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Julien Chabbal, Alphabet France : "Continuer à placer l’humain et la proximité au cœur de notre stratégie"

Publié le 2 novembre 2023

Par Damien Chalon
11 min de lecture
Quelques semaines après sa prise de fonctions, le nouveau président-directeur général d'Alphabet France livre sa vision du marché de la location longue durée, tout en rappelant les valeurs propres à l'entreprise. Julien Chabbal entend s'inscrire dans les pas de son prédécesseur, Stéphane Crasnier.
Julien Chabbal Alphabet France
Julien Chabbal, nouveau PDG d'Alphabet France. ©Florian Léger

Le Journal des Flottes : Vous avez pris la direction d’Alphabet France début septembre, après avoir occupé le poste de directeur des ventes et du marketing. Quel premier regard portez-vous sur l’entreprise en tant que PDG et sur le marché de la LLD ?

 

Julien Chabbal : Je prends mes fonctions dans un contexte que je vais qualifier de très positif. Alphabet France s’inscrit dans une très bonne dynamique depuis cinq ans et le travail mené par le comité de direction précédent qui était menée par Stéphane Crasnier. Je veux vraiment m’inscrire dans la continuité de ce qui a été fait. Je suis particulièrement fier du travail qui a été réalisé par les équipes ces dernières années au cours desquelles l’entreprise a connu une belle croissance. Nos principaux indicateurs que sont la satisfaction de nos clients et de nos collaborateurs sont allés dans la bonne direction, mais aussi les KPI commerciaux. Cela ne doit pas s’arrêter. Nous devons garder ce qui a fait notre force et continuer à placer l’humain et la proximité au cœur de notre stratégie.

 

 

JDF : La croissance de la flotte est un élément important pour la plupart des loueurs. Chez Alphabet, ce n’était pas nécessairement le cas. Comptez-vous rester dans cet esprit-là ?

 

J.C. : Tout à fait, et je peux même aller plus loin en insistant sur le fait que notre rôle de conseil sera un succès s’il correspond à des usages. Que ce soit sur de l’électrification ou de la taille de flotte, ce que nous voulons avant tout c’est grandir sereinement et avant toute chose accompagner nos clients. Nous avons malgré tout connu une croissance de flotte assez forte ces dernières années. Alphabet France est aujourd’hui à plus de 100 000 véhicules sous contrat, et autant de conducteurs qui nous font confiance. Nous ne nous fixons pas pour objectif à deux ou trois ans d’avoir 90 % de véhicules électrifiés ou 110 à 120 000 véhicules en parc. Ce nous voulons avant tout, c’est rendre un service de qualité en basant nos efforts sur la proximité.

 

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JDF : Cette notion de proximité est aussi mise en avant par tous vos concurrents. Comment Alphabet France se distingue dans ce domaine ?

 

J.C. : La première chose est que nous sommes convaincus qu’en prenant soin de nos collaborateurs et en les aidant quotidiennement par de nouveaux systèmes et de nouvelles formations, nous serons à même de mieux conseiller nos clients. Nous investissons beaucoup sur la formation, sur le développement et la mobilité de nos collaborateurs. Par exemple, nos commerciaux ont une formation assez poussée sur la relation que nous pouvons et devons avoir avec des clients dans un contexte qui est mouvant. Donc là, je ne vous parle pas de fiscalité, de connaître le temps de recharge d'une voiture mais vraiment du comportement à adopter dans la relation commerciale pour arriver à bien comprendre les besoins d'un client et livrer ce qui est attendu. De la même façon, nous avons mis en place un centre d'interaction client qui permet à ces derniers, pour des demandes simples, d'avoir des réponses très rapides. Cela permet de dégager du temps à nos équipes pour travailler sur des sujets de fonds et de valeur ajoutée.

 

 

JDF : Quels sont les sujets sur lesquels vous êtes le plus sollicités par vos clients ?

 

J.C. : Les trois grands défis du moment sont la rationalisation de leurs activités, la digitalisation dans le sens où ils ont besoin de réponses rapides, claires et précises, et la responsabilisation de la mobilité. Même si nous retrouvons ces trois défis majeurs dans la plupart des discussions avec nos clients, elles se situent à des niveaux variés, et c’est là que notre métier devient passionnant. Dans la phase de découverte, nous allons pouvoir cerner le degré d’importance accordé à ces sujets. Quand nous parlons de responsabilisation de la mobilité par exemple, nous analysons la flotte pour voir si elle composée de gros rouleurs ou de véhicules utilitaires par exemple. Nous voyons avec le client s’il veut faire un premier pas pour être en conformité avec la loi d'orientation des mobilités ou s’il a une vision de la RSE qui est déjà très poussée avec l’ambition de passer sur du 90 % électrique d'ici la fin d'année. Donc là on revient sur les usages, sur l'écoute et la proximité pour calibrer les bonnes réponses.

 

41 % de nos commandes concernent des véhicules électrifiés

 

JDF : Comment cela se traduit-il dans les commandes de véhicules, notamment en modèles électrifiés ?

 

J.C. : Globalement, ce que nous constatons, c'est toujours cette triangulaire entre trois facteurs qui amène le marché à avancer vers une mobilité électrifiée. Il y a tout d’abord l’offre des constructeurs qui se compose aujourd’hui de plus de 100 modèles électriques disponibles en France. C’est à saluer. Tous ces produits sont la conséquence d’investissement importants pour avoir des autonomies, une digitalisation et un plaisir de conduite qui est toujours bien présent. La 2e composante est la demande de nos clients qui ont une vraie appétence pour rouler. Rappelons que quatre déplacements sur dix en France font moins de quatre kilomètres et que les Français font en moyenne 25 kilomètres par jour. Dans ce cadre, certaines motorisations comme électrique ou l'hybride sont pertinentes. Il y a enfin, en 3e facteur, le législateur, qui prend pleinement part à l’évolution de la mobilité. Je pourrais ensuite ajouter le rôle joué par Alphabet en tant que conseil en mobilité. Tout ceci fait que nous avons aujourd’hui 41 % de nos commandes qui concernent des véhicules électrifiés.

 

 

JDF : Se dirige-t-on vers une réduction de la voilure dans les flottes d’entreprise ?

 

J.C. : Ce qui est sûr, c'est que nous avons vu, après la Covid, que les usages ont évolué. Et c’est là tout le charme de la location longue durée qui a permis de s'adapter aux besoins des clients. En moyenne, chez les des TPE/PME, nous avons constaté une baisse du kilométrage mensuel d’environ 150 km, et de 250 km chez les grands comptes. Donc là, nous avons dû nous adapter. Il a aussi fallu jongler avec les attentes de livraisons et donc étendre les contrats. Nous constatons désormais, et c'est une très bonne chose, que de plus en plus d'entreprises qui se posent des questions sur le crédit mobilité commencent à franchir le pas. Pour autant, est-ce que l’on peut parler de la fin du véhicule de fonction ou même d’une réduction de voilure sur le nombre de véhicule, non, je ne crois pas. Parce que cela reste un outil de production et de motivation. Chez Alphabet, nous croyons à cette multimodalité de la mobilité et donc aux différentes possibilités qui s’offrent aux salariés.

 

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JDF : Sur le sujet des délais de livraisons et des délais d'attente, sommes-nous revenus à une situation à peu près normale ?

 

J.C. : Nous revenons progressivement à des délais plus raisonnables, sans pour autant retrouver ce que nous connaissions avant la pandémie. Le marché automobile a été profondément transformé et ce que nous constatons aujourd’hui, c’est que la situation ne s’améliore pas forcément sur notre portefeuille de commandes. En revanche, les délais annoncés par les constructeurs, c'est une très bonne chose, sont en train de descendre. Donc pour moi, les délais de livraison vont s'améliorer principalement à partir du deuxième semestre de l'année prochaine.

 

 

JDF : La fiscalité automobile évoluera en 2024, notamment au niveau du bonus. Est-ce un sujet d’inquiétude ou tout du moins d’interrogation chez vos clients ?

 

J.C. : Chaque année, nous menons des campagnes d’information auprès de nos clients à partir du mois de septembre, tout en étant très vigilants puisque les textes de loi ne sont pas encore votés à cette période. Nous avons aussi un outil, Fiscality Next, qui permet à nos commerciaux de commencer à faire des simulations. Il est évident qu’un véhicule qui est commandé aujourd'hui sera livré après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi de finances. Il sera donc impacté. Avec cet outil fiscal, nous estimons les impacts qu’il pourrait y avoir. Nous le faisons avec des pincettes puisque la loi n’est pas votée, mais c’est aussi notre devoir de conseil d'alerter les clients, à la fois sur le bonus, mais aussi sur d’autres sujets comme le malus au poids. Je tiens toutefois à préciser qu’il n’y a jamais de réelle surprise, nous savons que les barèmes évoluent chaque année. Nos clients sont bien conscients de cela et nous les aidons à prendre les meilleures décisions.

 

Il a fallu ouvrir les catalogues pour pouvoir conserver une certaine agilité

 

JDF : Le nouveau bonus vise notamment à stopper l’arrivée des marques chinoises. Avez-vous constaté un intérêt à leur égard de la part de vos clients ? Commencent-elles à être référencées dans les car policy ?

 

J.C. : Ce que nous constatons, avant même l'arrivée de ces nouvelles marques, c’est que les car policy s’ouvrent de plus en plus. Cela fait partie des conseils que nous donnons à nos clients. Avec l’allongement des délais de livraison et la crise des semi-conducteurs, il a fallu ouvrir les catalogues pour pouvoir conserver une certaine agilité et ainsi trouver les modèles qui allaient correspondre aux prix, à l'usage et aux délais de livraison souhaités par nos clients. Ces nouvelles marques qui arrivent viennent amplifier ce phénomène d’ouverture des car policy. Pour moi, c’est une bonne chose parce que cela permet d'être opportuniste. Donc oui, nous avons de plus en plus de questions à ce sujet. Nous regardons de très près la technologie de ces voitures et également la façon dont l’après-vente est géré. C'est un risque que nous, en tant qu'acteurs de la mobilité, nous prenons et que nous ne voulons pas faire porter aux clients. Le véhicule est un outil de motivation mais aussi un outil de production et donc il faut que nous nous assurions que les voitures que nous mettons à la route puissent être facilement réparables. Ma conviction est que ces marques vont davantage pénétrer le marché par le biais des particuliers dans un premier temps, plutôt que par celui des entreprises.

 

 

JDF : Le marché est-il en train de se détendre au sujet des remises constructeurs ?

 

J.C. : Je pense que nous allons arriver effectivement sur une période où il y a des efforts qui vont être consentis à nouveau du côté des constructeurs, parce que les usines rattrapent leur retard et vont pouvoir produire de plus en plus de véhicules.

 

Étendre un contrat est une très bonne chose, mais il faut éviter de se retrouver avec des véhicules fortement vieillissants

 

JDF : Quelle est la dynamique de prises de commandes chez Alphabet ?

 

J.C. : Il y a toujours en fait une volatilité qui est assez forte sur l'année. Ce que nous pouvons noter est que la saisonnalité de 2023, 2022 et 2021 n'est pas du tout celle des cinq années précédentes. Il y a quelque chose qui s'est passé. Nos clients anticipent effectivement parfois des hausses de tarifs et de prix catalogue. Ils ouvrent également leur car policy et fonctionnent, pour certains, de plus en plus sur des lots et des opportunités qu’ils vont pouvoir faire en concentrant le volume. Je crois qu'il faut oublier la façon dont le marché fonctionnait auparavant. Toujours est-il que nous avons pris beaucoup de commandes en 2023 et je pense que la fin d'année sera assez forte à ce niveau. C’est lié, comme tous les ans, au vote du projet de loi de finances, mais à cela vient aussi s’ajouter aujourd’hui le renouvellement des contrats qui ont été allongés ces dernières années.

 

 

JDF : La tendance est-elle toujours à l’allongement des durées des contrats ?

 

J.C. : Nous revenons à des durées qui sont plus courtes. Étendre un contrat est une très bonne chose, mais il faut éviter de se retrouver avec des véhicules fortement vieillissants. Les allongements étaient justifiés au moment des pénuries. Maintenant, il faut, je pense, revenir à quelque chose de plus classique.

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