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Les propositions du Sénat pour sortir de l’impasse des ZFE

Publié le 14 juin 2023

Par Damien Chalon
6 min de lecture
La mission flash menée par le Sénat à propos des zones à faibles émissions a rendu son rapport. Philippe Tabarot, sénateur Les Républicains des Alpes-Maritimes, en a dévoilé les grandes lignes. Il appelle notamment à assouplir le calendrier des restrictions de circulation et à accompagner davantage les ménages modestes dans l’achat de véhicules moins polluants.
philippe tabarot
Le sénateur Philippe Tabarot a présenté les propositions de la mission flash sur les ZFE. ©Sénat

Les zones à faibles émissions sont une poudrière qui ne demande qu’à exploser. Une partie de la classe politique commence sérieusement à s’en inquiéter, à l’instar de la majorité au Sénat dont le rapport de sa mission flash vient d’être dévoilé ce 14 juin 2023.

 

L’intitulé du rapport témoigne de cette préoccupation : "Zones à faibles émissions mobilités (ZFE-m) : Sortir de l’impasse". Le sujet a ainsi été qualifié de "très épineux" par le sénateur Jean-François Longeot (Union centriste – Doubs), qui officie en tant que président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

 

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Philippe Tabarot, sénateur Les Républicains des Alpes-Maritimes et rapporteur de la mission flash, ne s’est guère montré plus optimiste que son homologue sur les conséquences sociales liées aux ZFE si celles-ci continuent à être déployées et appliquées au rythme actuellement prévu.

 

Dans son rapport, le Sénat invite donc à la retenue sur le sujet, tout en gardant à l’esprit les enjeux sanitaires qui ont poussé à la création des ZFE. Ce point fait d’ailleurs l’objet de la première des neuf propositions de la Haute assemblée dans son rapport.

 

Des ZFE en ordre dispersé

 

Les sénateurs mettent sur la table l’idée d’organiser des campagnes d’information nationale et locales pour sensibiliser les citoyens aux risques sanitaires liés à la pollution atmosphérique et aux principales sources d’émissions.

 

Philippe Tabarot pointe toutefois du doigt que les ZFE ne s’arrêtent qu’à une partie du problème, ciblant uniquement les émissions à l’échappement sur la base des vignettes crit’air. Échappent donc à tout contrôle les émissions hors échappement liées aux systèmes de freinage et à l’abrasion des pneus. Sans compter que d’autres secteurs que le transport participent eux aussi à la dégradation de la qualité de l’air.

 

Le point suivant soulevé est l’avancée en ordre dispersé des différentes agglomérations sur le sujet des ZFE. L’une va cibler en priorité les utilitaires légers, une autre les voitures particulières ou les poids lourds, le tout selon un calendrier et des horaires de restrictions de circulation différents.

 

Le Sénat invite donc à homogénéiser les règles, surtout pour les ZFE situées dans une même région. Ce manque de lisibilité risque d’ailleurs de s’accentuer avec la création des nouvelles ZFE dans les agglomérations de plus de 150 000 habitants à compter du 1er janvier 2025.

 

Report des Crit'air 3 à 2030

 

Le rapport préconise d’ailleurs de repousser le calendrier de mise en œuvre des ZFE. Il est proposé un report au plus tard au 1er janvier 2030 de la date butoir de mise en œuvre des restrictions de circulation s’appliquant aux véhicules classés Crit’air 3. Idem pour la création des nouvelles ZFE dans les agglomérations de plus de 150 000 habitants.

 

Au-delà de ces éléments propres à l’application des textes de mise en œuvre des ZFE, le Sénat rappelle que derrière, ce sont potentiellement des millions de Français qui seront pénalisés. "D’ici à 2025, l’interdiction des véhicules classes Crit’air 3 nécessiterait le remplacement de près de 13 millions de voitures, de 2,5 millions de véhicules utilitaires légers et de plus de 230 000 poids lourds", s’inquiète Philippe Tabarot.

 

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Autant dire que le renouvellement de ce parc est impossible si l’on se tient au rythme actuellement prévu des restrictions de circulation. Le Sénat insiste notamment, au-delà de la disponibilité des technologies, sur les problèmes liés au pouvoir d’achat.

 

Le risque est "inévitablement de creuser des fractures sociales et territoriales déjà importantes", mais aussi de "faire porter la contrainte prioritairement sur les ménages les plus modestes", alerte le rapporteur, pour qui les aides actuelles à l’achat sont à revoir.

 

Adapter le bonus et la prime à la conversion

 

S’agissant du bonus, il propose notamment que soit davantage pris en compte le niveau des revenus des bénéficiaires, en portant le plafond maximal de l’aide à 9 000 euros pour les ménages les plus modestes. Philippe Tabarot se penche également sur la question de la prime à la conversion, en proposant d’instaurer une majoration pour les ménages résidant en dehors de la ZFE-m, mais dont le lieu de travail y est implanté.

 

Un autre dispositif mis en avant est celui du prêt à taux zéro, que le Sénat souhaite élargir à tous les véhicules, y compris les poids lourds propres. Afin d’accélérer le renouvellement du parc, le rapporteur souhaite également développer le marché de l’occasion pour les véhicules propres.

 

Ce dernier préconise de rendre tous les véhicules Crit’air 1 d’occasion éligibles au bonus écologique, à la fois pour les personnes physiques et pour les personnes morales. Il propose dans le même temps de tripler le montant de l’aide en vigueur pour l’achat d’une voiture ou camionnette d’occasion, pour passer de 1 000 à 3 000 euros.

 

Un guichet unique pour les aides

 

La question du rétrofit est elle aussi abordée et le souhait est de développer cette nouvelle filière. Cela passerait par une revalorisation de la prime pour les ménages modestes résidant en dehors de la ZFE-m et en rétablissant la possibilité pour les détenteurs de poids lourds d’y recourir.

 

Toujours au niveau des aides, le souhait du rapporteur est qu’un guichet unique soit institué pour l’obtention des aides à l’acquisition de véhicules propres au niveau de chaque région, intégrant les aides nationales et locales.

 

Philippe Tabarot propose pour finir d’agir sur les comportements en développant les offres de transport alternatives à la voiture et en favorisant autant que possible le covoiturage au détriment de l’autosolisme.

 

L’ultime proposition figurant dans le rapport, et non des moindres, est de modifier l’approche stricte liée aux vignettes Crit’air. Le rapporteur propose d’accorder des dérogations pour les véhicules les mieux entretenus. Une sélection qui pourrait s’opérer à l’occasion du contrôle technique. Cela part du principe que la qualité de l’entretien peut avoir des incidences notables sur la quantité de polluants émise par un véhicule.

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