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Les débats sur les ZFE ne font que commencer

Publié le 14 février 2022

Par Christophe Jaussaud
4 min de lecture
Alors que leur mise en place ne sera obligatoire qu'au 1er janvier 2024, les zones à faibles émissions (ZFE) font déjà naître des débats. L'impérieuse nécessité de réduire la pollution va se heurter à la réalité du parc roulant et aux moyens des Français.
Compte tenu du parc roulant français actuel, 40 % des véhicules seraient interdits dans les ZFE.

Elles devraient protéger mais divisent déjà : les zones à faibles émissions (ZFE) prévues dans les principales agglomérations françaises pour que les populations respirent mieux, sont aussi accusées d'exclure les précaires et ruraux des centres-villes.

 

"Les ZFE, aujourd'hui, c'est ce qui va conduire nombre de nos concitoyens à se révolter", a récemment lancé le président LR des Hauts-de-France Xavier Bertrand. La loi Climat rend les ZFE -officiellement appelées ZFEm pour "zones à faibles émission mobilité"- obligatoires à partir du 31 décembre 2024 dans toutes les agglomérations métropolitaines de plus de 150 000 habitants. Il y en aura 43.

 

Seuls les véhicules porteurs d'une vignette Crit'Air 1, 2 ou verte seront alors autorisés à y rouler, des interdictions devant frapper auparavant les véhicules les plus polluants. Il y a en France au moins 40 000 décès prématurés liés à la pollution de l'air selon une étude de Santé publique France qui fait référence, et jusqu'à 100 000 selon une étude de Harvard. Cette pollution en grande partie due au transport routier -avec le diesel comme accusé numéro 1- touche particulièrement les grandes agglomérations.

 

A lire aussi : ZFE : un véritable casse-tête social et politique

 

Reims, par exemple, exclut déjà les véhicules Crit'Air 5 (diesel d'avant 2001). "Les contrôles sont effectifs depuis le 1er janvier 2022", assure-t-on à l'agglomération. Dans l'agglomération parisienne, toute la zone située à l'intérieur de l'autoroute A86 est déjà interdite aux Crit'Air 4 et 5 (diesel d'avant 2006) et aux véhicules sans vignette. L'interdiction des Crit'Air 3 (diesel d'avant 2011 et essence d'avant 2006) vient d'être repoussée d'au moins six mois, à janvier 2023 au plus tôt.

 

En 2024, si la date ne change pas, plus aucun véhicule diesel ne pourra circuler dans la ZFE de la métropole du Grand Paris, puis en 2030 ce sera au tour des voitures essence. "Quand tout le monde aura compris ce que ça veut dire, on va recréer les conditions d'une crise des gilets jaunes", a grondé Xavier Bertrand. Car en réservant fin 2024 l'accès aux ZFE des principales agglomérations aux Crit'Air 1, 2 et vignettes vertes, on l'interdit à près de 40 % des voitures et véhicules légers (en prenant en compte la composition actuelle du parc).

 

"Souvent passé sous silence et encore ignoré de la plupart des Français, l'impact de la mise en place des ZFE sera brutal pour une grande partie de la population", a résumé la Fédération de la distribution automobile (FEDA). "Leur extension trop rapide (...) constituera un facteur d'aggravation des fractures sociales et territoriales", a-t-elle ajouté.

 

"Ce n'est pas pour embêter les gens"

 

"Si on les déploie, ce n'est pas pour embêter les gens", a plaidé le député LREM Jean-Marc Zulesi, alors que l'Association des maires de France juge le calendrier "intenable". "Quand on fait de la régulation environnementale, il faut que les gens en face aient les moyens de changer de véhicule", a expliqué le ministre délégué aux Transports Jean-Baptiste Djebbari. "La logique est de se dire (...) : si ne circulent à un moment que des véhicules propres dans les ZFE, il faut que les gens connaissent l'offre, que l'offre existe et qu'ils soient en capacité de l'approcher". D'où des aides "très importantes", pouvant aller "jusqu'à 17 000 à 18 000 euros à l'échelle de la métropole du Grand Paris, pour des véhicules qui commencent à 26 000 euros", a-t-il ajouté.

 

Un prêt à taux zéro doit en outre être expérimenté pendant deux ans, à partir de 2023, pour aider les ménages les plus modestes qui vivent dans des ZFE à changer de véhicule, en complément des aides déjà prévues.

 

Les ZFE inquiètent aussi les professionnels. Anne-Marie Idrac, présidente de France Logistique, a estimé qu'il ne fallait pas "aller plus vite que la musique", agitant le spectre d'un "état d'exception" en cas de blocages pour cause de réglementation inadaptée. "Nous pensons qu'il serait judicieux de ne pas interdire des véhicules pour lesquels il n'y a pas de substitution", a-t-elle indiqué, aucun poids lourd vraiment vert n'étant actuellement disponible. Le problème est le même pour les autocars de tourisme. (avec AFP)

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