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Patrick Gruau : "Les planètes sont en train de se réaligner"

Publié le 13 avril 2023

Par Damien Chalon
7 min de lecture
Le groupe Gruau a rebondi après une période de flottement, l’ayant entraîné jusqu’à une procédure de sauvegarde. Son président, Patrick Gruau, revient sur les récents changements opérés au sein de l’entreprise familiale et évoque les pistes de développement à l’étude.
Patrick Gruau, président du groupe Gruau. ©Sylvain Malmouche

Journal des Flottes : Un peu plus d’un an après sa sortie de procédure de sauvegarde, comment se porte le groupe Gruau ?

Patrick Gruau : Le groupe Gruau se porte très bien, je suis un président serein. Déjà, nous avons fait évoluer notre gouvernance, avec le renfort de nouvelles compétences. J’ai nommé un directeur général en la personne de Xavier Aumonier en février 2022. Xavier a désormais le volant opérationnel du groupe et nous avons noué une grande relation de confiance. Gruau a été victime en 2019, je vous le rappelle, de plusieurs événements dont un majeur et inattendu, à savoir la réduction significative et brutale d’un engagement de commande d’un constructeur, suivie de l’épisode du Covid. Tout ceci est désormais derrière nous. L’année 2022 n’a pas été simple pour autant avec les problèmes de pénurie de semi‑conducteurs que tout le monde connaît. Pour Gruau, cela s’est traduit par des difficultés à se procurer des châssis auprès des constructeurs. Le marché du VUL a d’ailleurs été très affecté l’an dernier avec un repli d’environ 20 %, tandis que le groupe a enregistré un recul de 5 %. 2022 a toutefois été l’occasion pour nos équipes, surtout au cours du dernier quadrimestre, de remporter de très beaux marchés qui vont nous permettre de développer notre activité, dans le cadre d’une croissance raisonnée, et surtout de retrouver une rentabilité durable. Nous avons réalisé un chiffre d’affaires de 225 millions d’euros l’an dernier et nous envisageons d’atteindre près de 290 millions d’euros en 2023, soit une progression de 30 %. Toutes les planètes sont en train de se réaligner pour le groupe.

 

JDF : Le récent changement d’identité de marque est‑il aussi là pour symboliser ce retour au premier plan de Gruau ?

PG : Le message est assez simple. Notre identité visuelle datait de 16 ans, ce qui veut dire qu’elle avait plutôt bien résisté à l’épreuve du temps. Le moment était venu de procéder à une modernisation de cette identité graphique. Nous la souhaitions plus premium, plus forte et aussi plus facile à positionner sur les véhicules. Nous avons la chance, sans prétention, d’avoir une image de marque et une notoriété que nous reconnaissent tous les professionnels. Et l’image, ça se cultive, ça s’entretient : elle fait partie de notre capital immatériel et culturel et nécessite qu’on y investisse régulièrement. L’évolution de notre identité a également été guidée par une nouvelle baseline qui est d’ailleurs proche de notre raison d’être : "Utily‑Terre par nature". Cela signifie que Gruau veut être utile à la Terre, c’est un engagement qui a du sens, qui correspond à nos valeurs et qui donne le ton de la réflexion que nous allons démarrer dans le cadre de l’actualisation de notre 7e projet d’entreprise, le Projet 2030.

 

L’objectif est que Gruau demeure une société familiale pendant de nombreuses années encore, en y associant le management.

 

JDF : Gruau est une entreprise familiale, est‑elle vouée à le rester ?

PG : À ce jour, le groupe est détenu par moi‑même et mes trois enfants à 90 %. La sagesse de la famille, de tout temps, a toujours été de concentrer le capital sur ses membres qui travaillent dans l’entreprise. Or, mes trois enfants sont au conseil de surveillance et mon fils développe les services pour le groupe. L’objectif est que Gruau demeure une société familiale pendant de nombreuses années encore, en y associant le management.

 

JDF : Pour revenir à votre secteur d’activité, le marché des VUL est fortement perturbé depuis deux ans. Voyez‑vous une amélioration, dans les mois qui viennent, quant à la disponibilité des véhicules chez les constructeurs ?

PG : Nous sommes partis dans l’idée que le premier semestre, lors de la constitution de notre budget, allait être aussi difficile que l’ont été les trois derniers semestres. Nous souffrons de difficultés d’approvisionnement depuis mi‑2021. Nous pensons donc que cela va durer encore un peu mais que la situation va ensuite aller en s’améliorant, tout du moins nous l’espérons. Mais très sincèrement, lorsque nous posons la question à nos partenaires constructeurs, ils ont un peu de mal à nous répondre, il y a encore une part de flou et notre performance sera désormais liée, dans tous les cas, à notre capacité à gérer ces incertitudes de façon permanente.

 

JDF : Avec la start‑up Flex’n Moov, Gruau s’est positionné sur le secteur de la mobilité urbaine "légère". Quelles sont vos ambitions dans ce domaine ?

PG : Cette jeune structure s’épanouit au sein du groupe Gruau avec des produits nouveaux. Nous sommes en train de bâtir ce que l’on appelle un bouquet d’offres (véhicules + services) qui va du deux‑roues au petit quatre‑roues. Il s’agit de véhicules exclusivement électriques. Nous en sommes au démarrage, c’est une nouvelle activité qui est en train de prendre corps. Cette start‑up est ouverte à toutes les solutions qui existent pour carrosser ces produits. Certains acteurs nous sollicitent même pour les industrialiser. Je rappelle que l’un des savoir‑faire de Gruau est aussi de construire des véhicules. Nous l’avons prouvé notamment du temps du Microbus électrique. En l’occurrence, ceux qui viennent frapper à notre porte sont plutôt de petits constructeurs qui viennent chercher chez Gruau deux choses : des solutions d’industrialisation et/ou de carrossage. Ils vont trouver chez nous tous les types de carrosseries dont ils ont besoin, que ce soit pour de la livraison du dernier kilomètre, pour de l’isotherme, pour de la voirie… Nous sommes à disposition de ces nouveaux acteurs disruptifs avec toute notre gamme de produits.

 

Nous avons été sollicités par des acteurs du rétrofit pour assurer la partie industrielle de leur activité

 

JDF : Êtes‑vous, par exemple, en contact avec des acteurs du rétrofit ?

PG : Nous travaillons le sujet. Oui, nous avons été sollicités par des acteurs du rétrofit pour assurer la partie industrielle de leur activité. Nous sommes en cours d’identification des meilleurs partenaires. Il est certain que le marché du rétrofit va évoluer très sensiblement dans les deux ou trois prochaines années et nous souhaitons y prendre part.

 

JDF : Plus globalement, comment adaptez‑vous vos produits aux utilitaires électriques qui sont appelés à monter en puissance ?

PG : Pour vous répondre, je vais prendre un exemple. Nous sommes le premier partenaire des pompiers pour les ambulances avec nos trois marques que sont Sanicar, Gifa et Picot. Il n’y a plus une seule discussion avec cette clientèle sans que ne soit abordé le sujet de l’électrification et de nos offres sur les véhicules électriques. D’autres secteurs se posent également la question. Nous avons récemment échangé avec une entreprise de travaux publics qui souhaite électrifier sa flotte à hauteur de 20 %. Nous avons adapté notre offre mais ce n’est pas toujours facile. Je pense notamment aux véhicules frigorifiques que nous réalisons. Pour faire du froid, nous sollicitons normalement le moteur et sur l’électrique, nous sommes obligés d’avoir des technologies qui sont un peu différentes. Le sujet de la charge utile est aussi très important et en l’occurrence, le poids de nos transformations a bien évolué à la baisse. Là encore, le savoir‑faire de nos techniciens en matière de conception de véhicules nous est très utile. Nous sommes prêts pour le véhicule électrique et demain, pour le véhicule à hydrogène.

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