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La nouvelle TVTS bouscule les certitudes

Publié le 27 janvier 2006

Par David Paques
8 min de lecture
Evoquée durant l'été, dévoilée à demi-mot à l'automne, la nouvelle loi de finance a finalement été votée par les députés le 31 décembre dernier. Depuis le 1er janvier 2006, la fiscalité relative à l'utilisation des véhicules dans un cadre professionnel est ainsi totalement remaniée. Exit les...
Evoquée durant l'été, dévoilée à demi-mot à l'automne, la nouvelle loi de finance a finalement été votée par les députés le 31 décembre dernier. Depuis le 1er janvier 2006, la fiscalité relative à l'utilisation des véhicules dans un cadre professionnel est ainsi totalement remaniée. Exit les...

...chevaux fiscaux, place au critère "pollution". Ce remodelage fiscal pousse entreprises, loueurs et constructeurs à revoir leurs copies.


Les professionnels de l'automobile grondent. Depuis le 1er janvier dernier et l'arrivée de la nouvelle loi de finance du gouvernement et de son volet relatif à la fiscalité automobile des entreprises, les critères de taxation des véhicules de société sont loin de faire l'unanimité. Si certains affichent d'ailleurs leurs doutes quant à sa véritable incidence sur l'environnement, la raison d'être de cette loi est pourtant on ne peut plus louable : taxer les véhicules coupables d'avoir de fortes émissions de CO2. Désormais, la puissance fiscale ne sera donc plus le critère de base pour le calcul de la TVTS. Pour les véhicules utilisés à partir du 1er janvier 2006, ce sont ainsi les émissions de dioxyde de carbone qui feront office d'étalon. En revanche, une particularité subsiste quant à la taxation des voitures en parc immatriculés avant cette date. La fiscalité qui s'y rapporte a également changé, mais pas selon les mêmes critères (voir tableau). Terminé le simple distinguo entre véhicules de moins de 7 ch et ceux de 8 ch et plus. Cinq nouvelles tranches ont, en effet, été éditées par le ministère de l'économie et des finances. Toujours basée sur le système des chevaux fiscaux, la taxe s'échelonne aujourd'hui de 750 e (pour les véhicules inférieurs ou égaux à 4 cv) à 4 500 e (+ de 16 cv), contre une amplitude allant de 1 130 e à 2 440 e avec les anciennes bases de calcul. Les sociétés n'ayant pas soudainement souscrit de nouveaux contrats dans les premiers jours de 2006, la majorité du parc national d'entreprises est ainsi concernée par ce pan de la réforme. Tout au moins jusqu'au renouvellement de leur flotte.

Vers un renouvellement rapide des contrats LLD ?

Concrètement, la mesure fait clairement le jeu des grandes entreprises. Les sociétés dont le parc de véhicules est d'une taille conséquente ont pour habitude d'optimiser le coût de la mobilité en optant pour des véhicules à faible puissance fiscale. Pour les autres, les PME, les TPE... dans lesquelles le plaisir est volontiers plus présent dans le choix des véhicules, la pilule risque d'être dure à avaler. Conséquence directe : les loueurs pourraient s'inquiéter de retours massifs de certaines voitures devenues trop coûteuses à exploiter dans un cadre professionnel. Sur ce point, pourtant, les acteurs de la LLD ne s'entendent pas. Certains estiment qu'il devrait y avoir une certaine latence dans le renouvellement des contrats, là où d'autres voient les petites entreprises s'affoler. "La fiscalité pousse parfois les gens à réagir d'une manière incompréhensible. Je pense que nous allons avoir un certain nombre de retours intempestifs de véhicules", pronostique ainsi Patrick Ginon, directeur commercial de GE commercial finance Celt. Pourtant,  le succès de certains véhicules déjà en circulation ne devraient pas être remis en cause par la réforme. Dans certains cas, la nouvelle base de calcul peut même apparaître comme une bonne chose.
Si la loi se fait, en effet, soudainement plus sévère avec certains véhicules, elle se fait également beaucoup plus clémente avec d'autres. Un exemple ? La Renault Clio 1,5 dCi 85 ch (117 g CO2/Km) voit sa taxe passer de 1 130 e à 1 400 e  si elle est déjà en parc, mais elle passe à 468 e, soit une baisse de plus de 60 % si elle est immatriculé à partir de  2005. A l'inverse, le C8 Hdi 110 ch de Citroën (186 g CO2/Km) voit sa TVTS augmenter de 147 %, passant de 1 130 e à 2 790 e. "Initialement, la loi visait clairement les 4X4 et les routières à grosses cylindrées. Nous n'avions pas perçu l'impact qu'elle aurait sur les monospaces", témoigne Gilles Bellemère directeur opérationnel d'ALD Automotive. Les Renault Espace, Peugeot 807 et autres Ford Galaxy font ainsi parti des victimes de cette nouvelle TVTS. De manière générale, la loi devrait en réalité avoir un impact positif pour les véhicules dégageant mois de 140 grammes de CO2 par km. D'ores et déjà, chacun s'entend d'ailleurs pour faire de ce seuil un nouveau point de référence fiscal, comme pouvait l'être auparavant celui des 7 chevaux fiscaux (voir tableau).

La taxation des IK : une affaire pour les loueurs ?

La ruée vers l'hybride annoncée ne semble donc pas être d'actualité. Une simple baisse du niveau général de motorisation est alors davantage à prévoir.  "Les constructeurs vont être obligés de suivre", finit par conclure Gilles Bellemère. La LLD suivra elle aussi et peut -être pour le meilleur...
En effet, l'esprit de la loi aurait souffert d'un manque de crédibilité si celle-ci avait fait l'impasse sur les indemnités kilométriques. Cela n'est pas le cas, la TVTS s'appliquera également pour les sociétés qui défrayent leurs collaborateurs pour l'utilisation de leurs véhicules personnels. Or, le barème est légèrement différent, mais risque d'avoir une réelle incidence sur l'activité LLD hexagonale. "La loi nous donne des arguments supplémentaires pour aller prospecter les entreprises qui avaient recours aux IK", estime Gilles Bellemère. Et Franck Lecornu de conclure : "S'il est difficile de quantifier le gain potentiel, les choses devraient se décanter rapidement. Nous en saurons plus dans les douze mois à venir".


David Paques






ZOOM

La chasse au CO2...


 Loin de se cantonner au simple changement de critère de calcu pour la TVTS, la loi de finance 2006 dévoile un éventail d'autres mesures pour pénaliser les véhicules les plus polluants. Les députés ont, par exemple, opté pour la mise en place de deux plafonds d'amortissements non déductible. Pour une société dont les véhicules rejettent moins de 200 g de CO2/km, l'amortissement fiscal du véhicule peut aller jusqu'à 18 300 euros TTC. Ce plafond est abaissé à 9 900 euros pour les véhicules dépassant le seuil de 200 g de CO2/km. En outre, pour les entreprises mais aussi pour les particuliers, la loi instaurera, au 1er juillet prochain, une taxe additionnelle pour les véhicules dont les émissions de CO2 dépasseront les 200 g/km. Entre 200 et 250 g/km, la loi infligera une taxe de 2 euros du gramme supplémentaire. Au-delà de 250 g/km, cette taxe passera alors à 4 euros du gramme. Elle sera payée en préfecture mais ira dans les caisses de l'Etat et non dans celles du département, comme la vignette. Celle-ci disparaît totalement à partir du 15 août prochain.






QUESTION A

Franck Lecornu, directeur d'exploitation DCS Fleet Management France.

"Nous allons tendre vers une standardisation des motorisations"


Journal de l'Automobile. En tant que loueur longue durée, craignez-vous les réactions des entreprises face à la nouvelle TVTS ?
Franck Lecornu. Dans les grandes entreprises, c'est assez structuré et il n'y a pas de grandes surprises à attendre. En revanche, chez les PME ou les professions libérales, qui sont beaucoup plus autonomes dans le choix des véhicules et des motorisations, il devrait y avoir des conséquences. Souvent, ces entreprises ont des véhicules un peu plus haut de gamme. Ce que nous prévoyons, c'est qu'ils vont descendre de motorisation ou de gamme. Je ne pense pas que cette nouvelle loi de finance influe sur le nombre de véhicule. Elle va simplement avoir un impact sur le choix des véhicules.


JA. Justement, quel type de véhicule risque d'être sollicité ?
FL. Je pense que les clients vont désormais éviter les grosses cylindrées. Cela me paraît logique. En revanche, il est possible que certains choisissent de reporter leur plaisir sur le taux d'équipement. En ce qui concerne les motorisations, nous devrions retrouver un parc LLD où beaucoup de véhicules seront semblables. Nous pouvons donc dire que nous allons tendre vers une standardisation du parc national d'entreprise.


JA. Et au niveau des motorisations ?
FL. Si personne ne veut de l'électrique, nous n'allons pas l'imposer. Je pense que la solution est davantage vers l'hybride et les carburants alternatifs. Entre la raréfaction du pétrole et la surcapacité de l'agriculture européenne, les choses se croisent assez bien pour voir germer une énergie de substitution. Mais dans l'immédiat, la solution est donc l'hybride.


JA. Vous attendez-vous à des retours massifs de véhicules devenus trop coûteux ?
FL. Je pense qu'il va y avoir un décalage dans la décision de certaines entreprises. Il est trop coûteux de rompre un contrat. Aussi je ne pense pas assister à un retour massif des véhicules à forte motorisation. Cela va accélérer leur retour, mais pas dans l'immédiat.


JA. Y-a t-il un aspect de la loi qui vous inquiète ?
FL. Si nous nous en tenons à notre point de vue professionnel, nous préférons avoir un mix large plutôt que d'avoir trois voitures à proposer à la revente. Dans les deux ou trois ans à venir (délais de revente des véhicules oblige), c'est là le seul point qui peut apparaître comme potentiellement dangereux.

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