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La longue et sinueuse route de la décarbonation

Publié le 24 octobre 2024

Par Damien Chalon
4 min de lecture
Zoom de l’Arval Mobility Observatory – La neutralité carbone est un objectif partagé au niveau mondial, mais la route pour l'atteindre est encore longue. Des grandes puissances comme la Chine ne peuvent se passer, à ce stade, des énergies fossiles pour alimenter leur croissance.
Tribune Arval décarbonation
La route vers la neutralité carbone est encore longue à l'échelle mondiale. ©AFS

Pendant six jours, les amoureux de voitures ont pu déambuler dans les allées du Mondial de l’Automobile et découvrir les nombreux véhicules électriques dans lesquels ils rouleront un jour, au nom de la décarbonation de la planète et de la préservation du climat. Ces véhicules, ils viennent pour certains d’usines françaises, mais le plus souvent d’un peu partout dans le monde, et de Chine notamment.

 

Les remparts mis par les autorités européennes (surtaxes douanières) ou françaises (bonus écologique) apparaissent bien fragiles face à l’arrivée massive et inexorable des voitures chinoises, meilleur marché que leurs homologues occidentales. Car les mêmes constructeurs automobiles qui s’offusquent de la concurrence chinoise, sont aussi ceux qui ouvrent les portes du marché européen à des marques chinoises, dans le cadre de partenariats commerciaux.

 

Les malheureux clients à la recherche d’une voiture neuve, ont de quoi attraper la migraine face à tant de contradictions. Même constat pour les gestionnaires de parcs d’entreprise, de qui on exige qu’ils "verdissent" coûte que coûte les véhicules proposés à leurs collaborateurs, faute de quoi des pénalités financières pourraient s’appliquer.

 

Cette frénésie de décarbonation, "quoi qu’il en coûte" pour l’usager final puisque, dans le même temps, les aides à la transition écologique fondent comme neige au soleil, confine parfois à l’overdose.

 

Le PDG de TotalEnergies, Patrick Pouyanné, ne dit pas autre chose dans une récente interview à l’Express, lorsqu’il estime qu'il faut "trouver un chemin raisonnable de transition" énergétique sans invoquer "la fin du monde" face au réchauffement climatique et lorsqu’il dénonce un "retour à une forme d'obscurantisme".

 

"À en croire certains, il faudrait arrêter de produire du pétrole et du gaz du jour au lendemain et tant pis si c'est le chaos derrière. Lancer de tels anathèmes est déraisonnable : notre monde vit avec ces énergies-là. Ce qui ne veut pas dire qu'il ne faut pas investir massivement dans les énergies décarbonées, au contraire, pour réussir la transition", explique le patron du quatrième pétrolier mondial.

 

Avec un pic de consommation de pétrole dans le monde qui interviendra "quelque part entre 2030 et 2040", notamment à cause de la demande de la Chine, il est nécessaire de trouver un chemin intermédiaire entre-temps. Réduire le plus possible le recours aux énergies fossiles, tout en gardant des marges de manœuvre suffisantes pour investir dans le renouvelable.

 

La Chine, plus gros émetteur de gaz à effet de serre, affiche cette ambition. Selon un think-tank basé à Helsinki, le Centre de recherche sur l’énergie et l’air pur (CREA), elle doit mettre à jour ses engagements en matière de réduction de ses émissions, et se fixer un objectif de réduction de 30 % d’ici 2035. Jusqu’alors, Pékin s'est engagé à stabiliser ses émissions de CO2 d'ici à 2030, puis à atteindre la neutralité carbone d'ici 2060.

 

Selon les dernières communications du Conseil chinois de l’électricité (CEC), les énergies non fossiles ont progressé de 80 % depuis 2021 et représentent près de 40 % de la consommation électrique du pays. Toutefois, la route vers la neutralité carbone est encore bien longue pour le régime.

 

Car à plus de 10 000 km de Pékin, sur les longues routes et autoroutes d’Afrique du Sud, les convois de camions transportant du charbon à destination de la Chine, sont légion. Les mines à ciel ouvert sud-africaines alimentent la quinzaine de centrales à charbon du pays pour produire près de 80 % de l’électricité consommée. L’Afrique du Sud ne dispose, à date, que d’une seule centrale nucléaire à proximité du Cap. Quant aux énergies renouvelables, elles ne représentent que 7 % du bilan énergétique national pour le moment.

 

L’Afrique du Sud n’a donc pas d’autres choix que de poursuivre son activité minière. Ce qui fait les affaires… de la Chine. Car parmi les milliers de camions qui transportent chaque jour le charbon extrait des grandes régions minières (notamment la province du Mpumalanga), une bonne partie prend la direction du port de Richards Bay, dans la province du KwaZulu-Natal en bordure de l’océan Indien, direction ensuite l’Empire du soleil levant.

 

La décarbonation arrivera sans doute un jour dans les grandes économies mondiales, y compris les plus pollueuses de la planète. Mais aujourd’hui, les énergies fossiles restent incontournables pour un certain nombre d’entre elles, même pour celles qui se montrent les plus actives sur le plan du commerce international.

 

L’Arval Mobility Observatory

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