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Constructeurs

GPMA 2014 : paroles d’experts

Publié le 24 septembre 2014

Par Alexandre Guillet
10 min de lecture
L’édition 2014 du Grand Prix des Marques Automobiles, qui mesure et analyse l’attachement des clients VN à leur marque, a rendu son verdict. Cette année, BMW confirme sa 1re place au classement en devançant Audi et Honda, tandis que Volkswagen fait irruption sur le podium, 3e ex aequo, pour la première fois. L’étude s’enrichit aussi d’un volet consacré à la création d’expérience de marque et les généralistes français font parler leur volume, Peugeot, Citroën en Renault réalisant un joli tir groupé. Analyse avec Marie-Agathe Nicoli (responsable du département Automotive de TNS Sofres) et Guillaume Ginet (directeur de recherche chez TNS Automotive).
L’édition 2014 du Grand Prix des Marques Automobiles, qui mesure et analyse l’attachement des clients VN à leur marque, a rendu son verdict. Cette année, BMW confirme sa 1re place au classement en devançant Audi et Honda, tandis que Volkswagen fait irruption sur le podium, 3e ex aequo, pour la première fois. L’étude s’enrichit aussi d’un volet consacré à la création d’expérience de marque et les généralistes français font parler leur volume, Peugeot, Citroën en Renault réalisant un joli tir groupé. Analyse avec Marie-Agathe Nicoli (responsable du département Automotive de TNS Sofres) et Guillaume Ginet (directeur de recherche chez TNS Automotive).

JOURNAL DE L’AUTOMOBILE. Avec désormais un peu de recul, quels sont, à vos yeux, les éléments marquants du millésime 2014 du Grand Prix des Marques Automobiles, qui s’enrichit cette année de prix portant sur la création d’expérience de marque ?
MARIE-AGATHE NICOLI & GUILLAUME GINET.
Depuis 7 ans nous nous attachons à récompenser les marques automobiles capables, sur le marché français, de générer le plus d’engagement auprès de leurs clients. Pour l’édition 2014 nous avons voulu reprendre un peu de champ et nous intéresser également aux relations nouées entre les marques et les consommateurs automobiles en dehors du lien marque possédée-client possesseur.

En effet, dans un contexte à la fois de foisonnement, de fragmentation des canaux de communication mais aussi de perte de pouvoir des marques face à la parole de plus en plus autonome des consommateurs, il nous a semblé essentiel de comprendre comment l’expérience de marque se construisait, de distinguer les points de contact réellement influents de ceux plus anecdotiques dans le parcours d’achat. De cerner par exemple précisément l’impact du digital qui capte tant d’attention - et parfois de budget ! - dans les organisations des constructeurs et le rôle désormais dévolu aux points de contacts traditionnels comme le point de vente ou la pub TV.

In fine, nous souhaitions récompenser les marques capables d’émerger, de créer le plus d’expérience de marque sur les points de contact clés et plus globalement, les marques capables d’orchestrer efficacement l’ensemble des points de contact de manière à faire partie des quatre ou cinq marques considérées en moyenne au début d’un parcours d’achat.

JA. Avec ces nouveaux prix, comment expliquez-vous que les constructeurs généralistes, notamment les français, tirent très bien leur épingle du jeu, ce qui n’est pas le cas via l’indice TRIM ?
M-A.N & GG.
La création d’expérience est une résultante du travail des marques sur chaque point de contact, de l’orchestration de leurs actions mais aussi de leur présence sur leur marché : un des points de contact incontournables avec les marques automobiles est en effet le parc roulant !

Dans ce contexte il est assez logique de retrouver parmi les marques primées les marques françaises : leur part de parc ainsi que leurs investissements en communication sur le marché français figurant parmi les plus importants. Il y a, en effet, dans la notion d’expérience de marque une notion de volume que l’on ne retrouve pas dans celle d’attachement.

On peut donc en conclure que les marques françaises font un très bon travail de création d’expérience auprès de la cible globale des possesseurs de véhicules neufs, même si elles ont plus de mal à créer un véritable attachement dans le contexte extrêmement concurrentiel actuel.

Sur ce point de la création de l’attachement, on notera tout de même que la situation tend à s’améliorer cette année pour les marques françaises puisque toutes les trois sont en progression et que Citroën intègre le top 10 pour la première fois.

JA. Malgré un contexte ambiant faisant la part belle au numérique, voire au tout numérique, on constate que les grandes tendances pour l’importance des points de contact restent assez conservatrices, la concession et même les brochures gardant une place incontournable : comment l’expliquer ?
M-A.N & GG.
L’enseignement clé sur le rôle des différents points de contact est justement que chacun a sa partition à jouer dans la création d’expérience de marque et qu’il ne s’agit pas nécessairement de privilégier certains points de contacts et d’en abandonner d’autres, mais plutôt de travailler les complémentarités et les synergies.

Ainsi, les nouveaux points de contacts digitaux qui drainent tant d’attention disposent d’une vraie mission mais ils n’ont pas pour autant supplanté la concession ou les médias plus traditionnels.

Parmi les points de contact digitaux, le site Internet des constructeurs constitue un point de contact influent au début du parcours d’achat : il est consulté dans la très large majorité des cas en amont de toute visite en concession. Dans ce cadre, il est donc important que le site Internet soit suffisamment attractif et performant pour donner aux automobilistes l’envie de se rendre en concession.
Si la concession demeure un point de contact extrêmement important c’est qu’elle incarne la marque de façon tangible : elle la donne à voir et à toucher, elle la met en scène… et en mains lorsqu’il y a essai du véhicule. Elle fournit le cadre d’une expérience plus longue, plus approfondie, plus personnelle qui peut être revécue, réactivée à loisir via la brochure, preuve physique de cette expérience particulière.

JA. Revenons-en au volet classique du GPMA et à l’attachement clients : quels sont les principaux enseignements de l’édition 2014 ?
M-A.N & GG.
Tout d’abord au niveau global marché, on constate encore cette année un niveau d’attachement très fort, bien qu’en légère érosion, envers les marques automobiles, qui se situent bien au-delà des niveaux générés par les autres secteurs en France et en Europe.

La nouveauté se situe dans l’évolution de cet attachement au fil de la durée de possession. Tout d’abord, nous observons un niveau d’attachement historiquement haut en 1re année de possession (le plus élevé jamais observé dans cette étude conduite depuis 2007) qui peut s’expliquer par le quasi manifeste que représente l’achat d’un véhicule neuf dans un contexte économique de plus en plus tendu. C’est d’ailleurs en soit une bonne nouvelle pour le secteur automobile, car si les volumes de ventes étaient au plus bas en 2013, ceux qui ont fait le choix de l’achat d’un VN se montrent très investis dans leur relation à la marque, du moins la 1re année… Mais dès la 2e année de possession, cet attachement se dégrade très fortement et plus fortement que lors des précédentes éditions. Le défi pour les marques est donc de maintenir le lien avec des acheteurs au départ très impliqués mais aussi très exigeants et qui très vite, prennent du recul par rapport à la marque qu’ils ont choisie.

Par ailleurs, rappelons que notre mesure de l’attachement repose sur deux indicateurs : l’évaluation globale de la performance de la marque d’une part et sa capacité à créer de la préférence par rapport aux marques concurrentes, d’autre part.

L’évolution de ces deux indicateurs au fil de la durée de possession illustre tout à fait ce phénomène. Si la satisfaction globale se dégrade assez peu, c’est surtout le degré de préférence générée par les marques qui s’effondre dès la 2e année. La période de grâce reste donc très courte et, passé l’euphorie liée à l’achat et face à la réalité de la possession automobile, les marques doivent très rapidement donner des raisons tangibles de continuer à les “préférer”.

En somme, Car 360 permet d’identifier une piste forte pour permettre de maintenir la préférence : elle est très factuelle puisqu’il s’agit de permettre à ses possesseurs de rationaliser leur investissement, depuis l’achat du véhicule jusqu’à sa revente. Ainsi, la maîtrise des coûts de possession (entretiens, réparations, consommation…) ainsi que la valeur résiduelle du véhicule apparaissent comme les leviers principaux pour surprendre les possesseurs dans le bon sens du terme et leur donner des raisons de continuer à préférer la marque.

JA. Les marques Premium trustent encore les places d’honneur : sont-ce vraiment des références indéboulonnables et le cas échéant, pourquoi ?
M-A.N & GG.
Indéboulonnables, nous n’en savons rien mais encore incontournables en 2014 très certainement ! Parce qu’elles remplissent les conditions nécessaires à un fort attachement ! A savoir des produits de grande qualité associés à un capital d’image de marque élevé et une valeur résiduelle forte.

Mais elles ne sont pas pour autant indétrônables : il convient par exemple de se rappeler que c’est bien Toyota qui avait remporté le Grand Prix en 2008 lors de la première édition.

JA. Honda est une marque abonnée au podium, mais cette année, elle est accompagnée par Volkswagen, généraliste aux connotations Premium : quelles sont les raisons de l’émergence de Volkswagen ?
M-A.N & GG.
Cette année, on voit Volkswagen s’immiscer pour la première fois sur le podium. En effet, dans un contexte où les acheteurs recherchent de la réassurance quant à la viabilité de leur investissement automobile, Volkswagen se place comme la marque généraliste qui rassure : image de qualité et de fiabilité, motorisations sobres, valeur à la revente élevée, etc.

JA. Dans un registre opposé, comment expliquer le recul de Dacia, auparavant abonnée aux distinctions ?
M-A.N & GG.
Il faut rappeler que Dacia reste tout de même dans la première moitié du classement, mais il est vrai que les performances de la marque en termes de création d’attachement sont en recul depuis déjà deux éditions. C’est un phénomène prévisible lié au vieillissement de la marque : les possesseurs de la marque ne sont plus dans l’euphorie de leurs premières années de possession.

JA. On sait que le numérique a changé la donne dans l’ensemble de la chaîne de la relation clients : quels nouveaux impacts sur la relation aux marques peut-on attendre dans un avenir proche, à un horizon deux ans par exemple ?
M-A.N & GG.
Les potentialités du digital n’ont pas encore été toutes exploitées, notamment en termes d’interactivité. L’autre évolution majeure des années à venir viendra certainement de la voiture elle-même ! En effet la voiture dite “connectée” permettra un lien constant entre la marque et ses possesseurs. Les possibilités d’utilisation de ces nouvelles technologies en termes de CRM sont sans limites et viendront certainement bouleverser l’ordre établi.

JA. L’augmentation du nombre de clients dits “mercenaires” se confirme-t-elle dans l’édition 2014 ?
M-A.N & GG.
Le taux de possesseurs qui renouvelle dans la même marque s’érode d’année en année. C’est un constat clair. L’environnement concurrentiel est plus riche que jamais. Les acheteurs considèrent cinq marques en moyenne en amont de leur achat. C’est justement tout l’enjeu du maintien du niveau de préférence et de la proximité à la marque au fil de la durée de possession, afin de limiter le fameux “churn”.

JA. Pour conclure, un mot sur le prix environnement qui revient une nouvelle fois à Renault. Quelles sont les raisons de ce succès n’est-ce pas un résultat, en l’espèce, très conditionné par la dimension française de l’étude, ce qui n’enlève rien à la marque, entendons-nous bien ?
M-A.N & GG.
Il est certain que la dimension nationale de Renault en France joue sur la perception de la marque. En Europe, c’est Toyota, deuxième du classement en France, avec sa gamme Hybride très large, qui serait le leader sur cette dimension “environnement”.

Cependant, c’est aussi le résultat des efforts de Renault, qui a fortement axé sa communication sur le véhicule électrique et qui est perçu en France comme un acteur incontournable du débat économico-politique sur la thématique du développement durable. C’est d’ailleurs sur la dimension “Travaille à inventer la mobilité de demain” que Renault creuse l’écart par rapport à ses principaux concurrents.

 

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