Transition énergétique : contre vents et marées ?
L’exemple le plus parlant est sans doute le revirement du Royaume-Uni sur l’interdiction des voitures thermiques. Alors que les constructeurs occidentaux mettent les bouchées doubles pour respecter le calendrier imposé par l’Europe et l’arrêt des ventes de moteurs thermiques en 2035, Londres qui pensait initialement se passer des motorisations thermiques dès 2030, a choisi fin septembre, de différer cette date de cinq ans.
Outre-Manche toujours, le gouvernement conservateur de Rishi Sunak a fait savoir cette semaine qu’il préparait un projet de loi prévoyant une reprise des attributions annuelles de licences d'exploration d’hydrocarbures en mer du Nord. Le Premier ministre a justifié cette volte-face par la nécessité de "renforcer la sécurité énergétique" du Royaume-Uni, sur fond d'invasion de l'Ukraine et de flambée des prix de l'énergie.
Le Royaume-Uni n’est pas le seul pays où les politiques de stop & go font flores. La fin des chaudières à gaz en Allemagne a entraîné cet été une crise gouvernementale majeure, entre ceux qui voulaient avancer l’interdiction des ventes pour les constructions neuves à 2024 (contre 2025) et ceux qui entendaient au contraire la retarder. Au final, le clap de fin a été reculé à 2028 !
Même en France, où la fin des véhicules thermiques est bien actée pour 2035 et où les industriels se mettent en ordre de bataille pour pousser la fabrication de véhicules électriques "made in France", les rétropédalages existent. Le dispositif de ZFE a ainsi été considérablement allégé début juillet, ne concernant finalement plus que cinq grandes agglomérations, avec un report (pour le moment) à 2025 de l’interdiction des véhicules CritAir 3 en Île-de-France.
Sur le terrain industriel aussi les revirements sont à l’ordre du jour. Les États-Unis ont récemment connu un retour spectaculaire des "méga-fusions" dans les hydrocarbures, avec les rapprochements entre ExxonMobil et Pioneer pour 60 milliards de dollars d’une part, et entre Chevron et Hess (plus de 60 milliards de dollars également) de l’autre.
On se croirait presque revenu aux méga deals de la fin des années 90, qui avaient donné naissance à l’époque aux géants ExxonMobil justement, ou au nouveau Total-Fina-Elf. Le même TotalEnergies, qui vient d’ailleurs d’annoncer, à la faveur de ses résultats du troisième trimestre, une hausse de sa production d’hydrocarbures de 5 % sur la période et de 2 à 3 % dans les prochaines années. Ceux qui pensaient que les pétroliers n’investissaient plus dans les projets pétroliers et gaziers, ont de quoi en "perdre leur latin".
Au même moment, les filières des énergies renouvelables sont à la peine, à l’image de l’éolien offshore par exemple. Avec l’envolée des prix des matières premières et de l’énergie, nombre de projets voient leurs coûts exploser et leur rentabilité se réduire comme peau de chagrin. Les leaders du secteur (Orsted, Vattenfall ou Iberdrola) préfèrent payer des pénalités pour se retirer ou abandonner des projets, que ce soit en Europe ou en Amérique du Nord, mettant en grande difficulté leurs fournisseurs d’équipements (Siemens, Gamesa…).
Pendant ce temps, des populations entières assistent, médusées, à ces revirements ; ne savent plus quelle carte énergétique jouer pour chauffer leur domicile ou rouler en voiture ; et doivent composer avec force tempêtes, inondations ou incendies, selon les saisons. Autant de signes que l’urgence climatique est bel et bien déclarée et qu’elle nécessite plus que jamais, de la constance dans les politiques et les décisions d’investissements.
L’Arval Mobility Observatory
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