A quand une transition énergétique sans charbon ?
Quand on lit l’actualité de la semaine, sur fond d’envolée des prix de l’énergie et de crise des semi-conducteurs, on a une curieuse impression de retour vers le futur. Prenons le cas du marché automobile : il affiche un repli inédit sur le front des véhicules neufs et c’est le VO qui en profite ; mais pas n’importe quel modèle. Comme les VO récents sont pris d’assaut par des ménages rebutés par les prix du neuf (la voiture moyenne s’est appréciée de 7 000 euros entre 2010 et 2020) (1), il y en a de moins en moins en stocks chez les concessionnaires et les marchands.
Résultat : la demande des consommateurs se rabat sur les VO de 8 ans et plus. Autrement dit, des modèles anciens et le plus souvent à motorisations thermiques ! Un comble pour les militants de l’électrification des parcs automobiles et pour les constructeurs qui dépensent des milliards de dollars pour changer leurs gammes et tendre vers le zéro carbone.
Même constat sur le terrain de l’énergie. "Avec la crise énergétique, le combustible fossile le plus polluant au monde s’avère plus indispensable que jamais", écrit le quotidien Les Echos dans un grand dossier sur la seconde vie du charbon, soulignant que les centrales à charbon tournent actuellement à plein. (2) Cette énergie tant décriée est en effet appelée à la rescousse pour produire de l’électricité, par des économies qui veulent éviter tout risque de black-out.
C’est le cas notamment de la Chine ou encore de l’Inde, les deux premiers importateurs mondiaux de charbon. Quoiqu’il en coûte à la préservation du climat. Plus près de la France, en Allemagne, c’est la même situation. Si en 2020, les énergies renouvelables ont représenté la première source d’énergie produite dans le pays, changement de scénario cette année, puisque le charbon est repassé en tête au cours du premier semestre !
Alors bien sûr, certains auront beau jeu de dire que la hausse vertigineuse des prix de l’énergie ne devrait avoir qu’un temps, que c’est très conjoncturel et lié à la reprise économique mondiale générale. Peut-être. Mais le temps de l’énergie bon marché est bel et bien derrière nous, compte tenu des besoins exponentiels des économies et des populations, y compris dans les pays en développement. Compte tenu également de la nécessité de promouvoir de nouvelles productions électriques "propres"… mais chères.
Le n°1 de TotalEnergies, Patrick Pouyanné a d’ailleurs mis les "pieds dans le plat" en interpellant les politiques. "On fait les autruches si on fait croire aux gens que les renouvelables sont gratuits parce qu'ils fonctionnent avec du vent et du soleil. La transition requiert de très gros investissements. Et l'énergie coûtera plus cher" (3). Avertissement sans frais.
Ne pas faire prendre aux consommateurs des "vessies pour des lanternes" pourrait être un autre conseil bien utile à suivre dans l’industrie automobile. Les chiffres de ventes de voitures neuves sont décevants depuis plusieurs mois, et ont été particulièrement inquiétants en septembre. La faute aux semi-conducteurs et aux délais de livraisons qui n’en finissent pas de s’allonger, expliquent les professionnels. C’est sans doute une raison mais pas la seule.
Affolés par les prix de vente des véhicules neufs, peu rassurés par l’avenir que les politiques réservent à la voiture ou par les incertitudes qui pèsent toujours sur les réseaux de recharge des véhicules électriques, les ménages disent "stop". Et pour ne pas faire les autruches, ils reportent à des jours meilleurs leur passage en concessions.
L’Arval Mobility Observatory
(1) Source Argus. 2021.
(2) La crise énergétique mondiale donne une seconde vie au charbon, Les Echos, 5 octobre 2021.
(3) Entretien aux Echos, 1er octobre 2021.
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