Comment l’écoscore et le leasing social ont façonné le marché de l’électrique ?

La réglementation, la fiscalité et les mécanismes d’accompagnement ont souvent été des leviers puissants qui ont façonné le marché de l’automobile en France. Les récents dispositifs instaurés par le pouvoir exécutif en sont une nouvelle fois la preuve.
La direction générale des entreprises (DGE), structure rattachée au ministère de l’Économie, a fait les calculs. L’écoscore et le leasing social, deux dispositifs déployés en 2024, ont eu les effets escomptés.
Dans le propos introductif de son "Théma" de décembre 2025, la DGE a déterminé que la diminution de la part des modèles assemblés hors de l’UE observée en 2024 s’explique "à environ 20 % par l’effet du dispositif de leasing social conditionné par l’écoscore, à 40 % par l’effet prix du recentrage des aides sur les modèles existants et à 40 % par des effets hors prix, dont l’introduction de nouveaux modèles éligibles à l’écoscore."
Vers un écoscore européen ?
Rappelons que la motivation première de ces mesures était de remettre au centre du jeu les productions électriques européennes. Jean Langlois-Meurinne, conseiller spécial en charge de l’automobile auprès du ministre délégué de l’Industrie, Sébastien Martin, affirme qu’avant 2024, "la concurrence internationale, notamment chinoise, sur le véhicule électrique était de plus en plus forte. Le risque était alors de voir une vague d’acteurs étrangers déferler."
Les pouvoirs publics ont vite identifié le sujet et décision a été prise d’orienter la demande vers des voitures électriques produites dans des "conditions vertueuses", souligne Jean Langlois-Meurinne. "L’Europe, poursuit-il, est la zone géographique où les conditions de production sont les plus vertueuses au monde".
L’élément fondateur de cette réaction politique a donc été la création de l’écoscore, en décembre 2023, ce qui a permis "de donner un signal de marché clair et d’encourager les décisions d’achat en combinant les bénéfices environnementaux et la production locale", ajoute le conseiller ministériel.
Ce mécanisme s’est traduit par un croisement des courbes sur le marché de l’électrique. Les modèles non éligibles sont passés de 60 % de pénétration fin 2023 à 15 % environ en l’espace d’un trimestre. Radical et efficace.
Reste que la France apparaît isolée en Europe. Le gouvernement milite pour que l’UE s’empare du sujet de la souveraineté européenne. "Il est assez étonnant que nous nous posions la question de préférer l’Europe alors que nous sommes Européens, sachant que dans le même temps toutes les autres grandes zones jouent la carte locale, glisse Jean Langlois-Meurinne. Il déplore que l’Europe soit hésitante. La révision de la réglementation prévue le 16 décembre 2025 pourrait être l’occasion d’y remédier.
Le leasing social a rempli sa mission
À ce dispositif de l’écoscore est venu s’ajouter celui du leasing social, en janvier 2024, avec le souci d’orienter ici la demande vers les ménages les plus modestes. Tout en s’appuyant sur l’écoscore. D’après les données fournies par l’Agence des services et de paiement (ASP), 47 000 dossiers de leasing furent financés et non 50 000. Certains clients se sont rétractés ou des véhicules ont été livrés après la date limite du 30 septembre.
Les principaux modèles bénéficiaires ont été la Peugeot 208 (12 000 unités), la Renault Megane (6 000), la Peugeot 2008 (5 000), la Renault Twingo (5 000) et la Citroën C4 (3 000). Les immatriculations liées au leasing social ont représenté près d’un quart des immatriculations de véhicules électriques neufs par les ménages en 2024.
Le leasing social a surtout permis aux ménages les plus modestes d’accéder plus facilement à l’électrique. En 2024, les déciles D1 à D5, seuls éligibles au dispositif, ont représenté 48 % des immatriculations de véhicules électriques subventionnés, via le bonus ou le leasing social, à particulier. En écartant le leasing social, cette part tombe à 25 %.
La DGE constate toutefois que "l’effet du leasing social semble le plus fort pour les ménages appartenant aux déciles D3-D5, ce qui suggère que ce dispositif ne lève pas tous les freins à l’achat de véhicules électriques neufs pour les ménages les plus précaires".
Les entreprises accélèrent
À titre d’exemple, les ménages du D2 ont été à l’origine de 4 057 immatriculations de voitures électriques subventionnées grâce au seul bonus et de 6 772 avec le leasing social. Soit seulement 7 % des électriques subventionnées en 2024. Le décile D1 a été encore moins pourvu avec 2 500 immatriculations environ.
Notons également que seuls les modèles écoscorés étaient éligibles au leasing social et que sur les 47 000 dossiers validés, 18 % ont concerné des voitures fabriquées en France. "Cela signifie que ce dispositif a contribué à augmenter la part de marché des véhicules fabriqués en Europe, et a fortiori en France", souligne la DGE. L’édition 2025 du leasing social, ouverte le 30 septembre, n’a pas encore livré son verdict et son impact sur le marché de l’électrique.
L’année 2025 a également été celle du réveil des entreprises grâce, là aussi, à des mesures fortes. La réforme des avantages en nature de février 2025 favorise nettement les modèles électriques écoscorés, à quoi vient s’ajouter la taxe annuelle incitative (TAI) visant à pénaliser les entreprises en retard sur le verdissement de leur flotte. La DGE estime que ces deux mécanismes "entraînent une accélération du verdissement des flottes en 2025."
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