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Nouvelles mobilités : grand rétropédalage dans les achats de vélos

Publié le 11 juillet 2024

Par Damien Chalon
4 min de lecture
Zoom de l’Arval Mobility Observatory – En plein boom après l'épisode Covid, les ventes de vélos sont aujourd'hui à la peine. Ce repli inquiète la filière française qui a massivement investi dans sa capacité de production.
Tribune Arval Mobility Observatory
En 2023, il s’est vendu 11,7 millions de vélos dans l’Union européenne et au Royaume-Uni, soit 20 % de moins que l’année précédente. ©AdobeStock-Oranee

L’engouement du public sur les routes du Tour de France est, chaque année, plus intense. La Grande Boucle est d’ailleurs le troisième événement sportif le plus suivi dans le monde derrière la Coupe du monde de football et les JO d’été. Pour autant, ce spectacle n’entraîne pas (ou plus) de recrudescence d’achats de vélos par les Français, une fois l’épreuve passée. On pourrait même dire que, quatre ans après la pandémie, le soufflé est retombé pour les deux-roues.

 

Le phénomène est général dans les pays. L’industrie européenne du vélo n’y va pas par quatre chemins : après une mauvaise année 2023, elle qualifie 2024 de nouvelle "annus horribilis" pour son activité. En 2023, il s’est en effet vendu 11,7 millions d’unités dans l’Union européenne et au Royaume-Uni, soit 20 % de moins que l’année précédente. Cette contreperformance a pris de court l’ensemble des industriels, qui s’étaient habitués à des croissances à deux chiffres durant la pandémie et qui avaient investi en conséquence pour relocaliser leurs productions en Europe.

 

Ceux qui préfèrent voir le verre à moitié plein diront que les vélos à assistance électrique, eux, tirent leur épingle du jeu, avec une baisse de la demande limitée à -7,3 % (5,1 millions d’unités). Et que, par rapport à l’avant-Covid, les ventes de vélos électriques en Europe ont progressé de 50 %.

 

Le problème principal de l’industrie européenne aujourd’hui, ce sont les stocks d’invendus massifs, qui mettent en péril la rentabilité des distributeurs et des fabricants. "L’industrie allemande est assise sur un stock de 1,45 million de vélos invendus", rappelle cette semaine le Financial Times (1). Signe de la baisse de régime du secteur, le grand salon professionnel Eurobike de Francfort enregistre une baisse des exposants de 5 % cette année.

 

Dans ces conditions, que peut espérer l’industrie française du vélo qui vient de signer un contrat de filière avec l’État. Les objectifs à 2030 sont plus qu’ambitieux avec deux millions d’unités produites dans les différentes usines de l’Hexagone, dont 1,4 million dès 2027. Ne voit-on pas trop grand si les consommateurs, in fine, ne se montrent pas aussi empressés que prévu pour changer leur deux-roues vieillissant ou acquérir un premier modèle à assistance électrique ?

 

Là encore, les plus optimistes diront que les conditions sont réunies pour un rebond du marché en 2025. En France, les trajets domicile-travail se font davantage en vélo, poussés par les incitations telles que le forfait mobilité durable (FMD) ou les pass mobilités.

 

Une étude de McKinsey prédit pourtant un bel avenir pour les vélos électriques, avec une croissance exponentielle en Europe, et un chiffre d’affaires de 100 milliards d’euros.

 

Reste à savoir si cette croissance sera bénéfique pour les industriels tricolores et si, d’une façon plus générale, les investisseurs financiers seront toujours au rendez-vous pour soutenir l’industrie. Selon l’étude de la Confédération européenne de l’industrie du vélo (Conebi), les investissements sont restés élevés, à plus de 1,9 milliard d’euros en 2023, bien qu’en repli de 9 % par rapport à 2022.

 

Ces investisseurs ont, il est vrai, connu quelques déboires susceptibles de les inciter à se détourner de ce secteur : citons, entre autres, le fonds KKR qui a investi dans le fabricant Accell, valorisé 1,6 milliard d’euros et qui se trouve aujourd’hui à la tête de 1,2 milliard de dettes. Ou encore, le groupe Bruxelles Lambert, qui a misé sur le distributeur en ligne Canyon, valorisé 800 millions d’euros lors de sa prise de participation, mais dont les résultats sont aujourd’hui en baisse, comme le rappelle le Financial Times.

 

Comme pour la voiture électrique, soumise aux mêmes montagnes russes que le vélo en termes d’adhésion des consommateurs, voire d’engouement, puis d’attentisme, la puissance publique a un rôle immense à jouer.

 

Les industriels, dans l’automobile comme dans les deux-roues, sont d’ailleurs unanimes à réclamer un soutien pérenne et lisible pour asseoir le développement et la rentabilité de leurs modèles. À savoir un retour des bonus à l’achat pour les entreprises (supprimé en février dernier) pour les voitures à batteries, et le maintien des dispositifs d’aides à la location longue durée de vélos électriques, qui prend fin au 31 décembre 2024.

 

En attendant, un jour peut-être, des incitations fiscales réservées aux vélos "made in France ou Europe" pour endiguer le flot de deux-roues asiatiques…

 

L’Arval Mobility Observatory 

 

(1). "Cycling industry laments ‘another lost year’ as consumers rein in spending". Financial Times. 6 juillet 2024.

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