Moteur thermique : ne l’enterrons pas trop tôt !
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Quand on analyse l’actualité économique et fiscale des dernières semaines en France, on se dit que les heures de la voiture thermique sont comptées : la loi de Finances pour 2025, publiée au Journal Officiel avec un mois et demi de retard, comporte plusieurs mesures pénalisantes pour cette motorisation, au premier rang desquels la nouvelle "taxe incitative" au verdissement des parcs automobiles.
Cette semaine, l’exécutif a pris de court tous les professionnels avec une réforme des avantages en nature (AEN) qui taxe lourdement les collaborateurs bénéficiant de nouvelles voitures de fonction essence ou Diesel. Pour éviter les effets d’aubaine, la mesure prend effet sur les livraisons réalisées à compter du 1er février 2025.
Et on ne parle même pas des décisions plus anciennes, surtaxant le stationnement des SUV thermiques dans les rues de Paris ou de Bordeaux, ou encore des ZFE qui interdisent les véhicules Diesel anciens dans les rues des grandes villes.
Sur le papier donc, tout semble parfaitement balisé et tracé pour sortir les motorisations thermiques du quotidien des Français. Comment dès lors expliquer que, chez les industriels de l’automobile, de plus en plus de marques jouent la montre, décalent leur transition vers le tout électrique à plus tard, ou même relancent des modèles Diesel sur certains de leurs modèles ?
Cette stratégie de retour en arrière assumée par les plus grands constructeurs intervient alors que la norme européenne CAFE les obligent au contraire à réduire drastiquement leurs émissions de gaz à effet de serre sous peine de lourdes amendes.
Les premiers résultats (sur un petit mois il est vrai) montrent à ce titre que les immatriculations restent pour l’instant très éloignées des objectifs fixés à chaque marque : une étude publiée par Autoactu.com indique que la moyenne CO2 du marché européen était en janvier à 103 g/km pour une cible attendue en 2025 à 93,6 g. A l’heure actuelle, un seul groupe est dans les clous, BMW. Tous les autres affichent des retards plus ou moins importants, la palme revenant à Ford et Nissan.
Chez Stellantis, le retard est de 11 g/km par rapport à sa cible de 96 g, toutes les marques étant dans le rouge. Cela ne l’empêche pas de travailler à une relance de la motorisation Diesel dans son usine de Tremery en Moselle, expliquait il y a quelques jours le quotidien Les Echos.
Le groupe tablait en interne sur 50 % de ventes d'électriques en 2025. Il sera plutôt autour de 20 %. En Allemagne, Porsche assume son virage stratégique alors que ses ventes de véhicules électriques ne décollent pas (12 % de ses livraisons en 2024), et vient d’officialiser son retour au thermique et à l’hybride, avec de nouveaux modèles qui seront disponibles dans les prochains mois.
Une telle volte-face peut s’expliquer par le faible engouement des consommateurs pour les modèles électriques. La part de marché des véhicules à batteries stagne en Europe autour de 15 %, les industriels ne peuvent plus compter sur la hausse des prix de leurs modèles, ils sont donc bien obligés de trouver d’autres sources de revenus pour tenir leurs plans d’investissement et espérer maintenir leur rentabilité. Ils reviennent donc aux "valeurs sûres" du thermique et de l’hybride. C’est ainsi que Renault se retrouve n°2 dans l’hybride derrière Toyota.
Mais pour les consommateurs, ces politiques de "stop & go" ont de quoi les perdre, qu’il s’agisse des ménages mais aussi des entreprises. D’autant que les aides financières à l’électrique sont réduites comme peau de chagrin au nom de la rigueur budgétaire. Faute de savoir à quel moteur se vouer, l’attentisme du marché pourrait donc bien perdurer dans les prochains mois, et les concessionnaires attendre désespérément les clients.
L’Arval Mobility Observatory
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