Les nouvelles mobilités à l’arrêt
Ce devait être la loi emblématique de l’An II du quinquennat d’Emmanuel Macron. Alors que les gilets jaunes paralysaient, semaine après semaine, l’action gouvernementale, le projet de Loi d’Orientation des Mobilités devait, lui, fixer un cap à dix ans pour désenclaver les territoires, réduire la pollution de l’air dans les agglomérations, faire émerger de nouveaux modes de déplacements, désintoxiquer les Français de la sacro-sainte voiture…
Trois mois de concertation, fin 2017, dans le cadre des Assises de la mobilité avaient servi de colonne vertébrale à ce projet ambitieux. Tout devait être ficelé et voté pour l’été. Las ! C’était compter sans les subtilités de la discussion parlementaire et des jeux d’influence entre les Chambres, qui plus est, lorsqu’elles ne sont pas du même bord politique.
Résultat : la loi LOM attendra la rentrée pour être un nouvelle fois discutée et adoptée… Que de temps et d’énergie perdus au nom de querelles politiciennes dignes de cet « ancien monde » que souhaite éradiquer le président de la République.
Car pendant ce temps, le réchauffement climatique, la santé publique et la lutte contre la pollution de l’air restent plus que jamais des enjeux majeurs. A preuve le dernier rapport de l’ANSES (Agence de sécurité sanitaire) qui milite en faveur de plusieurs scénarii de réduction des véhicules thermiques au profit de modèles électriques et surtout d’une réduction du volume de trafic routier en zone urbaine.
Réduire le trafic routier : sur le papier, tout ceci est bien joli, mais comment le traduire en actions concrètes et pérennes ? C’était justement tout le sens de la loi LOM avec l’extension des Zones à faibles émissions (ZFE), l’instauration d’un forfait mobilité durable dans les entreprises, le développement de la pratique du vélo, l’abaissement du seuil de déclenchement des plans de mobilités entreprise ou encore la fin programmée des véhicules thermiques en 2040.
Quoi qu’il en soit, les atermoiements politiques dont la France a le secret ne ralentissent pas le développement des nouveaux acteurs de la mobilité. Loin s’en faut. Et dans ce domaine, c’est désormais David qui vient parfois à bout de Goliath, comme le prouve le récent rachat d’iDVROOM, filiale de la SNCF par Klaxit, dans le covoiturage courte distance. Une acquisition qui propulse la start-up de Julien Honnart au premier rang européen des trajets courte distance domicile-travail avec près d’un million d’utilisateurs, soit deux fois plus que le même service de Blablacar.
Comme dans l’internet il y une quinzaine d’années, où les start-up se créaient en quelques clics, l’heure est désormais à la consolidation après le développement tous azimuts. Prenons l’exemple des trottinettes électriques : douze opérateurs à Paris, il y a encore quelques semaines et moitié moins aujourd’hui ! Une hécatombe qui prouve que le modèle économique reste à trouver et qu’il ne suffit pas d’installer quelques modèles sur les trottoirs pour générer du chiffre d’affaires, et que la sélection naturelle ne laisse que les plus adaptés et plus performants.
Le temps politique n’est pas celui du monde économique. Le dossier de la transition énergétique et des nouvelles mobilités le prouve, s’il en est besoin, une nouvelle fois. Plus « l’ancien monde » se rappelle à nous, plus on se languit du « nouveau ».
L’Arval Mobility Observatory