Environnement : où allons-nous ?
On vit décidément en plein paradoxe. Pas un jour sans que la défense de l’environnement et la lutte contre le réchauffement climatique ne fassent les gros titres de l’actualité. Pas un mois sans qu’une nouvelle étude d’experts ne prédise – pas encore la fin du monde certes –, mais la hausse des températures, la montée des océans, la fonte accélérée des glaciers et le développement des zones désertiques…. Dans les rédactions télés et radios, depuis la rentrée, c’est aussi le branle-bas de combat, avec des émissions quotidiennes (du jamais vu) désormais dédiées à l’environnement.
Et pendant ce temps, que nous apprend la dernière livraison de l’OCDE sur l’état des lieux des réformes fiscales dans les pays industrialisés en 2019 ? Et bien que le rythme des mesures fiscales sur l’environnement a connu cette année un sérieux coup de frein !
De là à en conclure, une fois de plus que,"la maison brûle et nous regardons ailleurs", pour reprendre une formule désormais mondialement connue de Jacques Chirac, il n’y a qu’un pas (1).
Le fait est que, selon l’OCDE qui a passé au crible une quarantaine de pays (2), "le désir d’entreprendre des réformes fiscales structurelles semble paradoxalement s’émousser". Et d’évoquer, par exemple, l’absence de progrès en matière de taxation carbone. Pire "plusieurs pays ont allégé les taxes sur la consommation d’énergie ou sont revenus sur des réformes qui avaient été mises en place afin de mieux aligner la taxation de l’énergie sur le coût pour le climat".
Pour l’organisation, "ces résultats semblent être en porte‑à‑faux avec les objectifs affichés (…) en matière de lutte contre le changement climatique et de préservation de l’environnement et avec leur volonté d’améliorer l’efficience de leur système fiscal".
En France, la crise des "gilets jaunes" et leur mobilisation samedi après samedi depuis bientôt un an, ont eu raison du projet d’harmonisation des taxes sur le diesel et l’essence et de la hausse de la taxe carbone initialement prévue le 1er janvier 2019. Depuis, chaque velléité de restaurer tout ou partie de cette taxe est potentiellement explosive pour l’exécutif, qui a jusqu’ici botté en touche.
On verra quel sort sera d’ailleurs réservé à la dernière proposition du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), un organisme rattaché à la Cour des comptes, qui a relancé hier l'idée d’une taxe carbone élargie à toutes les consommations fossiles… Car hasard du calendrier, le même jour, un collectif des "gilets jaunes" a réclamé un "gel immédiat des prix des carburants" pour prévenir toute flambée à la pompe consécutive à l’attaque des installations pétrolières par des drones en Arabie Saoudite.
A quelques jours de la présentation du projet de loi de finances pour 2020 en Conseil des ministres, la fiscalité sur l’environnement s’invite donc – une nouvelle fois – en force dans l’agenda de l’exécutif et du président Macron. Et pendant ce temps, les nouvelles études sur le climat égrènent inlassablement leurs statistiques anxiogènes : 280 millions de personnes vivant dans les zones littorales pourraient être déplacées d’ici la fin du siècle à cause de la montée des océans, elle-même liée à la hausse de la chaleur qui ne serait plus de +4,8 degrés mais de + 7 degrés. Qui dit mieux ?
Modifier ou instaurer une nouvelle taxe est un petit pas pour l’homme ; mais le grand saut pour l’humanité serait le déploiement d’une politique fiscale sur l’environnement stable : "la fiscalité durable".
L’Arval Mobility Observatory
(1). Discours devant l’Assemblée plénière du IVème sommet de la Terre à Johannesburg, le 2 septembre 2002.
(2). « Tax Policy Reforms » 2019 – OCDE- 12 septembre 2019