Réseau routier, le caillou dans la chaussure des mobilités
A l’heure où les coûts d’usage des véhicules montent en flèche, sous le triple effet de l’envolée des prix des carburants, de la forte progression des tarifs de vente des véhicules neufs ou encore de la hausse des frais d’entretien, voici un rapport qui risque de faire tiquer les automobilistes. Les routes françaises sont dans un état déplorable et la situation devient de plus en plus préoccupante en termes de sécurité (notamment des deux-roues), viennent de conclure les sages de la Cour des comptes, dans une volumineuse étude de 139 pages.
Depuis des mois les habitués de la route se sont accommodés, bon gré mal gré, des nids-de-poule, ornières, crevasses et autres trous sur les chaussées, qui empoisonnent leurs trajets. Ils ont appris à slalomer entre ces obstacles, pour éviter d’éclater leurs pneumatiques et de dégrader leurs bas de caisse. Aucun type de route n’est épargné par ce nouveau fléau ; qu’il soit géré par l’État, les départements ou les communes, le réseau routier national, qui fût longtemps l’une des fiertés du pays avec ses 1,1 million de km et que de nombreux pays nous envient, est à la peine.
La Cour des comptes n’a pas de mots assez forts pour qualifier les carences des responsables : "absence d'une véritable politique routière", "insuffisance des outils de pilotage et de programmation", "réformes et réorganisations nécessaires". La faute à une décentralisation mal conduite par l’État (qui gère 1,1% des routes, soit tout de même 20 % du trafic) et insuffisamment prise en charge au niveau local.
Faute de budgets à la hauteur des besoins, départements (responsables de l’entretien de 380 000 km de routes) et communes (en charge de 700 000 km) laissent le réseau se détériorer, alors même que le trafic a progressé de plus de 45 % en l’espace de 30 ans. La proportion de surfaces de chaussée exigeant des travaux d’entretien est ainsi passée en une dizaine d’années de 43 % à 53 %, rappelle la Cour des comptes.
Au fil des années, l’entretien et l’exploitation de ces routes sont devenus des variables d’ajustement, en fonction de la situation financière mais aussi des priorités d’investissement des communes et des départements. Dépassés par les autres missions qui leur incombent, les départements ont progressivement délaissé leurs routes ; seuls 40 % d’entre eux ont, par exemple, réalisé une campagne d’évaluation de toutes leurs chaussées, constate le rapport.
La Cour des comptes rappelle donc chacun à ses obligations : le chef d’orchestre, c’est-à-dire l’État, a vocation à rester le patron des routes françaises. Cette reprise en mains doit prendre la forme "d'une politique nationale en concertation avec les collectivités territoriales", mais aussi et surtout, d'une obligation de se donner "les moyens d'un financement pérenne". Plus le temps passe, plus le coût des réfections est en effet élevé, alors qu’un entretien régulier et programmé représente un budget modéré et contrôlable.
Les avis de la Cour des Comptes sont certes consultatifs, ils constituent en général un bon baromètre du ressenti de l’opinion. A l’heure où les pouvoirs publics militent pour une électrification rapide du parc automobile national, synonyme d’un coût financier supplémentaire réel pour les Français, la mise à disposition d’un réseau routier digne de ce nom pour les entreprises, comme pour les ménages, apparait de plus en plus comme un évident prérequis.
L’Arval Mobility Observatory
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