La voiture a-t-elle vraiment un avenir ?
Les semaines se suivent et ne se ressemblent pas pour l’industrie automobile. Il y a trois semaines, c’était la fête à Paris, porte de Versailles. Les politiques se succédaient sur les stands des constructeurs pour célébrer la fée "automobile", sa place incontournable dans l’histoire industrielle nationale, sa technologie, le savoir-faire des marques françaises, etc, etc.
La main sur le cœur, plusieurs ministres promettaient de préserver le made in France et la souveraineté économique du pays dans ce domaine. Au milieu d’un tel enthousiasme, on finissait par ne plus voir les menaces qui pèsent au-dessus de la tête de cette industrie tricolore, illustrées – notamment – par les stands des constructeurs chinois, venus en force dans la capitale, comme un pied de nez aux surtaxes douanières européennes qui se profilaient.
Moins d’un mois plus tard, changement de décor. Les spécialistes ont beau dire que ce Mondial de l’Auto a changé quelque chose dans le secteur, que les visiteurs déambulant dans les allées du salon ont remis du baume au cœur des constructeurs, le retour du Terre est rude.
Le marché automobile a encaissé en octobre la 6ᵉ baisse mensuelle d’affilée des immatriculations, les constructeurs tricolores font grise mine, les entreprises sont aux abonnés absents chez les distributeurs, alors qu’elles ont tiré l’ensemble de l’activité pendant de longues années. Enfin, l’environnement économique et fiscal est sombre pour la voiture.
Sur le terrain, les mauvaises nouvelles s’accumulent : le leader européen Volkswagen n’hésite pas à rompre avec une tradition historique, celle de ne pas toucher à l’outil industriel national. Étranglé par la concurrence chinoise, il annonce la fermeture de trois sites outre-Rhin. Il ouvre du même coup la boîte de Pandore en donnant la possibilité à d’autres constructeurs de lui emboîter le pas. On sait que Stellantis, par exemple, doit statuer d’ici mi-novembre sur l’avenir de ses sites français… L’hémorragie touche aussi les équipementiers, avec Michelin qui tire un trait sur deux sites en France et quelque 1 250 postes, à qui il va falloir malgré tout donner un avenir dans leurs bassins d’emplois respectifs.
Comment dans ces circonstances envisager sérieusement un avenir enchanté pour la voiture ? Les grandes villes n’en veulent plus ; Paris refuse depuis lundi qu’elles traversent l’hypercentre pour passer d’une banlieue à une autre. Les particuliers ont de moins en moins de budget disponible pour espérer acheter des modèles neufs.
Quant aux entreprises, entre alourdissement du malus écologique, de la fiscalité automobile en général, menaces de pénalités financières pour verdissement insuffisant de leurs parcs, augmentation des avantages en nature sur les véhicules thermiques, elles peuvent décider de jeter l’éponge et de renoncer à équiper leurs collaborateurs de voitures de fonction. La conséquence serait immédiate : un vieillissement du parc automobile français (déjà très vieux) assorti d’un coup d’arrêt à la décarbonation du parc roulant, puisque les collaborateurs privés de voitures de fonction, n’auraient pour solution que de s’équiper en véhicules d’occasion, par définition plus polluants car moins récents.
Toutes les études prouvent que les Français ont plus que jamais besoin de leurs véhicules et qu’ils ne sont pas disposés à s’en passer. Il faut rappeler les chiffres du covoiturage, en chute libre depuis la fin de la Covid-19, malgré un plan national en sa faveur. Or, la programmation pluriannuelle de l’énergie ne réserve pas des jours heureux pour la voiture.
La Stratégie nationale bas carbone (SNBC), dont les grandes lignes viennent d’être présentées, veut faire la part belle aux transports en commun, au ferroviaire ou à une politique nationale de car express. "Un car avec 30 personnes, c'est beaucoup moins de voitures sur la route", explique en substance le document. Quel avenir durable, dans ce contexte pour la voiture (même électrique), ses usines de fabrication ou encore ses réseaux de distribution ?
L’Arval Mobility Observatory
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