Les perspectives d'avenir de l'autopartage
Encore embryonnaire, le marché français de l’autopartage n’en est pas moins prometteur. Avec 120 000 abonnés pour un chiffre d’affaires estimé à 55 millions d’euros à l’horizon 2015, celui-ci devrait en effet être multiplié par plus de cinq par rapport à 2010, selon le scénario prévisionnel des experts de Xerfi.
Cette évolution est bien sûr significative. Pour autant, le volume d’activité reste celui d’un marché de niche. Avec 35 services d’autopartage recensés par Xerfisur sur le territoire français en 2012, le nombre de services en activité a été multiplié par plus de quatre depuis 2005. L’année 2011 aura notamment été marquée par la naissance d’Autolib’ à Paris et 2012 par le lancement de Car2go à Lyon.
L’auto en libre-service s’inscrit en réalité dans la tendance de refonte des transports dans les centres-villes (ouverture de lignes, accroissement du réseau existant, élargissement des horaires, etc.). Avec d’un côté des contraintes toujours plus fortes pour circuler et stationner en ville avec une voiture particulière, et, de l'autre, un coût de plus en plus prohibitif, le glissement vers une vision purement utilitaire de la voiture, déconnectée de la propriété, va s’accentuer. Ces tendances favorisent donc l’autopartage, intéressant financièrement sous la barre des 3 700 kilomètres par an.
Proximité et flexibilité, gages de réussite
Dans cette étude, supervisée par Vincent Desruelles, les experts de Xerfi ont formalisé les retours d’expérience dans le secteur afin d’identifier les principales conditions de réussite. Deux grands facteurs clés de succès ressortent de l’analyse. Le premier est la proximité, mise en avant par les utilisateurs de l’autopartage comme critère primordial de la qualité du service. Ce qui suppose un réseau de stations le plus dense possible et donc un investissement de départ conséquent. Le second facteur clé de succès est la flexibilité. Les utilisateurs sont en effet particulièrement sensibles aux facilités de réservations, annulations et à la disponibilité des véhicules.
Un retour sur investissement incertain
Essentiellement implantés dans les grandes villes, les services d’autopartage se sont développés sous trois modèles (communautaire, commercial et initiative publique) sans qu’aucun ne réussisse à ce jour à s’imposer comme référence. En effet, du fait de l’importance de l’investissement initial et des frais d’exploitation, les résultats des opérateurs montrent que la question du retour sur investissement à court ou moyen terme reste plus qu’incertaine. Pour l’heure, les services d’autopartage (pour lesquels les comptes sont disponibles) affichent quasiment tous des pertes d’exploitation. Privés ou publics, les opérateurs utilisent les services d’autopartage comme un outil de différenciation et, parfois, comme un vecteur de communication et d’image.
C’est notamment le cas du groupe Bolloré qui se sert du service Autolib’, à Paris, comme d'une vitrine géante pour sa Bluecar. L’exploitant Bolloré avance le chiffre de 80 000 abonnés pour parvenir à l’équilibre, envisagé à l’horizon 2018, en tablant sur des coûts d’exploitation de 80 millions d’euros par an. Le cas d’Autolib’ (5 000 abonnés inscrits en avril 2012) est en réalité emblématique d’une stratégie de diffusion à grande échelle de la voiture électrique. Le projet permet à Bolloré de communiquer massivement sur la Bluecar, de bénéficier d’un intérêt global de la collectivité pour la voiture électrique, d’évangéliser le marché et d’expérimenter à grande échelle la Bluecar sur ses aspects techniques.
Malgré ces problèmes récurrents de rentabilité, les motivations de chaque catégorie d’acteurs à être présents dans l’autopartage varient selon leur cœur de métier et leur positionnement :
- les constructeurs automobiles y voient donc un débouché de plus pour la voiture électrique. L’autopartage leur permet également d’expérimenter de nouveaux modèles de transport.
- les exploitants de transports urbains (Veolia Transdev et Keolis) le conçoivent comme un moyen de développement supplémentaire de l’intermodalité.
- les loueurs de véhicules, compte tenu de la proximité entre leur cœur de métier et l’autopartage, appréhendent ce service comme un excellent moyen de se positionner sur l’entrée de gamme (Europcar avec Car2Go à Lyon).
- les réseaux indépendants tentent quant à eux d’élargir le plus possible leur offre en privilégiant un positionnement B to B (le réseau Carbox a ainsi lancé une offre mutualisée interentreprises à Grenoble).
Alexandre Guillet
----------------
ZOOM - L'autopartage dans un gobelet ou l'innovation selon ADM
Une fois encore, la présence d’ADM au dernier concours Lépine est loin d’être passée inaperçue puisque la société a été auréolée d’un double titre. En effet, Dominique Mocquard, le patron de l’entreprise francilienne, est reparti avec la coupe du Maire de Paris et une médaille d’or. La deuxième de son histoire. Il faut reconnaître que sa Key Box est une véritable révolution, avec tout ce que cela comporte d’ingéniosité. En un mot, ADM est capable, en un tour de main, de transformer un véhicule lambda en un élément intégrant entièrement un programme d’autopartage. “Il nous faut à peine trente minutes d’intervention”, se félicite le responsable. Autant cet exploit est grand, autant le matériel nécessaire est petit. Au point de tenir dans le creux de la main ou dans un porte-gobelet, puisque c’est de cela qu’il s’agit, d’un boîtier aussi encombrant qu’une canette de boisson…
A l’intérieur, les ingénieurs spécialisés en plastronic sont parvenus à miniaturiser tout l’utilitaire car il faut souligner que la version de la Key Box récemment présentée est en fait issue de la 3e génération de développement. “A ses débuts, le dispositif tenait dans l’équivalent d’une petite valise, puis nous l’avons réduit à la taille d’une boîte à chaussures pour en arriver à celle d’un gros gobelet”, retrace Dominique Mocquard. On y trouve donc la carte mère du système, une puce RFID pour la partie géolocalisation, un logement pour la clé de contact, un petit écran monochrome pour les instructions, un haut-parleur et un micro pour les échanges vocaux avec l’extérieur. Un boîtier dont le verrouillage est sécurisé.
Les clients potentiels de la Key Box sont nombreux et variés. ADM peut tout aussi bien aller taper à la porte des professionnels que des collectivités locales ou des particuliers. “Nous allons mettre en ligne une plate-forme ou tout un chacun pourra gérer son propre système d’autopartage”, révèle le président fondateur d’ADM, qui n’a toutefois pas encore levé le mystère qui plane autour du prix.
Partenaire sur les projets de Renault
Au-delà de ce nouveau module, les solutions standardisées de transformations d’ADM dans le domaine de l’autopartage ont trouvé un écho favorable chez Renault. Le constructeur, qui a remporté l’appel d’offres de la ville de Saint-Quentin-en-Yvelines (78) avec sa Twizy, a en effet sollicité Dominique Mocquard pour transformer 50 exemplaires de son quadricycle. Concrètement, à la sortie des usines, les véhicules sont acheminés vers les ateliers d’ADM où les éléments de carrosserie sont démontés pour être sérigraphiés par un autre prestataire. La boîte à gants est modifiée pour recevoir les composants électroniques, le support de gilet et triangle de sécurité est couplé à l’antidémarrage, la clé de contact est supprimée et un système de téléphonie main-libre est installé. Une fois ces tâches réalisées, soit une journée de travail par unité, le véhicule repart chez Renault pour être rhabillé avant d’être livré au client.
De l’avis de son concepteur, ce kit de gestion d’autopartage est “très avantageux pour le constructeur car il est flexible et permet de travailler de toutes petites séries comme dans le cas de Renault”. Les négociations auraient d’ailleurs commencé pour la Zoé. L’histoire retiendra surtout qu’ADM avait déjà proposé cette alternative, baptisée “Vulog”, sur une Citroën C1, mais sans réel succès. “Nous voulons éviter au constructeur de s’embarquer dans un processus d’usinage qui l’engage sur des milliers d’exemplaires, dont il n’est pas sûr de vendre la moitié. Renault l’a bien compris et Veolia également”, se réjouit le P-dg d’ADM.
Dans son atelier et sur son parc, les inventions ne manquent pas. Si son volant à moyeux fixe avait trouvé un débouché sur la C4, sa C1 transformée en véhicule électrique (présentée au Mondial 2010) a dû rester dans l’ombre, recalée avant même de passer l’examen de l’Utac. Pourtant, à moindre frais, cette proposition industrielle permet de recycler des véhicules thermiques en véhicules écologiques. Cette Citroën C1/Peugeot 107 serait a priori deux fois moins chère à l’achat qu’une C-Zero/iOn. Mais les voies de la politique sont parfois impénétrables.
Gredy Raffin
Article écrit pour la Newsletter du véhicule électrique - Collaboration Avere-France - Journal de l’Automobile
Laisser un commentaire
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.