Gare à la surchauffe
Prenez l’exemple de la campagne « la honte de prendre l’avion » : rien à redire sur le papier, mais dans les faits, à l’heure de la mondialisation, qui est effectivement prêt à troquer sa place d’avion pour un billet en bateau, avec à la clé plusieurs heures ou jours de voyage, surtout si c’est dans un cadre professionnel ?
Bien sûr, tout le monde a encore en tête le discours enflammé de la jeune suédoise Greta Thunberg, nullement intimidée par le cadre solennel de l’ONU et qui n’a pas hésité à apostropher les dirigeants de la planète pour leur manque d’engagement en faveur du climat. Quant aux habitants de plusieurs capitales européennes (dont Paris), ils ont récemment expérimenté les blocages (pas toujours écologiques du reste) pour le climat menés par les activistes d’Extinction Rebellion.
Le sauvetage de la planète, de ses forêts ou encore de ses océans, passera-t-il donc par les jeunes, actifs ou non ? Pas si sûr, à en croire plusieurs études sur le sujet, qui dressent un portrait pour le moins mitigé de cette génération qui intrigue tant les entreprises. Comme l’indique Green Reflex, la filiale de Total spécialisée dans l’accompagnement à la transition environnementale, pour les Millennials qui ont grandi dès le berceau avec Internet, « l’intérêt collectif n’est pas leur priorité » et ils demandent à être convaincus par les discours autour du développement durable et de la consommation responsable.
D’ailleurs dans leur vie de tous les jours, les Millennials adoptent une manière de vivre éco-responsable à géométrie variable. Comme l’explique un sondage réalisé en Février par Pinterest, les recherches des jeunes actifs pour "voyage zéro-déchet" ont augmenté de 74 % en 2018. Dans leur vie de tous les jours, ils se soucient aussi de l’environnement en cuisine, en choisissant des ustensiles et des designs éco-responsables ; dans les activités de leurs enfants ou encore dans les cadeaux qu’ils offrent, explique le site.
Pour autant, souligne le journaliste Kévin Badeau dans une récente tribune publiée par Les Echos, « ces Millennials ne sont pas aussi vertueux qu’ils l’exigent de leurs dirigeants et sont même parmi les premiers contributeurs de la si invisible pollution numérique ». (1) Leurs consommations de vidéos et autres musique en ligne, sans compter le streaming, ont en effet un coût écologique désastreux qui se chiffre en mégatonnes de CO2 (mais le savent-ils seulement ?).
Face à ces comportements et pour gagner durablement la bataille des gaz à effet de serre, il en faudra donc des milliers de voitures électriques sur les routes dans les années qui viennent ! A condition, toutefois, que la ressource électrique « propre », soit au rendez-vous. A cet égard, le débranchement en urgence, le 7 octobre, de 21 sites de production industriels fortement consommateurs d’électricité par RTE (le réseau de transport d’électricité), faute de production suffisante du système français, n’est pas pour rassurer. Ce dispositif mis en place en 2011 pour éviter tout risque de « black-out » n’a été utilisé jusqu’alors qu’une seule fois (en janvier 2019). Gageons qu’avec l’explosion des usages électriques (visibles ou invisibles), les réseaux électriques risquent souvent de frôler la surchauffe.
Il en va de l’écologie comme du train : tout le monde veut les gares, mais personne ne veut les rails !
L’Arval Mobility Observatory
(1) Une jeunesse écolo…mais pas trop (Les Echos 11 octobre 2019)