Cap sur le lithium "made in France"
Cette reconquête industrielle passe, entre autres, par le contrôle des matériaux critiques qui entrent dans la composition des batteries, aux premiers rangs desquels le lithium ou le cobalt ou le nickel. "Il faut travailler sur toute la chaîne de valeur. Nous avons des mines de lithium en France et nous allons les développer grâce au nouveau code minier ; c'est clé pour notre souveraineté", a ainsi annoncé le président.
Il y a quelques mois, l’ancienne ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, avait indiqué que face au boom annoncé de la demande, la France ne devait "s’interdire de rien" en matière d’extraction. L’Élysée persiste donc et signe dans cette voie.
Jusqu’alors, le lithium était avant tout utilisé dans la conception des éoliennes, des céramiques ou encore des médicaments. L’explosion de la voiture électrique change la donne dans la mesure où elle va démultiplier sa consommation dans le monde, au risque de lui conférer un statut de nouvel "or blanc", au même titre qu’hier, "l’or noir" pétrolier. Selon le cabinet de conseil Rare Earth Advisory, dans les prochaines années, c’est d’ailleurs le lithium qui connaîtra la plus forte demande (multipliée par 8 entre 2020 et 2030), devant le cobalt (dont les besoins quintupleraient).
La bonne nouvelle c’est que cette fois, la France, contrairement au pétrole, dispose de réserves de lithium tout à fait significatives. En 2018, le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) les a même quantifiées : à l’époque, 41 sources de lithium avaient été recensées en France, sur une diagonale allant du Massif armoricain au Massif central. Le même BRGM estime le potentiel tricolore à près de 11 millions de tonnes de lithium, soit l'équivalent de 2 % de la production annuelle mondiale.
Le maillon faible, c’est que ces réserves sont pour le moment largement inexploitées. La première usine française de lithium pour batteries de véhicules électriques ne devrait ouvrir que fin 2025 à Lauterbourg, dans le Bas-Rhin, à l’initiative d’une entreprise de recherche alsacienne Viridian associée à Technip Energies et Veolia Water. De quoi tenir tête (à terme) aux principaux producteurs de lithium que sont le Chili, l’Australie ou encore la Chine (60 % dans le monde) ? Et asseoir la souveraineté nationale de la France ?
A voir. Car le lithium "made in France" n’a pas que des supporters. Ses détracteurs pointent les conséquences environnementales de son exploitation, notamment en termes de consommation d’eau. Dans son dernier livre sur le véhicule électrique, l’ex-directeur des services économie de TF1 et de LCI, François-Xavier Pietri, rappelle que "pour sortir une tonne de lithium, un million de litres d’eau sont nécessaires. Pour fabriquer une batterie électrique, il faut donc l'équivalent de la consommation d’eau de 500 personnes pendant un an". (2)
Dans ce débat, comme dans celui de la transition énergétique en général, aucune solution n’est totalement "blanche ou noire". Vaut-il mieux déployer sa propre filière intégrée de production de batteries ou dépendre de pays extérieurs ? L’Élysée, en tout cas, a tranché.
L’Arval Mobility Observatory
(1). Emmanuel Macron : « Il faut une politique massive pour réindustrialiser l'Europe » | Les Echos, 17 octobre 2022.
(2). "Voitures électriques, ils sont devenus fous", par François-Xavier Pietri. Editions de l’Observatoire.
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