Olivier François, Fiat : "Ce que nous voulons faire en Europe"
Quel avenir pour Fiat en Europe ? La réponse à cette question se trouve en partie sur le stand de la marque italienne à Genève. Avec le concept Centoventi, elle a exposé aux yeux du monde sa vision de la mobilité électrique du futur. Une approche innovante sur laquelle Olivier François, le directeur de Fiat, est revenu en détail pour le Journal de l’Automobile.
En guise de préambule, le dirigeant a tenu à exposer la stratégie à venir du constructeur en Europe qui devra se plier, comme ses concurrents, à l’exercice de l’électrification s’il veut échapper à de lourdes amendes. A l’entendre, l’équation ne sera pas si simple à résoudre. A tel point que la présence même de Fiat en Europe à moyen terme aurait pu être menacée.
" En tant que groupe FCA, dont l’essentiel des revenus et des marges sont réalisés en Amérique du Nord avec Jeep, Dodge et RAM, nous nous retrouvons à la croisée des chemins comme d’autres constructeurs. Qu’est-ce que l’on fait en Europe ? GM a répondu à cette question en vendant Opel. Ce n’est pas ce que nous voulons faire, nous voulons garder nos racines, même si l’Europe, où les marges sont réduites, ne participe pas de manière très enthousiasmante à l’EBITDA du groupe FCA. Il n’y a aucune logique rationnelle qui nous incite à investir sur ce marché où les produits coûtent plus cher à développer, plus cher en R&D, plus cher en tout ", développe Olivier François.
Plus de VE à compter de 2023 ?
Le patron de Fiat fait surtout allusion aux futurs véhicules électriques qui devront être amenés sur le marché afin d’être en conformité avec les objectifs de réduction de CO2 imposés par l’Europe. Et aux embuches potentielles qui les accompagneront. Deux approches sont donc à l’étude, comme l’explique Olivier François : "Nous pouvons atteindre ces objectifs en vendant des voitures premium, c’est pourquoi la future 500, qui sera présentée l’an prochain à Genève, sera uniquement électrique (NDLR : la 500 actuelle reste au catalogue mais va évoluer vers l'hybridation). Mais soyons clairs : nous sommes tous est en train d’imaginer que nous allons vendre des tonnes de petites voitures électriques à 30 000 euros. Nous n’allons pas y arriver. Si chaque constructeur doit faire entre 15 et 20 % d’électriques, cela va représenter des millions de voitures. Je ne suis pas certain qu’il y ait des millions de clients qui soient intéressés vu les prix pratiqués. Nous allons donc nous battre sur les prix et nous n’allons pas gagner d’argent. C’est un problème".
La future Fiat 500 électrique sera donc une partie de la réponse. Cette proposition devrait permettre au groupe d’être dans les clous des objectifs CO2 au maximum jusqu’en 2022. Au-delà, de plus gros volumes électriques devront être impérativement réalisés. "Nous allons devoir faire face en 2022/2023 à un vrai challenge pour nous tous, constructeurs. La différence entre les marques qui vont gagner beaucoup d’argent et celles qui vont en perdre se fera sur leur capacité à mettre sur le marché des centaines de milliers d’électriques. Certains y laisseront leurs marges, d’autres au contraire en feront un business rentable. Pour cela, il faut inventer une nouvelle équation de valeur", confie l’ex-bras droit de Sergio Marchionne. D’où le concept Centoventi, une vision de l’automobile électrique accessible et rentable.
Pour Olivier François, la Centoventi est un clin d’œil à la Panda des années 80, " la Panda des temps modernes ". L’idée est tout d’abord de proposer un produit financièrement accessible en version de base, esthétiquement attractif et si possible tendance. Le deuxième point consiste à offrir plusieurs choix de batteries. La Centoventi embarque d’emblée un seul module offrant 100 kilomètres d’autonomie. Si une autonomie plus grande est nécessaire, il sera possible d’acheter ou louer jusqu’à 3 batteries supplémentaires, avec à chaque fois 100 kilomètres d’autonomie en plus. " Il sera possible de les ajouter très facilement, même après l’achat, grâce à des rails, directement chez le concessionnaire", précise Olivier François. Le concept peut également embarquer un 5e module, sous le siège conducteur. "Au lieu de perdre de l’argent en vendant 300 ou 400 kilomètres d’autonomie, je vais vous donner ce dont vous avez besoin et vous pourrez faire l’upgrade quand vous voudrez, ajoute le dirigeant. Je vais ainsi maximiser ma marge".
L’hybride arrive
Un autre moyen de rentabiliser le produit seront les multiples possibilités de personnalisation et les ventes d’accessoires (porte-gobelet, porte-bouteille, boîte à gant…). La Centoventi joue également la carte connectée avec une version de base permettant de placer un smartphone au cœur du système ou une tablette en combinaison avec l’écran principal de 10 pouces. L’autre solution est d’opter pour la version dotée d’un écran de 20 pouces offrant toutes les fonctions. Reste maintenant à savoir si un tel modèle arpentera les routes. "Nous sommes en train d’étudier tout ça pour voir s’il y a un business model. Nous allons prendre notre décision rapidement, dans les prochains mois", assure Olivier François.
Outre la 500 électrique et l’éventuelle Centoventi, l’avenir de Fiat en Europe passera également par une vague d’électrification. La 500 actuelle va rester au catalogue en mild hybrid, idem pour toute la gamme actuelle. Fiat étudie également la possibilité de lancer des modèles hybrides rechargeables, notamment la 500X, à l'image de son cousin Renegade qui vient de muer en PHEV.