Parlez-vous CSRD ?
Il y a bien sûr l’environnement économique incertain, le contexte géopolitique toujours tendu, les conséquences de l’inflation. Il y a aussi, pour ceux qui doivent gérer des parcs automobiles, l’obligation d’accélérer la transition énergétique qui se traduit par le renouvellement de leurs véhicules avec des modèles électriques. Dans ce domaine, début 2024, la donne changera en matière de bonus à l’achat ou à la location avec un resserrement des conditions d’éligibilité. Tous ces sujets, les dirigeants d’entreprise y sont familiers ; c’est leur quotidien en quelque sorte.
Ce n’est pas le cas de la nouvelle directive européenne qui les attend à partir du 1er janvier 2024. À cette date, il va leur falloir intégrer dans leur quotidien et celui de leurs équipes, la CSRD, pour Corporate Sustainability Reporting Directive.
Mi-décembre, la France a été le premier pays européen à transposer cette directive (Journal Officiel du 7 décembre), qui impose aux entreprises de publier des données extrafinancières, notamment sur le climat. Selon un calendrier très précis, elle concernera dans un premier temps les plus grosses entreprises et sera élargie, d'ici 2028, jusqu'aux PME. Tout le monde devra donc s’y soumettre (on parle de 50 000 entreprises en Europe, contre 11 000 concernées par l’ancien système).
Une nouvelle directive pour quoi faire, direz-vous ? Depuis 2015, les entreprises de plus de 500 salariés doivent déjà déclarer leurs performances extrafinancières. "On s’est rendu compte que faute d’une normalisation des contenus, il est très difficile de pouvoir comparer les efforts, les engagements des entreprises, les unes par rapport aux autres et sur la durée. Comme celles-ci peuvent de moins en moins compter sur des financements publics, il est impératif de pouvoir flécher les financements privés des banques et autres investisseurs, vers les plus vertueuses", explique Alan Fustec, fondateur de l’Agence Lucie, qui accompagne les entreprises dans leur démarche RSE.
Plutôt que d’avoir à éplucher des inventaires à la Prévert de ce que chacun croira avoir fait de bien pour l’environnement au sens large, la CSRD va normaliser les rapports extrafinanciers et améliorer la qualité des données publiées. En matière automobile, par exemple, il faudra communiquer les émissions carbones des parcs de véhicules, ce qui devrait accélérer sensiblement le verdissement de ces mêmes parcs.
Certains qualifieront l’arrivée de la CSRD, qui s’ajoute au Pacte Vert et autre Taxonomie, de "tsunami réglementaire sur la tête des entreprises". Car si les plus grandes sont familières des rapports extrafinanciers, c’est loin d’être le cas de celles qui ont entre 250 et 300 ou 400 collaborateurs. Chez elles, tout est à construire et vite.
"Il y a un point dont on ne parle pas, ajoute Alan Fustec. C’est le cas des entreprises de moins de 250 personnes qui travaillent pour des donneurs d’ordre de plus grande taille, soumis à la CSRD. Mécaniquement ces sous-traitants vont devoir respecter les critères de la CSRD, car leurs donneurs d’ordre ne pourront pas prétendre être responsables et prendre le risque de travailler avec des pollueurs par exemple".
L’onde de choc de la CSRD n’a donc pas fini de se faire sentir, avant même d’entrer en vigueur. Le "principe de double matérialité" facilitera-t-il la mise en conformité des entreprises, grandes et plus petites ? Derrière ce terme bien technocratique, se cache peut-être la démarche véritablement utile au monde économique : celle qui consiste à mesurer quel est l’impact de l’environnement au sens large sur une entreprise et l’impact de cette même entreprise sur son environnement.
Une double analyse qui permettra à chaque entreprise de voir comment elle se situe par rapport aux critères européens de durabilité (ESR) définis par la directive. "Rien ne sert de courir, il faut partir à point", disait Jean de La Fontaine. En l’espèce, il faudra quand même se "hâter lentement" pour ne pas être dépassé par l’ampleur de la tâche.
L’Arval Mobility Observatory
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