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Brigitte Courtehoux, Free2Move : "Nous parvenons à maintenir la rentabilité dans ces temps difficiles"

Publié le 18 novembre 2021

Par Gredy Raffin
8 min de lecture
La directrice générale de Free2Move, la filiale de Stellantis, se satisfait du niveau de rentabilité de son entreprise. Brigitte Courtehoux se focalise sur les ouvertures de villes malgré la pandémie et la crise des composants.
Brigitte Courtehoux, CEO de Free2Move. (©PSA Group)

Journal de l'Automobile. En tant qu'acteur de la mobilité avec Free2Move, comment interprétez-vous la gronde des Français face à l'augmentation du coût de l'énergie ?

Brigitte Courtehoux. La mobilité, c'est la liberté. On peut donc tout à fait comprendre le ressentiment. Les confinements nous ont montré combien cette liberté de déplacement est précieuse et voir que son prix augmente, alors qu'on peut à nouveau circuler, provoque forcément de la colère. Il n'est pas possible de pointer du doigt un responsable, car c'est un effet domino découlant de la situation provoquée par la pandémie. Il faut se concentrer sur les solutions. Nous avons observé, chez Free2Move, un pic de demandes au cours des derniers mois, traduisant un fort besoin de mobilité un instant précis sans forcément avoir à détenir un véhicule. Il y a des opportunités et nous amenons des réponses.

 

Nous mettons de 20 à 30 % de véhicules en moins en circulation

 

JA. Autre domaine, autre problématique. Dans quelle mesure la crise des semi-conducteurs impacte-t-elle votre activité et votre plan de déploiement ?

BC. L'impact est tangible. Nous ne sommes pas épargnés du fait d'appartenir au groupe Stellantis. Comme tous les acteurs du monde de la location, nous manquons de véhicules à mettre à la route. Cela ne va pas nous empêcher d'ouvrir de nouvelles villes. Nous avons annoncé Denver, aux Etats-Unis, en octobre et nous allons en ouvrir d'autres, début décembre, aux États-Unis. Le plan de déploiement a été maintenu, même si nous avons réduit le nombre de véhicules concernés.

 

JA. A titre d'exemple, dans cette nouvelle ville, de combien de véhicules avez-vous pensé réduire la voilure ?

BC. En réalité, ce n'est pas qu'aux États-Unis mais aussi en Europe. Nous mettons de 20 à 30 % de véhicules en moins en circulation et ce, dans toutes nos activités. Ce qui entraîne clairement des répercussions sur nos projections de chiffre d'affaires. Nous ne nous plaignons pas, car depuis mi-2019 nous avons effectué un tri dans ce qui s'avérait être pertinent. Free2Move dispose depuis 2020 d'une seule entité légale, d'une seule équipe et d'une seule technologie. Ce qui nous a permis d'atteindre la rentabilité.

 

JA. Tenez-vous le cap en 2021 ?

BC. Nous parvenons à maintenir la rentabilité dans ces temps difficiles. Le premier semestre a été influencé par la pandémie et le confinement printanier. Durant l'été, la demande fut telle qu'il n'a pas toujours été possible de la satisfaire et le second semestre est placé sous le signe de la crise des semi-conducteurs. Nous sommes sur le fil du rasoir depuis le début de l'année, mais nous enregistrons une croissance rentable. Certes un peu moindre par rapport aux objectifs initiaux.

 

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JA. Que représente Free2Move à l'échelle du groupe ?

BC. Depuis notre création, nous réalisons 100% de croissance chaque année, à l'exception de 2020 qui a été légèrement en retrait en termes de poussée. L'activité leasing avance à bon rythme. Elle vient de prendre la tête du marché en France. Sur la partie des nouvelles mobilités, nous restons encore tout petit. Le chiffre d'affaires en 2020 était de 35 millions d'euros. A l'échelle du groupe, cela ne pèse pas très lourd, mais dans le monde des start-up, nous avons un bilan bien au-dessus de la moyenne.

 

JA. Avec le recul, quelles sont les clés de la rentabilité ?

BC. Il y a différents paramètres. Comme chez Stellantis, l'exécution et l'exigence opérationnelle constituent le premier élément. Nous restons aussi proches de nos clients pour avoir un niveau de satisfaction très élevé. Nous nous appuyons également sur une offre très complète afin de fidéliser et d'augmenter le panier moyen de chaque compte utilisateur. Nous avons un modèle composé d'offres en propre, de relais au travers des Mobility Hub et d'un rôle de broker. Une couverture à 360° qui favorise la rentabilité.

 

JA. Dans quel sens les résultats observés vous poussent-ils à avancer ?

BC. Il est moins question de création de nouveaux services que de dérouler ce que nous avons actuellement en portefeuille. L'exécution et le déploiement sont notre priorité. D'où les ouvertures successives aux Etats-Unis. Free2Move doit se construire dans l'objectif de devenir un géant mondial en profitant des facilités que nous offre la vaste couverture territoriale de Stellantis.

 

JA. Combien de villes souhaitez-vous ouvrir aux Etats-Unis ?

BC. Nous allons ouvrir 5 à 10 villes avec Free2Move Car-on-Demand, la solution de mobilité par souscription. Le modèle de Mobility Hub, c'est-à-dire les véhicules en libre accès pour quelques minutes ou quelques jours dépendra de la situation. Après Washington, nous pourrions ouvrir 2 à 5 villes de plus avec ce service.

 

A ce jour, nous avons entre 1 500 et 1 600 franchisés en Europe, dont près d'une centaine qui ne sont pas des concessionnaires

 

JA. La politique des villes freine-t-elle vos ambitions ?

BC. Comme en Europe, les ouvertures donnent lieu à des négociations engagées aux Etats-Unis. La réglementation exige d'avoir un permis, nous étudions donc l'accueil de la ville. Ensuite, le stationnement représente une part non négligeable des frais opérationnels, nous regardons donc les tarifs. Ensuite, il faut avoir une base de clients potentiels, car il n'y a aucun intérêt à s'installer dans une ville où le taux d'équipement est très haut à cause des longues distances à couvrir au quotidien. Tels sont les trois critères.

 

JA. Comment va évoluer la motorisation des flottes ?

BC. En Europe, nous sommes 100 % électriques, tandis qu'aux Etats-Unis nous avons privilégié les motorisations thermiques avec pour ambition d'intégrer très prochainement une part de modèles hybrides. A plus long terme, nous basculerons vers le 100 % électrique à la faveur des plans produit des marques.

 

JA. En ce qui concerne les Mobility Hub, tous les concessionnaires vous ont-ils suivi ?  

BC. Dans les grandes villes, nous opérons le service, comme à Paris. Dans les villes de taille moyenne nous nous appuyons sur les concessionnaires mais pas uniquement. Nous trouvons de plus en plus d'accords avec des partenaires capables de nous accompagner. A ce jour, nous avons entre 1 500 et 1 600 franchisés en Europe, dont près d'une centaine qui ne sont pas des concessionnaires du réseau Stellantis.

 

JA. Quel est leur profil et cherchez-vous à passer des accords de grande envergure ?

BC. Nous avons des réparateurs indépendants, des centres-autos, notamment Feu Vert, et de gros distributeurs multimarques. Pour ce qui touche aux accords, nous privilégions les contrats globaux quand cela est possible. Parfois, les contacts sont très locaux et en faisant nos preuves, nous sommes en mesure de convaincre la tête de réseau à l'échelle européenne.

 

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JA. Peut-on s'attendre à des signatures dans les semaines à venir ?

BC. Tous les jours ou presque nous signons avec un nouveau partenaire. Y aura-t-il un contrat qui fera date ? Pour le moment, nous n'avons rien à signaler de particulier.

 

JA. Dans ce contexte de renégociation des contrats de distribution, qu'avez-vous à proposer de durable au concessionnaire en tant qu'entité autonome ?

BC. Très clairement, nous pouvons être un relais de croissance. Les plus matures le comprennent. Ils nous apportent une couverture du territoire sans commune mesure et nous leur proposons d'entrer pleinement dans les services de mobilité qui leur poussent des clients. Cette relation profite à tout le monde. Cela commence à se voir dans leurs chiffres. Les meilleurs d'entre eux peuvent faire jusqu'à 1 000 euros de chiffre d'affaires par mois et par voiture comme les bons loueurs. Ce qui participe à la rentabilité des points de vente.

 

JA. Comment allez-vous collaborer avec Leasys, l'autre entité du groupe Stellantis issue de l'univers FCA ?

BC. Nous sommes extrêmement complémentaires, déjà d'un point de vue géographique. Les deux entités ont leur qualité. Le territoire est suffisamment grand pour cohabiter. Dans la manière de traiter les clients aussi nous sommes complémentaires. Nos services sont interfacés pour que chacun puisse trouver une solution chez l'un ou chez l'autre. Nous travaillons en parallèle tout en définissant l'avenir. Leasys a une proximité grâce à son réseau et Free2Move maîtrise la technologie. Continuerons-nous dans ce schéma de synergie ou nous rapprocherons-nous, il est encore trop tôt pour le dire.

 

JA. Vous disiez avoir atteint la maturité technologique. Les start-up cherchent toujours à augmenter les effets d'échelle. Difficile de ne pas vous imaginer en fournisseur…

BC. C'est exactement le sujet. Leasys et Free2Move ont de belles équipes et elles étudient ensemble les possibilités.

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