Quand de nouvelles règles comptables inquiètent toute une profession

Une véritable “usine à gaz”. Voilà comment le secteur de la location considère le projet relatif au traitement comptable des contrats de crédit-bail et de location longue durée publié à la mi-août par les organismes européens et américains IASB (International Accounting Standard Bord) et FASB (Financial Accounting Standards Board). Devant être finalisé à la mi-2011 pour une entrée en application auprès des entreprises cotées au plus tard en 2013 (peut-être toutes les autres, par la suite), il a été conçu afin de réconcilier les approches comptables américaines et européennes mais aussi afin de lutter contre certains abus qui ont vu certaines sociétés ne pas intégrer à l’actif de leur bilan des biens qui auraient dû l’être (avions, biens immobiliers, hôpitaux…). “Quelques milliers de contrats déconsolidants ne doivent pas occulter des millions de contrats d’authentiques locations opérationnelles sur des équipements standards”, relève toutefois Vincent Rupied, administrateur et président de l’Automotive Steering Group chez Leaseurope, une fédération qui représente des sociétés de crédit-bail et de location à travers toute l’Europe. Les deux parties intervenant dans un contrat de location seront quoi qu’il en soit impactées par le projet de l’IASB et du FASB. Ainsi, si actuellement, dans le cas du crédit-bail, les locataires doivent comptabiliser dans leur bilan les actifs loués, et dans le cas de la location longue durée, présenter leurs engagements dans des notes jointes à leurs comptes, demain, ils devront tous appliquer la règle dite du “droit d’usage”. Ici, le locataire reconnaîtra dans tous les cas un actif et un passif au bilan, l’actif représentant le droit d’utiliser le bien objet du contrat et le passif une obligation de verser des loyers. Bref, chaque locataire devra faire de la prospective. En effet, il va devoir évaluer, tous les ans et pour chacun de ses véhicules, la durée probable de chaque contrat et les loyers futurs, autant de paramètres qui peuvent varier dans le secteur de la location longue durée. “L’adaptation des mensualités en fonction du kilométrage effectivement parcouru devient d’une complexité déraisonnable, souligne ainsi la Fédération Nationale des Loueurs de Véhicules ou FNLV. L’IASB/FASB a méconnu dans la location longue durée le caractère de financement de l’usage avec tous les services qui y concourent, pour n’y voir que le financement d’un actif.”
“Nous préférons la méthode dite de “dé-comptabilisation””
Le loueur est-il logé à meilleure enseigne ? Pas vraiment. En effet, la deuxième partie au contrat devra faire un choix entre deux méthodes, à savoir celle dite de “dé-comptabilisation” si le loueur transfert la totalité du risque chez le locataire ou celle dite “d’obligation d’exécution” s’il la conserve. Dans le premier cas, la part de l’actif cédée au locataire en vertu du contrat n’est plus reconnue dans ses livres et dans le second il conserve la totalité de l’actif loué dans ses livres mais enregistre aussi des loyers à recevoir et un passif qui correspond à son obligation de fournir un actif à son partenaire pendant toute la durée du contrat. “Nous préférons pour notre part la méthode dite de “dé-comptabilisation””, indique Vincent Rupied, ce responsable considérant néanmoins qu’elle devrait être complétée par une désactualisation des VR. Si elle a pour effet d’entraîner une comptabilisation de la plus-value surtout sur le dernier exercice du contrat, elle n’est pas en contradiction avec la méthodologie appliquée du côté du locataire, contrairement à la méthode dite “d’obligation d’exécution”. “Le locataire inscrit dès l’origine à son actif la pleine jouissance du bien alors que le loueur ne s’acquitterait que progressivement de son obligation de mise à disposition”, explique la FNLV. Leaseurope estime au final qu’une obligation revue et étendue des engagements hors bilan produirait plus de transparence que le nouveau système proposé, le tout-au-bilan en passe d’être validé étant synonyme à ses yeux de trop d’évaluations et de trop de calculs probabilistes. “Il va impacter les ratios prudentiels avec le poids du droit d’usage dans les contrats et complexifier plusieurs opérations en remettant en cause certains principes comptables”, prévient l’administrateur et président de l’Automotive Steering Group de Leaseurope. Cette fédération estime que si le principe du droit d’usage au bilan devait être conservé, il faudrait néanmoins revenir à une comptabilisation simple, c’est-à-dire caractérisée par un parallélisme entre les deux parties au contrat, et redéfinir le champ d’application du projet et les types de locations auxquelles il s’applique (exclure les loyers variables et les actifs remplaçables).
Laisser un commentaire
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.