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Electrification : les limites de la méthode Coué

Publié le 9 septembre 2021

Par Damien Chalon
4 min de lecture
Zoom de l’Arval Mobility Observatory – Traditionnellement, à quelques mois d’une échéance électorale (a fortiori lorsqu’il s’agit de la présidentielle), les sujets de mécontentement des citoyens-électeurs sont surveillés comme le lait sur le feu par l’exécutif.

Après plusieurs mois d’immobilisme forcé en raison de la crise sanitaire liée à la Covid-19, les conditions de déplacement des Français deviendront-elles un sujet à risque pour les candidats ? Des échéances réglementaires fixées par la récente loi Climat & résilience vont conduire - par exemple - à accélérer le développement des Zones à faibles émissions (ZFE), réduisant l’usage des voitures thermiques. Un vrai casse-tête en perspective alors que l’âge moyen du parc automobile français ne cesse de s’allonger, laissant justement la part belle aux véhicules diesel et essence.

 

Sur le terrain, le discours des constructeurs automobiles n’est plus qu’une ode aux motorisations électriques, même chez les plus ardents ex-défenseurs du diesel. Il est vrai que la chasse aux sorcières thermiques, entamée au lendemain du Dieselgate en 2015, les menaces d’amendes européennes et les nouvelles dates-butoir fixées cet été par la Commission pour l’arrêt de la commercialisation des véhicules thermiques, sont passées par là. A Munich, qui marque le renouveau des salons autos d’après crise sanitaire, les constructeurs ont remisé au garage, loin des regards, leurs modèles à combustion, pour ne mettre en avant que ceux à batterie.

 

Cette méthode Coué reste pourtant à ce jour un vrai pari sur la conversion des opinions publiques mondiales. "Pour lutter contre le réchauffement climatique, il faut rouler à l'électrique, ne plus installer de chaudière au fuel, aller faire ses courses avec des pots vides, ne plus autoriser les livraisons dans des barquettes en plastique et demain, il faudra voler à bord d'avions carburant à l'hydrogène, constate l’éditorialiste des Echos, David Barroux, dans l’édition du 8 septembre. Que se passera-t-il si les consommateurs ne veulent pas tous basculer dans l'électrique, mais que notre industrie (NDLR automobile) ne peut plus proposer d'autre option ?" (1).

 

Convaincre (et non pas forcer) les ménages et les entreprises d’adopter de nouveaux modes de consommation ou de déplacements, reste le plus sûr moyen d’ancrer ces changements dans la continuité. Faciliter les mutations (et non pas proposer des usines à gaz) est aussi un prérequis. Or, dans le cas de l’automobile et des mobilités douces, force est de constater que toutes ces cases ne sont pas aujourd’hui cochées. Prenons le cas de l’énergie que l’on sera prié de mettre demain dans les véhicules : bien difficile de décerner la médaille d’or de l’énergie véritablement propre à l’une d’entre elles : de plus en plus de voix s’élèvent pour rappeler que l’hydrogène est issu à 95 % d’énergie fossile ; selon des universitaires américains, la production d’hydrogène "bleu" serait même plus néfaste au climat que le charbon ou le pétrole ! Et que dire de l’électricité destinée à recharger les véhicules à batterie? Les anti-nucléaire, anti-éolien, anti-photovoltaïque sont toutes griffes dehors contre les KWh issus de ces filières.

 

Pas de quoi rassurer donc des automobilistes conscients qu’ils vont devoir changer de véhicules à plus ou moins longue échéance s’ils veulent pouvoir continuer à se déplacer, mais à quel prix ? Les bonus à l’achat fondent aussi sûrement que la calotte glaciaire sous le poids du réchauffement climatique. Le coût de l’électricité à moyen terme reste aussi un point d’interrogation. Et que dire de l’universalité des usages des véhicules électriques, quel que soit le climat, le relief, la température etc ? "Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras", insistait Jean de La Fontaine dans l’une de ses fables. (2) Gare à ce que, dans le brouillard, l’automobiliste du XXIème siècle ne fasse pas sien cet adage du XVIIème.

 

L’Arval Mobility Observatory

 

(1)  « Mauvaise recette bio », David Barroux, Les Echos, 8 septembre 2021.

(2)  « Le petit poisson et le pêcheur » de Jean de La Fontaine. 1668.

 

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