Alain Descat, Alfa Romeo : "Nous comptons doubler nos ventes en 2025"

Le Journal de l'Automobile : Avec une progression de 74 % sur les trois premiers mois de l'année 2025, Alfa Romeo, avec Jeep, est la seule marque du groupe Stellantis à connaître des immatriculations dans le vert. Quelle est votre analyse de la situation ?
Alain Descat : Effectivement, nous avons enregistré une importante progression depuis le début du premier trimestre 2025. Nous avons enregistré 2 088 immatriculations, soit une part de marché de 0,5 %. Cette tendance avait déjà été observée en 2024 : Alfa Romeo avait mis à la route 4 373 voitures, en croissance de 11,9 %. Le succès tient en un mot : Junior. Lancé depuis septembre 2024, avec une présentation au public au dernier salon de Paris, il rencontre un francs succès. Nous avions d'ailleurs enregistré à l'occasion du Mondial, 200 commandes. Avec le Junior, nous retrouvons des volumes que nous n'avions pas connu depuis de très nombreuses années.
J. A. : Depuis le début de l'année, le Junior a représenté près de 75 % des ventes d'Alfa Romeo en France. N'est-ce pas un danger pour la marque de reposer sur un seul produit ?
A. D. : Le Junior permet de faire revenir du monde dans les concessions Alfa Romeo. La voiture crée un halo autour des autres modèles de la gamme. Mais vous avez raison, Alfa Romeo a souvent été une marque qui fonctionnait par à-coups. Au-delà du Junior, notre enjeu est donc de (re)construire la marque et de pérenniser les ventes.
Nous devons faire revivre le Tonale, car il est le pivot de la gamme.
J. A. : Comment pérenniser l'activité ?
A. D. : En développant notamment notre communication. Nous lançons une campagne en télévision pour installer la marque et lui redonner de la notoriété. Mais nous nous appuyons également sur des stratégies différentes. Nous allons ainsi organiser des évènements avec les clubs d'alfistes, il y en a plus d'une vingtaine en France, et nous avons mis en place plus de 600 ambassadeurs au service de marque. En échange, ils bénéficient de remises tarifaires sur des produits tout comme ceux qu'ils parrainent.
Le Tonale souffre de la nouvelle fiscalité sur les PHEV. ©Alfa Romeo
J. A. : Et concernant le portefeuille produits ?
A. D. : Nous devons faire revivre le Tonale, car il est le pivot de la gamme. Il sera d'ailleurs restylé en fin d'année. Aujourd'hui, le Tonale souffre (-47,7 % sur les trois premiers mois 2025, NDLR), car nous faisions beaucoup de PHEV, une motorisation qui aujourd'hui est en baisse pour des raisons fiscales. Nous allons donc mettre des moyens commerciaux pour soutenir les ventes, mais également sur l'occasion. Quant à la Guilia et au Stelvio, nous nous concentrons sur l'offre diesel qui reste encore pertinente dans certains cas, notamment auprès des flottes, d'autant plus nos diesels sont très peu malusés.
Le canal BtoB représente 11 % de nos ventes, nous avons pour ambition de monter rapidement à 20 %
J. A. : Quelle est votre stratégie sur le marché BtoB ?
A. D. : Nous sommes trop faibles sur ce canal. Le marché BtoB ne pense pas instinctivement à Alfa Romeo, car la marque est souvent considérée comme trop sportive ou trop chère. Nous ne sommes pas dans la shopping list des moyennes et grandes entreprises, alors que pour les petites entreprises, nous pouvons compter sur le réseau qui travaille auprès des acteurs économiques locaux. Le Junior a un très gros potentiel sur le marché BtoB. Aujourd'hui, ce canal représente 11 % de nos ventes, nous avons pour ambition de rapidement monter à 20 %, puis à terme, à 30 %, ce qui est la moyenne des marques premium.
J. A. : Revenons au Junior. Qui sont les clients ?
A. D. : Nous réalisons un taux de conquête de 70 %, ce qui est un excellent résultat. Surtout, nous faisons revenir d'anciens clients alfistes qui avaient quitté la marque après l'arrêt de la Mito en 2018. Ce qui montre qu'Alfa Romeo a toute sa légitimité sur le segment B. Nos autres clients viennent du premium, notamment de chez Mini, et nous reprenons aussi bien des berlines que des SUV. Dans le mix produit, 25 % des ventes de Junior sont électriques, une part de marché qui montre qu'Alfa Romeo a réussi sa transition vers l'électrique. La gamme est actuellement complétée de la version Veloce affichant 280 ch, une offre assez unique sur le marché qui couvrira 5 à 10 % des ventes tandis que la version Q4 représentera dans notre prévisionnel 15 % du mix.
Le Junior représente 75 % des ventes d'Alfa Romeo en France sur les trois premiers mois 2025. ©Alfa Romeo
J. A. : Comment se porte le réseau ?
A. D. : Notre réseau affiche la meilleure rentabilité des marques du groupe Stellantis sur le véhicule neuf.
Sur le véhicule neuf, la rentabilité d'Alfa Romeo dépasse aujourd'hui les 2 000 euros.
J. A. : Meilleure que celle de Jeep, dont la marge unitaire pour l'ensemble de la gamme Jeep est passée, en moyenne, de 558 euros en 2023 à 1 755 euros en 2024 ?
A. D. : Je ne souhaite pas commenter ces chiffres, mais je peux vous dire que celle d'Alfa Romeo dépasse aujourd'hui les 2 000 euros. La partie VN dégage de la rentabilité, sachant que les autres activités sont mutualisées avec les autres marques des distributeurs.
J. A. : Mais le parallèle avec Jeep est nécessaire car c'est, avec Alfa Romeo, la seule marque du groupe Stellantis qui progresse...
A. D. : Vous avez raison. Dans le deux cas, les marques se sont appuyées sur le lancement de deux produits avec des identités fortes. Nous le voyons d'ailleurs dans le réseau. Tout en respectant les univers, nombreux sont les concessionnaires qui distribuent les deux marques dans le même showroom. Et bien que nous demandons un vendeur dédié, dans de nombreux cas, c'est le même qui est en charge des deux marques. Si nous ne sommes pas capables de quantifier la passerelle entre le Jeep Avanger et l'Alfa Romeo Junior, nous observons néanmoins que ces deux modèles enregistrent de fortes progressions.
J'observe que nous avons depuis peu des demande de panneaux, ce qui montre que la marque a retrouvé son dynamisme.
J. A. : Quelle est la structure du réseau ?
A. D. : L'empreinte du réseau est encore très marquée par les ex-FCA. Nous disposons de cent points de vente dont vingt-sept distribuent toutes les marques de l'ex groupe FCA (Fiat, Fiat Professionel, Abarth, Alfa Romeo et Jeep - sauf Lancia). Nous comptons encore deux sites 100 % Alfa Romeo, cinq sites Alfa Romeo et Jeep et deux sites Alfa Romeo, Jeep et Lancia. Notre réseau après-vente, quant à lui, s'appuie sur 150 représentations. J'observe que nous avons depuis peu des demandes pour prendre le panneau, ce qui montre que la marque a retrouvé son dynamisme.
J. A. : Estimez-vous que c'est un bon niveau de couverture ?
A. D. : Par rapport à notre volume, oui. A titre de comparaison, au sein du groupe Stellantis, DS Automobiles dispose de 165 points de vente, ce qui en fait le réseau premium le plus important en France, tandis que les marques allemandes s’appuient chacune sur environ 150 adresses. Pour être complet, il nous manque l'Est parisien à couvrir.
J. A. : Quelles sont vos ambitions pour 2025 ?
A. D. : Si nous continuons sur cette même dynamique, nous visons 8 000 immatriculations cette année. Cela sera le double par rapport à l'année 2024.
J. A. : Quelle est la suite du plan produits ?
A. D. : A la fin de cette année, nous allons présenter la nouvelle génération du Stelvio, pour une commercialisation en 2026. Le Stelvio sera le premier véhicule reposant sur la plateforme STLA Large à être commercialisé en Europe, ce qui est tout un symbole. La nouvelle Guilia sera quant à elle dévoilée en 2026 pour une commercialisation un peu plus tard.
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