut-être dans l'équipe, mais je ne quitterai jamais ce monde."

 Christophe Jaussaud