L’élargissement de l’offre
L'entrée en vigueur en septembre prochain de la norme Euro 5, encore plus restrictive que la norme Euro 4 en matière d'émissions (notamment au niveau des NOx qui devront être réduits de 25 % tant pour l'essence que pour le Diesel, et avec l'arrivée d'un piège à particules pour les moteurs essence à injection directe fonctionnant en mélange pauvre), ne changera pas grand-chose au fond. Comme nous l'avons déjà évoqué dans nos colonnes, qu'il s'agisse des pots catalytiques 3 voies ou des filtres à particules (FAP), les systèmes de post-traitement demeurent sensibles à certains composants intimement liés au lubrifiant. Il en va ainsi du phosphore, fortement soupçonné de ralentir l'activité des pots catalytiques trois voies en fonction du niveau de sa teneur. Problème, toutefois. Ce composant a priori nocif doit toujours figurer dans le lubrifiant pour le rôle qu'il joue en matière d'anti-usure. De son côté, le FAP est sensible aux cendres, c'est-à-dire les résidus de combustion issus d'une calcination complète du lubrifiant ; d'où la nécessité de réduire la teneur en cendres pour augmenter sa durée de vie. Aussi, pour les huiles adaptées aux moteurs avec FAP, les spécifications reposent sur quatre niveaux validés par l'ACEA en octobre 2007, sous les dénominations C1, C2, C3 et C4. Celles-ci correspondant à des huiles "Low SAPS" et "Mid SAPS" (SAPS pour Sulfated Ash, Phosphore et Soufre). Les premières ont une teneur en cendres inférieure à 0,5 %, les secondes une teneur en cendres inférieure à 0,8 %. Il faut savoir que le niveau C4 (haute viscosité HTHS comme C3 et teneur en cendres sulfatées réduites) est apparu en octobre 2007 à la demande de Renault, en vue de répondre aux caractéristiques du nouveau moteur de la Laguna. Autre précision. Les catalyseurs De-NOx destinées aux futures motorisations essence ou Diesel sont pour leur part sensibles au soufre, qui se positionne comme un véritable polluant à leur égard. "Autrement dit, ce type de catalyseur ne peut être utilisé de façon satisfaisante tant que nous ne sommes pas en mesure de réduire fortement le soufre de la chambre de combustion, note François Bénard, responsable développement produits Automotive au sein de Total Lubrifiants. Cela dit, le soufre doit d'abord être réduit dans les carburants, premiers pourvoyeurs de ce corps non métallique". Si la teneur en soufre des carburants se situe aujourd'hui à 50 ppm, l'objectif dans un futur proche est de descendre à 15 ppm.
En fonction de leurs besoins, les constructeurs s'orientent vers telle ou telle technologie
Actuellement, et partant du principe qu'ils doivent tenir compte du phénomène de dilution par le carburant, les constructeurs s'orientent donc vers différentes technologies, à commencer par la haute ou basse viscosité HTHS (viscosité à 150°C), c'est-à-dire des lubrifiants orientés économie de carburant ou pas, en fonction de la définition et du dimensionnement du moteur. De plus, en fonction du système de post-traitement utilisé, ils peuvent choisir entre deux niveaux de cendres sulfatées, c'est-à-dire du Low SAPS ou du Mid SAPS. Patrick Thevenard (Total Lubrifiants) résume : "Indépendamment de l'ACEA qui se positionne comme une normalisation européenne, la plupart des constructeurs élaborent des stratégies techniques pouvant privilégier le FAP à un certain moment, les véhicules hybrides à d'autres, etc. Des éléments qui font que tel ou tel constructeur peut-être amené à "sévériser" la norme ACEA au niveau de certains tests pour éviter les "désordres" amenés dans la lubrification. Les biocarburants en donnent un bel exemple. Aujourd'hui, un constructeur qui déciderait de communiquer énormément sur ceux-ci devrait immédiatement résoudre deux problèmes : ceux de la dilution et de l'oxydation de l'huile". Dans ce contexte, et ceci à titre d'exemple, Ford opte pour le niveau C1, tandis que PSA plébiscite le niveau C2 sur tous les moteurs HDi ; ces deux niveaux correspondant également à des huiles positionnées "Fuel Economy". De leur côté, les constructeurs allemands (Volkswagen, BMW, Mercedes et Opel) ont opté pour le niveau C3, tandis que Renault s'est logiquement orienté vers le niveau C4. En outre, le fait marquant de la fin d'année 2008 est la mise en place par le constructeur français de ses homologations spécifiques issues de son propre cahier des charges, dans lequel figurent notamment les tests LLR (pour Long Life Renault). Concrètement, ces normes basées sur l'ACEA mais plus exigeantes afin de répondre à Euro 5, comportent deux niveaux : ACEA A3/B4 pour les dénominations Renault RN0710/RN0700 et ACEA C4 pour la dénomination Renault RN0720. En gros, alors que la première s'adresse aux véhicules de la marque équipés de moteurs essence et Diesel, la seconde s'adresse aux véhicules à moteur Diesel équipés d'un FAP. En outre, et ce n'est pas le moins important, la démarche propre à Renault a fait des émules, dans la mesure où PSA va également lancer ses propres normes… incessamment sous peu ! Une véritable révolution, s'il en est. "Le point commun à la démarche des deux grands groupes est un désir flagrant d'obtenir des niveaux d'anti-oxydation très importants, explique François Dol (Motul). Cette stabilité à l'oxydation avec à la clé une viscosité constante, représente un point crucial, pas si évident que cela à atteindre au demeurant". Renseignements pris, le cahier des charges PSA s'appuierait sur quatre "specs" d'huile de service : B712291 correspondant au niveau ACEA A2/B2 et API SLCF, B712292 (ACEA A3/B3 ou A3/B4), B712293 (ACEA A3/B4 ou A5/B5) et B712288 (ACEA C2 ou C3). La première s'adresserait à des véhicules d'anciennes générations, la deuxième représenterait le niveau minimum pour l'année modèle 2005, la troisième conviendrait aux véhicules récents à intervalles de vidange augmentés et enfin, la quatrième représenterait le niveau à teneur réduite en cendres sulfatées, phosphore et soufre (Mid SAPS), désormais obligatoire pour les Diesel munis d'un FAP. En outre, comme pour Renault, aux spécifications basiques s'ajoute toute une batterie de tests en laboratoire ou sur bancs moteurs. François Bénard rappelle qu'une quarantaine de normes différentes existent en Europe. "Certains constructeurs ont cinq niveaux de normes", dit-il. Dans ce contexte, les remises à niveau sont effectuées quasiment en permanence pour l'ensemble des acteurs de la profession. "Une situation qui nous a amenés il y a déjà un bon moment à créer une cellule de "veille technologique" dont le rôle est d'être en relation avec les constructeurs pour s'enquérir des développements en cours et offrir une réponse adaptée, explique Thierry Martin (Motul). Notre objectif est de disposer d'une gamme collant le plus possible à l'actualité". Du sur-mesure en quelque sorte, dicté non pas par un effet de mode, mais bel et bien par les évolutions de la législation en termes d'environnement, cadre dans lequel figure la nouvelle norme Euro 5.
L'information demeure la seule réponse face à l'élargissement de l'offre
Cela étant, il n'en reste pas moins que le grade majoritaire aujourd'hui en termes de politique constructeurs est le 5W30 (le grade 10W40 tenant toujours la corde au niveau de la plus grande partie du parc roulant). Bien sûr, le grade 0W amène un plus en termes de démarrage à froid, raison pour laquelle il est surtout plébiscité par les pays scandinaves. Olivier Gasbarian (BP France) affine cependant le propos : "Jusqu'à maintenant, le souhait d'associer au lubrifiant la notion d'économie d'énergie était plutôt réservé au monde professionnel, dit-il. Désormais, il arrive jusqu'au consommateur final".
Reste que, le sur-mesure, source de complexité du marché, ne fait pas forcément les affaires du professionnel et du consommateur final, qui voient le marché "exploser" en termes de multiplicité des produits. En effet, dans un premier temps, les huiles spécifiques étaient traitées par les réseaux constructeurs, c'est-à-dire les concessionnaires, voire les agents. "Au niveau de l'affectation des produits, ceux-ci disposent de certaines facilités, dans la mesure où, généralement, ils ne gèrent que les véhicules de leur marque, rappelle Thierry Martin. Seul problème, au fil des ans, le parc de véhicules concernés vient se faire entretenir dans les réseaux indépendants. Multimarques par excellence, ceux-ci demeurent démunis face à cette situation puisque, à la contrainte de la largeur de gamme nécessaire, s'ajoute la connaissance technique". Raison pour laquelle l'IG a créé son site conseil (www.motul.fr) dès 2006. Spécialement dédié aux professionnels clients de la marque, cet espace convivial leur permet à partir d'un véhicule donné de connaître avec précision le type de lubrifiant utilisé (normes ACEA et constructeurs) ainsi que la capacité du carter d'huile, élément de la plus haute importance dans le cadre de la vidange. En outre, le service informatique indique également le type d'huile de boîte de vitesses (manuelle ou automatique), de direction assistée, de réfrigérant, sans oublier le liquide de frein. Inutile de préciser que ce site fonctionne désormais à plein régime, avec plus de 300 000 hits (requêtes) par mois dont 30 % pour la France. "Accessoirement, cet outil fort apprécié de la clientèle nous a permis de faire des conquêtes", souligne Thierry Martin.
ZOOMCastrol avec Honda "Au fil des ans, et encore plus dans ce contextedifficile, précise Olivier Gasbarian, directeur marketing et technique au sein de BP France, le principal enjeu pour un pétrolier est de développer des partenariats avec des constructeurs. Ceux-ci débouchant sur des accords de préconisation avec en sus, la visibilité et la notoriété de la marque. Raison pour laquelle Castrol avait déjà tissé des liens étroits avec BMW, le groupe Volkswagen, Ford et Volvo, notamment. Très récemment, la marque mondiale d'origine britannique a conclu un accord de partenariat avec Honda France. Celui-ci permet au réseau de concessionnaires d'avoir accès à une gamme de produits répondant aux besoins de la majorité du parc roulant du constructeur japonais. Trois "propositions produit" majeures sont initialement faites au réseau : SLX Professional Powerflow C3, un produit OW30 premium axé sur les économies de carburant, Magnatec Professional B4, un produit 5W40 de dernière génération couvrant une grande partie des spécifications moteur de tous les constructeurs, et enfin, GTX Professional A3, produit 10W40 d'appel, pour une clientèle très large. Au-delà de cet aspect, ce partenariat va permettre au réseau Honda de bénéficier de services complémentaires, de nature commerciale (programmes de vente afin de développer le CA des concessions…), de communication, de formation et environnementale (solutions globales "clés en mains" de collecte et de traitements des déchets…) ; le tout dans le cadre de valeurs communes, telles la passion et l'innovation. |
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