Le Bigster marque-t-il officiellement la fin du "low cost" chez Dacia ?

Si pendant longtemps l’image de Dacia était réduite à celle d’une marque low cost, parfois même un peu "vieillotte", le constructeur roumain a entamé, il y a quelques années, une refonte profonde de son identité, qualifiée de "nouveau départ". Changement de logo, nouvel univers visuel ou encore renouvellement progressif de la gamme… Les équipes de Dacia se sont attelées à changer l’image de la marque, avec l’objectif de la rendre plus moderne, voire même plus "cool".
Et il est vrai que la gamme actuelle n'a plus grand-chose à voir avec la proposition de la Logan, du début des années 2000. Fini le "low cost" tellement vanté aux origines de la reprise de la marque par Louis Schweitzer, alors patron de Renault. Le discours a changé… Car si l’on achetait autrefois une Dacia pour son prix imbattable, elle peut désormais aussi séduire par son look.
"Nous avons beaucoup travaillé sur l’image de marque. En l’espace de deux ans, nous avons changé toute l’identité visuelle de Dacia sur nos outils de communication, mais aussi dans le réseau et sur les voitures. Il est vrai que, si l’on remonte ne serait-ce que trois ans en arrière, et que l’on compare tous ces éléments-là à ceux d’aujourd’hui, l’image de Dacia n’a plus rien à voir. Il y a un sacré chemin parcouru", nous détaille Sylvain Coursimault, directeur marketing de Dacia France.
Le Bigster, nouvelle étape clé du renouvellement de Dacia
Attendu dans les concessions françaises au mois de mai 2025, le Bigster apparaît alors comme une nouvelle étape clé du renouvellement de Dacia. En effet, avec ce nouveau modèle, la marque fait officiellement son entrée sur le segment des C-SUV. Un marché qui était jusqu’alors jugé "inatteignable" par le constructeur, de par la typologie de sa clientèle.
"C’est aussi tout ce travail sur la perception de la marque au sens large, qui nous permet de lancer aujourd’hui une proposition comme le Bigster sur le marché. Nous n’aurions jamais pu lancer un modèle sur le segment des C-SUV sans tout ce travail préparatoire. Le marché ne l’aurait sans doute pas accepté. Le Bigster est donc un tournant dans la stratégie de Dacia", souligne Sylvain Coursimault.
Ici, l’attrait du prix n’est pas suffisant. Car le segment des C-SUV, qui est l’un des marchés les plus disputés en Europe avec plus de 2,8 millions de voitures immatriculées chaque année, demande également un certain nombre de prérequis, notamment au niveau des prestations attendues par la clientèle. Des prestations qui, pour le moment, n’étaient pas proposées au sein de la gamme de Dacia, mais que le Bigster s’apprête à inaugurer.
Le Bigster est équipé en série d’un tableau de bord numérique de 7’’ sur les finitions Essential et Expression ou de 10’’ sur Extreme et Journey. ©Le Journal de l'Automobile-Robin Schmidt
En outre, le nouveau venu de Dacia dispose par exemple d’une climatisation bi-zone, d’un toit ouvrant panoramique, de jantes de 18 pouces, d’un hayon électrique ou encore d’une insonorisation renforcée du véhicule. Tout y est pour être en phase avec les attentes des clients sur le segment C. Même ses tarifs, puisque la version essence du Dacia Bigster est proposée en dessous de 25 000 euros, tandis que les prix de sa déclinaison hybride sont légèrement inférieurs à 30 000 euros.
"Il est vrai qu’historiquement, Dacia est plutôt connue pour être une marque du segment B. Avec le Bigster, il nous paraissait donc important d’arriver avec le bon produit. Ce nouveau SUV coche toutes les cases du segment C, aussi bien d'un point de vue design, que d'un point de vue dimensions et habitabilité intérieure. Il offre ainsi une sensation de confort et d'espace à bord, avec un coffre qui est le plus grand de sa catégorie. Nous avons également revu tous ses équipements, preuve que le Bigster n’est pas juste un Duster XXL, mais une vraie nouveauté", nous glissait alors Xavier Martinet, l’ancien directeur marketing, ventes et opérations de Dacia, lors de la présentation du modèle.
Avant de poursuivre : "Nous avons beaucoup travaillé en amont, notamment en allant à la rencontre des clients, afin de nous assurer que le positionnement du véhicule était le bon, que cela soit au niveau du prix ou des prestations. Et pour autant, nous ne pouvons pas arriver sur le segment des C-SUV en faisant une voiture comme celles des autres. Le Bigster doit être une vraie Dacia, avec le meilleur rapport prix/prestations du marché."
Le marché allemand et les professionnels en ligne de mire
Si le constructeur du groupe Renault veut aller séduire de nouveaux clients avec son Bigster, il souhaite aussi fidéliser sa clientèle actuelle. "Dacia s'adresse aux clients qui ne souhaitent pas mettre tout leur argent dans leur voiture", martèle la marque. Et ils sont de plus en plus nombreux.
Sur 100 acheteurs Dacia, 60 viennent d'une autre marque, 25 avaient déjà une Dacia et 15 possédaient une Renault. Sur 100 clients Dacia, 68 restent fidèles à la marque, 19 opèrent le transfert vers Renault et 13 quittent le groupe. Et si une partie de la clientèle ne renouvelait pas chez Dacia, c’est en grande partie à cause du manque de propositions, notamment sur des véhicules plus grands, en l’occurrence sur le segment des C-SUV.
Mais le Bigster pourrait aussi être un moyen pour la marque d’aller conquérir de nouveaux clients professionnels. Le segment des C-SUV est en effet très apprécié des flottes d’entreprise. La clientèle potentielle est par ailleurs déjà ciblée. Le Bigster devra aller séduire les professions libérales ou les petites entreprises. Pas question de viser les grandes flottes qui demandent de grosses remises, Dacia ne veut pas pour autant sacrifier son business model, qui fait la force de la marque depuis vingt ans.
Denis Le Vot, directeur général de Dacia, Luca de Meo, patron du groupe Renault, et Jean-Dominique Senard, président de Renault, aux côtés du nouveau Dacia Bigster lors du Mondial de Paris 2024. ©Le Journal de l'Automobile
"Le Bigster va changer la perception de Dacia en BtoB. La marque s’attaque pour la toute première fois au segment C. Le véhicule a déjà été présenté à des clients avec succès. C’est un nouvel outil de conquête à notre disposition et nous allons l’utiliser sans modération. Si des clients grands comptes veulent du Dacia à la place de marques concurrentes, je suis très ouvert. Nous avons déjà beaucoup de demandes, les premières cotations sont en cours, les loueurs découvrent le véhicule. Il y a de l’appétence. Je tiens évidemment à préciser que la stratégie de Dacia ne va pas changer pour autant, nos prix sont nets, sans remise", a récemment déclaré dans nos colonnes Philippe Quetaud, directeur général de Renault Parc Entreprise.
Enfin, en plus du BtoB, le constructeur roumain a également pour objectif de s’attaquer au marché allemand, très demandeur de C-SUV. Seul problème, l’image "low-cost" de Dacia est encore très ancrée outre-Rhin. "C’est aussi pour cela que nous avons souhaité redessiner la marque. Nous voulions faire sauter le verrou qui empêche d’entrer dans une concession Dacia. C'est un sujet pour la clientèle allemande, par exemple", témoignait l’an dernier Denis Le Vot, directeur général de Dacia.
Et d’ajouter : "Le marché allemand est un marché de segments C et D, composé de deux tiers d’immatriculations liées aux flottes et au zéro kilomètre. Autrement dit, nous n’existons pas dans ce schéma. Nous sommes dans un tout petit espace des ventes aux particuliers du segment B. Et malgré tout… Nous sommes quand même cinquièmes du marché allemand à particulier, ce qui n’est pas ridicule. Et nous arrivons avec une gamme ambitieuse sur le C." Dacia doit donc encore trouver sa place sur le marché allemand. Cependant, le Bigster pourrait bel et bien s’avérer être la solution miracle pour la marque roumaine, qui souhaite définitivement tourner la page de son image "low-cost". Réponse en mai prochain.
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