Verdissement des flottes : comment calculer la nouvelle taxe ?
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Nouvelle grille du malus CO2, évolution du malus au poids, fin du bonus gouvernemental pour les utilitaires légers, entrée en lice des certificats d’économie d’énergie… Le secteur des flottes doit composer avec une actualité réglementaire et fiscale d’une rare densité, qui ne va pas vraiment dans le sens attendu de la stabilité.
La finalité de toutes ces mesures est d’inciter les entreprises à accélérer leur transition vers une mobilité plus vertueuse. En somme vers le tout électrique. C’est d’ailleurs le sens d’une toute nouvelle taxe introduite par le projet de loi de finances (PLF) pour 2025. Il s’agit de la taxe annuelle incitative relative à l’acquisition de véhicules légers à faibles émissions.
La théorie
Ce nouveau dispositif, objet de l’article 8 bis du PLF, est pour le moins complexe. Clairement, l’objectif est de sanctionner les entreprises qui ne jouent pas le jeu de l’électrification, qui sont en dehors des clous des quotas de verdissement fixés par la loi d’orientation des mobilités (LOM).
Rappelons que, depuis le 1er janvier 2024, chaque opération de renouvellement de flotte doit comporter au moins 20 % de véhicules à faibles émissions (moins de 50 g/km de CO2). Jusque-là, le non-respect de ces quotas n’était pas assorti de la moindre sanction. C’est terminé.
Dès 2025, les entreprises à la traîne risquent de s’exposer à des amendes. Encore faut-il s’y retrouver dans la manière de les calculer. Plusieurs paramètres entrent en ligne de compte. Tout d’abord celui du tarif de la taxe, dont voici l’échéancier :
Année civile | 2025 | 2026 | À compter de 2027 |
Tarif | 2 000 € | 4 000 € | 5 000 € |
Le deuxième paramètre est celui de "l’écart avec l’objectif cible d’intégration à la flotte de véhicules légers à faible émission". En 2025, les entreprises qui disposent de plus de 15 % de véhicules à faibles émissions en parc sont à l’abri de toute sanction. Le texte précise toutefois que "seuls sont pris en compte les véhicules qui ont intégré la flotte au plus tôt au cours de la troisième année civile précédente". Là aussi, un calendrier a été fixé :
Année civile | 2025 | 2026 | 2027 | 2028 | 2029 | 2030 |
Taux | 15 % | 18 % | 25 % | 30 % | 35 % | 48 % |
Il faut ensuite déterminer le nombre de véhicules à faibles émissions manquants par rapport à cet objectif cible. Prenons l’exemple d’une flotte de 1 500 véhicules avec une part, en fin d’année 2025, de 150 véhicules à faibles émissions. Il en manque donc 75 pour atteindre l’objectif cible de 15 %, soit 225 véhicules.
Pour compléter le calcul, il convient aussi de tenir compte du taux annuel de renouvellement des véhicules légers considérés comme "très émetteurs", en somme qui dépassent les 50 g/km de CO2. Ainsi, si l’entreprise prévoit d’intégrer 200 véhicules thermiques en 2025, il faudra retenir le taux de 13,3 % (part représentée sur le total de la flotte de 1 500 véhicules).
Signalons enfin que certains modèles bénéficient de bonifications. Une voiture particulière qui n’est pas à usage spécial, comme une voiture de fonction, et qui est à faible empreinte carbone compte pour 1,5 unité. La notion de faible empreinte carbone est assez floue à ce stade, mais il est probable que les véhicules concernés soient les mêmes que ceux bénéficiant d’un bon score environnemental.
Quant aux véhicules de tourisme à usage spécial ou aux véhicules utilitaires légers, ils comptent pour 2 unités en cas de faibles émissions et pour 2,5 s’ils entrent dans la case "faible empreinte carbone". À ce jour, il n’existe pas de classification pour cette catégorie. Voici le tableau récapitulatif :
Catégorisation | Qualification environnementale | Taux de majoration |
Véhicule de tourisme qui n'est pas à usage spécial | Faible empreinte carbone | 50 % |
Véhicule de tourisme à usage spécial ou véhicule qui n'est pas un véhicule de tourisme | Faibles émissions | 100 % |
Faible empreinte carbone | 150 % |
La pratique
Place maintenant au calcul sur la base des éléments évoqués. Pour faciliter la tâche des entreprises, Pelikan Mobility propose un simulateur tenant compte de l’ensemble des paramètres évoqués. Reprenons le cas de notre flotte de 1 500 véhicules, composée de 50 modèles à faibles émissions fin 2025. Partons du principe qu’elle renouvelle 300 véhicules en 2025, avec 200 voitures thermiques et 100 voitures électriques de fonction.
Dans ce scénario, l’amende s’élèverait à 16 678 euros, soit 83 euros par nouveau véhicule thermique déployé sur l’année. Mais pour la même situation en 2026, cela donnerait lieu à une pénalité de 64 026 euros, soit 320 euros par véhicule thermique. Ce simulateur permet de jouer sur l’ensemble des paramètres, une aide précieuse pour préparer la stratégie de flotte automobile pour les mois à venir.
Selon Vincent Schachter, dirigeant de Pelikan Mobility, loueur spécialiste de l’électrification des flottes d’utilitaires légers, "ce mécanisme peut sembler complexe de prime abord, mais l’intention est claire : il cible directement la composition du parc, plus seulement les renouvellements comme le faisait la LOM. Chaque flotte est libre de définir sa stratégie mais en fin de compte, tout véhicule thermique qui n’est pas renouvelé aujourd'hui à l'électrique devient un handicap qui coûtera d’autant plus cher à l’avenir".
Ainsi, les entreprises qui privilégieront les modèles thermiques lors de leurs renouvellements s’exposeront à des pénalités immédiatement et pour la suite, car l’écart de leur parc à la cible augmente. "Les stratégies d’attente sont également sanctionnées, poursuit Vincent Schachter. L’entreprise qui déciderait de ne renouveler aucun véhicule en 2025 ne payerait aucune amende, et une autre qui renouvellerait peu payerait peu. Mais elles s’exposeront alors à des pénalités bien plus fortes les années suivantes lorsqu’il leur faudra finalement renouveler un parc vieillissant".
Les entreprises qui ont déjà une part de véhicules à faibles émissions supérieure à 15 % peuvent toutefois souffler… Jusqu’à l’an prochain, car le taux cible augmente chaque année. Vincent Schachter voit ce nouveau dispositif comme "un changement de braquet du régulateur, qui montre une volonté très claire d'inciter à l'électrification sous peine de pénalités significatives".
Il prêche enfin pour sa paroisse en soulignant que les utilitaires légers comptent double au minimum, un moyen de rattraper le retard accumulé par les entreprises dans l’électrification de cette catégorie.
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