TVA sur les voitures de fonction : le jackpot fiscal que personne n’avait vu venir

"C’est un enjeu massif économiquement, encore plus important que celui des avantages en nature du début d’année !", annonce Stéphane Montagnon. Le directeur du pôle consulting de Holson réagit à la publication, le 30 avril 2025, d’un rescrit au bulletin officiel des finances publiques.
Derrière ce texte technique se cache un bouleversement de taille : les entreprises peuvent désormais récupérer la TVA sur les voitures de fonction, à condition que le salarié verse une contrepartie, même indirecte. Une perspective longtemps interdite, désormais validée par l’administration fiscale.
Harmonisation européenne
Ainsi, avec ce nouveau dispositif, les entreprises sont d’un côté en droit de déduire la TVA supportée sur les dépenses liées à la mise à disposition de voitures de fonction, "y compris la TVA appliquée sur l’acquisition ou la location du véhicule concerné", complète Stéphane Montagnon. De l’autre, elles sont tenues de collecter la TVA sur la contrepartie versée par le salarié.
Voilà pour les grands principes de ce texte d’origine européenne. Il s’inscrit dans un processus d’alignement sur le droit européen de la TVA. Depuis plusieurs années, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a clarifié la notion de "prestation de services à titre onéreux" en matière de mise à disposition de biens, notamment dans son arrêt "QM" du 20 janvier 2021.
Selon la jurisprudence européenne, une contrepartie suffit à établir une relation économique permettant de soumettre l’opération à la TVA. La France, jusque-là prudente, voire restrictive, dans l’application de ces principes aux véhicules de fonction, a donc fini par s’aligner.
Reste maintenant à interpréter la mesure et à quantifier les bénéfices qui en découlent. Pour Stéphane Montagnon, "ce dispositif ouvre un nouveau champ de questionnement très large, mais contrairement aux dernières réformes, il représente globalement une opportunité d'optimiser les coûts après des vagues successives de hausse depuis quatre ans."
Bénéfices colossaux
Le sujet a déjà été identifié par bon nombre d’entreprises et fait actuellement l’objet d’une analyse fiscale et juridique. Holson a de son côté monté une offre, en partenariat avec un cabinet d'avocat spécialisé sur la TVA, pour accompagner ses clients dans la compréhension et la mise en place du sujet. Les premiers retours sont favorables, aucune entreprise n’ayant fermé la porte sur cette opportunité.
Les bénéfices sont en effet colossaux, environ 1 200 euros par an avec la TVA économisée sur le loyer, dans l’hypothèse où ce dernier se situe aux alentours de 500 euros. Sur une flotte de 500 véhicules de fonction, l’économie atteint 600 000 euros !
En contrepartie, l’entreprise doit donc mettre en place une participation financière du salarié, laquelle peut être modique mais non symbolique. Pour Stéphane Montagnon, l’avantage en nature versé par le salarié peut être retenu comme contrepartie dès lors qu’il est identifiable et lié à la mise à disposition du véhicule. Il peut sinon s’agir d’un montant prélevé sur salaire ou d’une réduction d’un autre avantage. Le rescrit ouvre donc la porte à la récupération de la TVA, sans que cela ne modifie le montant payé par le salarié, celui-ci restant constant, en TTC.
Reprenons le cas de notre voiture de fonction à 500 euros de loyer. L’avantage en nature (sans le carburant) déclaré s’élève donc à 250 euros par mois, soit 3 000 euros par an. Si l’on applique une TVA à 20 %, l’entreprise doit collecter 600 euros. Le dispositif est neutre pour le salarié, qui n’a pas à payer plus.
Conséquence de la mécanique de collecte et déduction de TVA, Stéphane Montagnon ajoute que ce dispositif va "renforcer encore un peu plus l'attractivité économique des véhicules électriques éco-score."
Mesure rétroactive
Cerise sur le gâteau, ce nouveau dispositif est rétroactif. "Nous estimons qu’il y a entre 1 000 et 1 500 euros à récupérer par véhicule, sur la base du différentiel de TVA collectée et déductible. Si vous avez une flotte de 100 véhicules, cela peut faire 150 000 euros. Une entreprise peut décider de laisser cela sur le côté mais ce serait dommage", affirme le fondateur de Holson. La démarche peut néanmoins s’avérer fastidieuse pour monter le dossier et apporter les éléments de preuve.
Stéphane Montagnon estime dans l’ensemble que le risque fiscal est minime. Il s’attend en revanche à ce que l’administration fiscale, pour laquelle le manque à gagner en TVA pourrait être colossal, dresse des barrières. "Il faudra être solide pour justifier les demandes", reconnaît-il. Derrière cette réforme discrète, c’est une nouvelle frontière qui s’ouvre pour l’optimisation des flottes d’entreprise. Reste à savoir combien d’entre elles auront l’audace de s’en emparer.
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